[Film] Zatoichi Challenged, de Kenji Misumi (1967)


Ichi doit partager une chambre avec une femme et son enfant. Très malade, cette dernière meurt dans ses bras non sans lui avoir fait promettre de ramener le petit Ryota à son père, un certain Shokichi. Après un voyage avec une troupe de saltimbanques, Ichi finit par retrouver la trace de l’homme qui gagne sa vie en peignant sur des poteries. Mais les choses ne sont jamais simples pour le masseur car Shokichi est retenu prisonnier par le boss local qui l’oblige à réaliser des peintures érotiques illégales. Une fois de plus, la fameuse canne-épée devra entrer en action pour que le père et le fils puissent enfin être réunis.


Avis de Kwaidan :
Retour de Kenji Misumi à la réalisation pour ce 17ème volet de la longue, mais toujours aussi excitante, saga du plus célèbre des masseurs. Une fois de plus, le spectacle est total et rien ne manque à ce ZATOICHI CHALLENGED.

Tout comme dans le superbe 8ème épisode, Ichi fait la promesse à une femme agonisante d’amener un enfant à son père. Si la « mission » reste la même, la tâche devient beaucoup plus ardue lorsque le gamin se révèle un garnement beaucoup plus agité que les adorables petites filles et le bébé qui ont déjà croisé la route du masseur. Le film est en quelque sorte un précurseur au Kikujiro de Takeshi Kitano : Ichi prend d’abord sa mission à contre cœur, d’autant que l’attitude de l’enfant l’agace sérieusement au point qu’on s’attendrait presque à ce qu’il se mette aussi à l’appeler « petit con ». Il faut dire que le petit Ryota prend un malin plaisir à faire tourner Ichi en bourrique et ce dernier tombe toujours tête baissée dans le panneau. Leurs chamailleries perpétuelles sont un véritable régale et il faut voir Ichi, bien énervé, courir après le gamin comme Homer Simpson après une sale blague de Bart. Mais petit à petit, une tendre complicité va s’installer entre eux et « l’oncle Ichi » et son jeune protégé deviendront inséparables. L’autre figure marquante de cette aventure est le samouraï qui, comme bien souvent, estime énormément Ichi mais se retrouve forcé de le combattre à la fin. S’il est un homme bon et extrêmement généreux, ce dernier est capable de laisser toute pitié de côté pour remplir une mission et, même si cela le répugne au fond de lui, n’hésiterait pas à tuer une femme et un enfant. Qu’importe alors si Shokichi a été forcé de tomber dans l’illégalité, s’il vient de découvrir l’existence de son fils et pourrait enfin avoir une vie heureuse avec lui : si l’ordre est de l’éliminer, sa tête tombera. Une chose qu’Ichi, homme qui agit selon ce que lui dicte son cœur, ne peut accepter. Le masseur n’hésitera donc pas à se mettre en travers de la route du samouraï et à lutter de toutes ses forces afin de sauver un homme innocent et, surtout, s’assurer que Ryota ne finisse pas orphelin.

Privé trop tôt de ses parents, Ichi sait bien que si l’enfant perdait son père, il pourrait lui aussi mal tourner et devenir un yakuza. La voie du cœur et la voie du samouraï s’affrontent dans un duel final remplit de fureur qui donnera une grande leçon au samouraï. Ebranlé dans ses convictions par le sens du sacrifice et la détermination du masseur aveugle, il décidera de ne plus obéir aveuglément aux ordres et deviendra l’égal du grand samouraï qu’aurait fait Ichi s’il avait été voyant : un homme d’honneur, un épéiste redoutable mais surtout quelqu’un que tous les ordres du monde ne sauraient empêcher d’écouter son cœur. Une conclusion plutôt inédite dans la série, le personnage finissant généralement par mourir, et d’une grande force. Le reste du film est comme à l’accoutumé : drôle, magnifiquement interprété et réalisé, spectaculaire et extrêmement émouvant, en particulier lors des adieux entre Ichi et Ryota. Caché sous un pont, le masseur entend le gamin, juste au-dessus de lui, lui lancer des insultes dans l’espoir de le provoquer et le faire revenir vers lui. Mais la route du masseur n’est pas finie et une fois de plus, il devra abandonner ceux auxquels il s’était attaché en espérant qu’ils auront des vies heureuses et resteront de bonnes personnes. Au-delà de l’action spectaculaire, ce qui rend la saga de Zatoichi si attachante est sa grande humanité. Depuis 17 films, elle parvient toujours autant à toucher le spectateur en plein cœur qu’à lui en mettre plein la vue par ses chorégraphies de folie.

LES PLUS LES MOINS
♥ La complicité entre Ishi et l’enfant
♥ L’humour
♥ L’action
⊗ …

Comme ses prédécesseurs, ZATOICHI CHALLENGED est un film indispensable et même un des meilleurs de toute la saga (décidément une constante chez Kenji Misumi). Ça ne va pas aider ceux qui veulent se constituer un « best-of » des aventures du masseur aveugle mais il faut bien se rendre à l’évidence : les 26 films constituent tous des sommets du chambara. On se dit qu’on en prendra que 3 ou 4 mais on finit presque toujours avec la série complète. Ben oui, c’est comme ça quand on goûte aux aventures du plus grand anti-héros de tous les temps !



Titre : Zatoichi Challenged / Zatoichi 17 / 座頭市血煙り街道
Année : 1967
Durée : 1h27
Origine : Japon
Genre : Chanbara
Réalisateur : Kenji Misumi
Scénario : Ryozo Kasahara

Acteurs : Shintaro Katsu, Jushiro Konoe, Miwa Takada, Yukiji Asaoka, Mikiko Tsubouchi, Mie Nakao, Takao Ito, Midori Isomura, Eitaro Ozawa, Asao Koike

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Auteur : Kwaidan

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