Jerry, célibataire, vit à Milton, une petite ville paisible. Son quotidien est partagé entre son travail dans une entreprise de confection de baignoires qu’il fait avec application et ses séances chez le psy.
Son quotidien se verra chambouler quand il tombera amoureux de Fiona, la comptable de l’entreprise, qui lui fait tourner la tête, sans compter qu’il a décidé d’arrêter son traitement médical contre l’avis de sa psy…
Avis de Florian :
A voir le titre, on pense tout de suite à l’émission de télé-crochet : The Voice (émission qui a encore plus de succès aux États-Unis qu’ici) où des coachs doivent trouver la meilleure voix et emmener leur candidat le plus loin possible dans l’aventure.
On imagine alors à la lecture du titre du film à voir une comédie musicale.
Le film s’ouvre sur des plans d’ensemble de la ville de Milton présentée comme une ville ouvrière toute grise, morne, polluée puis le film enchaîne sur des plans de Jerry, le personnage principal, au travail (il travaille dans une entreprise de confection de baignoire) et la photographie change de cap et devient kitch et pop avec l’omniprésence de la couleur rose associée à des teintes blanches, laiteuses, apaisantes. On comprend alors que ce changement de cap stylistique est dû à l’introduction à l’écran de ce personnage.
En effet, toutes les images du film qui suivront seront la perception visuelle que le personnage principal a du monde qui l’entoure, qui sans sa prise de médicament le voit autrement, plus enjolivé.
Cette séquence d’introduction du personnage est alterné avec un générique dessiné qui nous donne un indice sur le parti pris esthétique que la réalisatrice va adopter : celui des parties chantées des dessins animées de Disney d’antan.
En effet, le film en reprend tous les codes avec l’omniprésence de couleurs vives voire criardes comme les chemises collectors de Jerry, la présence de papillons qui gravitent autour des personnages, des objets « chorégraphiés » ou encore le nombre important d’envolées de caméra avec tous ces plans grues.
Un aspect esthétique qu’on a déjà vu dans d’autres films live (notamment dans les productions Disney) sauf que l’originalité ici réside dans l’absence des « voices » du titre.
Une comédie musicale qui en reprend que les codes esthétiques (si ce n’est le bouquet final chanté après une retenue d’une heure et demi).
Il y a bien une séquence clin d’œil au parti chanté des comédies musicales où, Jerry qui est amoureux, chante au travail mais est vite coupé par un collègue qui ne supporte pas sa voix aiguë et fluette !
Excellent Ryan Reynolds, qu’on sait depuis ses apparitions dans les films de Seth McFarlane, qu’il n’a pas peur de l’autodérision. Avec son air benêt et niais, il arrive à rendre attachant un personnage qui plus tard dans le film commettra des actes horribles de violence. Avec son passif d’acteur qui ces dernières années à essuyé un nombre conséquent d’échecs au box office avec des films infâmes, il n’a pas eu de mal a jouer un personnage qui lutte pour être accepté et aimé malgré les choses horribles qu’il commet.
Car à la manière de La mélodie du Malheur de Takashi Miike, l’autre originalité du film est de mélanger habilement (pseudo) comédie musicale et comédie macabre.
A quoi correspond alors « les Voices » annoncées dans le titre ?
A Jerry, qui sans sa prise de médicaments, entend des voix lui dicter quoi faire. L’idée amusante du métrage vient du fait que ces voix sont contradictoires.
En effet à la manière d’un cartoon de Tex Avery où le personnage aurait sur chaque épaule sa représentation angélique et maléfique en version mini, ici, Jerry a comme coachs, non pas Jennifer et Florent Pagny, mais Monsieur Moustache : son chat roux qui représente ses pensées obscures et Bosco : son chien qui représente ses pensées naïves.
Tout au long du film, la réalisatrice, qui vient de la bande dessinée (l’auteur de Persepolis) recycle astucieusement la pop culture américaine avec en plus des références aux grands classiques dessinés de Disney et à la grande période des comédies musicales d’Hollywood, propose aussi sa version trash du comic strips : Garfield de Jim Davis.
Le film reprend le même cadre de départ que l’œuvre de Jim Davis : un homme profondément seul, un chat roux qui ne pense qu’à manger quand il n’est pas occupé à embêter son maître et un bon chien niais et serviable.
On peut d’ailleurs parfaitement résumer le film à ce strip de Garfield :
Truffé de pleins de petits détails amusants que seule une auteure de bandes dessinée, auraient pu trouver (comme le bipper que Jerry ne quitte jamais, même quand il ne porte qu’un slip), avec un scénario très malin et un dosage parfait de références visuelles à la pop culture américaine : ni trop kitch, ni trop gore, voilà un film hautement recommandable.
Une année cinématographique qui, avec Realité et Birdman, commence déjà à être bien fournie en films fous. Un cinéma rare fait de prises de risques qu’il faut soutenir.
Note :
Titre : The Voices
Année : 2015
Durée : 1h49
Origine : U.S.A / Allemagne
Genre : Thriller / Romance / Comédie
Réalisateur : Marjane Satrapi
Acteurs : Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick, Jacki Weaver.