[Film] Zatoichi and the Chest of Gold, de Kazuo Ikehiro (1964)


A la suite d’un effroyable malentendu, Ichi est accusé d’avoir volé les 1000 ryos d’impôts d’un groupe de paysans. Afin de laver son nom, le masseur aveugle s’engage à retrouver le coupable et à s’assurer que justice soit faite. Il sera amené à affronter Jushiro, un redoutable rônin maniant aussi bien le fouet que le sabre.


Avis de Kwaidan :
Sixième aventure du masseur aveugle, ZATOICHI AND THE CHEST OF GOLD est, avec ZATOICHI MEETS THE ONE ARMED SWORDSMAN, le seul épisode à avoir été exploité en France sous le titre LE SAMOURAI AVEUGLE, qui démontre que les distributeurs n’avaient visiblement rien compris à la nature du personnage. Cet épisode puise son originalité dans son côté film noir, Ichi menant ici une véritable enquête policière pour laver son nom et restituer leur bien aux paysans.

Le film est esthétiquement élaboré et Kazuo Ikehiro soigne particulièrement le travail au niveau des ombres. Il en résulte des images d’une grande beauté comme cette procession de lanternes et ces silhouettes qui se détachent telles des ombres chinoises sur le ciel gris. Reste que ce visuel très sombre réduit à plusieurs reprises la visibilité de certains combats, ce qui est toujours un peu frustrant même lorsque l’effet est volontaire. Si les combats sont toujours aussi bien chorégraphiés, ils s’avèrent dans l’ensemble assez répétitifs et moins inventifs. De plus, leur mise en images est légèrement en dessous des épisodes précédents, le réalisateur optant un peu trop souvent pour des plans larges et un découpage minimaliste. Il cherche également à donner un aspect « bande dessinée » à son film lors de la découverte du larcin et l’annonce de l’exécution des trois paysans révoltés mais en fait malheureusement un peu trop la première fois, d’où une séquence qui n’est visuellement pas du meilleur goût.

Ces petits bémols n’empêchent toutefois pas des moments d’une grande force, en particulier cette scène magnifique où un chef de gang ami d’Ichi et protecteur des paysans assiste, les larmes aux yeux, au sacrifice de ses hommes pour lui permettre de s’enfuir. S’ajoutent à cela une scène où Ichi demande à l’enfant qui l’accompagne de fermer les yeux pour que son regard ne soit pas souillé par la violence des combats et un duel final très westernien durant lequel le masseur endure un véritable calvaire. Pour la première fois de la série, le héros termine l’aventure blessé, en état de choc pour n’avoir jamais frôlé la mort d’aussi près. On retrouve également la désormais traditionnelle scène où Katsu Shin démontre ses autres talents artistiques, ici la danse et le tambour, et un côté humoristique dans la veine de l’opus précédent avec notamment une scène très drôle entre Ichi et une vieille prostituée laide et malodorante. Enfin, n’oublions pas un générique de début d’anthologie comme on pourrait en trouver dans un James Bond et qui montre plusieurs petites séquences sur fond noir où le masseur aveugle élimine ses agresseurs au milieu des crédits du film. Si on pouvait noter une petite allusion dans ZATOICHI ON THE ROAD, ce volet insiste beaucoup plus sur le fait qu’Ichi serait voyant. De nombreuses séquences laissent planer le doute sur sa cécité et le masseur ne fait rien pour clarifier les choses en rappelant qu’il est aveugle un peu trop souvent pour être honnête. Cependant, si l’on considère qu’Ichi simule son handicap, certaines séquences clés deviennent incohérentes comme par exemple lorsqu’il est victime de la ruse du rônin ou dit à une jeune femme qu’il a tué son frère parce que sa cécité l’a empêché de voir que ce dernier n’était pas un véritable ennemi.

Les quatre premiers épisodes conservaient un lien entre eux qui s’est achevé avec la mort de Tane dans ZATOICHI THE FUGITIVE. Les épisodes 5 et 6 sont donc des histoires totalement indépendantes. ZATOICHI AND THE CHEST OF GOLD rompt d’autant plus toute continuité logique en faisant revenir le génial Tomisaburo Wakayama dans le rôle de Jushiro alors que ce dernier jouait un tout autre personnage, le frère d’Ichi, et trouvait la mort dans le second opus. Opposer à nouveau ces deux frères et figures mythiques du chambara reste toutefois toujours aussi fascinant et donne lieu à des faces à faces de légende comme lorsque les deux personnages s’affrontent au jeu. Difficile de trouver aujourd’hui des acteurs dégageant une telle présence et un tel charisme à l’écran. Le héros de BABYCART signe à nouveau une composition mémorable avec ce rônin balafré vicieux et adepte du fouet, une arme redoutablement rapide et efficace contre un masseur aveugle passé maître dans l’art du sabre. Si seulement Zatoichi avait pu croiser la route d’Itto Ogami et Daïgoro (un rêve de fan qui représente le cross-over ultime pour l’auteur de ces lignes) …

LES PLUS LES MOINS
♥ Visuellement très réussi…
♥ De bons combats…
♥ Des scènes très puissantes
♥ L’humour réussi
⊗ … mais un peu sombre
⊗ … mais un peu répétitifs

Même s’il s’avère un peu en dessous de ses prédécesseurs et d’autres épisodes mythiques, ce ZATOICHI 6 reste digne du très haut niveau de qualité instauré par cette fantastique série. Six premiers films, six réussites: aussi bien que la saga du loup solitaire et l’enfant. Combien de séries peuvent se vanter d’avoir maintenu leur excellence aussi longtemps? Vraiment pas beaucoup…



Titre : Zatoichi and the Chest of Gold / Zatoichi 6 / 座頭市千両
Année : 1964
Durée : 1h23
Origine : Japon
Genre : Chambara
Réalisateur : Kazuo Ikehiro
Scénario : Shozaburo Asai, Akikazu Ota, Kan Shimozawa

Acteurs : Shintaro Katsu, Shogo Shimada, Machiko Hasegawa, Tomisaburo Wakayama, Tatsuya Ishiguro, Matasaburo Niwa, Hikosaburo Kataoka, Mikiko Tsubouchi

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Auteur : Kwaidan

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