[Film] Year 10, de Ben Goodger (2024)


Dade Abrités dans une cabane dissimulée par des branches moussues, un père, son fils et la petite amie de ce dernier ont survécu pendant dix ans à un événement catastrophique. Luttant contre une infection sanglante et des foules cannibales, le trio doit survivre par tous les moyens.


Avis de Cherycok :
Allez savoir pourquoi, l’affiche de Year 10, arborant fièrement un loup et une demoiselle bandant un arc dans un décor post-apocalyptique, m’a immédiatement attiré. Bon, il s’avèrera après visionnage qu’il n’y a au final ni loup, ni guerrière avec un arc en tant que protagoniste principal, mais Year 10 a malgré tout fait son office. Il est l’œuvre d’un certain Ben Goodger qui, après plusieurs courts métrages et un épisode de série, décide d’adapter son premier court, Coming of Age (2010) en long métrage. On sait l’exercice périlleux tant certains ont du mal à étirer un format court à un film de 1h30, mais bien qu’il ait quelques problématiques, Ben Goodger s’en sort très honorablement avec Year 10. Mieux encore, on est curieux de voir ce que donnera la suite de la filmographie du jeune metteur en scène qui va nous accrocher dès les premières secondes avec sa bobine post-apo certes classique mais relativement efficace.

Le film s’ouvre sur les phrases « Tout s’est terminé en un jour. Au début, les vivants mangeaient les morts. En l’an 10, les vivants mangeaient les vivants. ». Nous sommes en l’an 10 (d’où le titre donc) et le film commence par nous présenter son monde, ses paysages désolés, sinistres, moites, une Terre en ruines avec une société qui s’est effondrée et des gens qui survivent comme ils le peuvent. Un monde où la moindre maladie, où la moindre blessure qui s’infecte diminue considérablement les chances de survie. Un monde où on ne peut faire confiance qu’aux proches car il fait ressortir les plus bas instincts de l’homme. Jamais on ne nous explique ce qu’il s’est passé, à chacun de se faire sa propre idée. Le film va s’attarder sur ce monde dévasté, sur ses survivants, dans quelque chose qui sera familier à qui a déjà vu un tant soit peu de films du même genre car Year 10 ne cherche pas à être innovant sur son univers. Sa seule particularité, c’est que le film est entièrement muet. Pas de dialogues, donc forcément le public va machinalement se concentrer sur la musique et les bruitages et un joli travail a été effectué là-dessus. Dès les premiers secondes, l’atmosphère est inquiétante et arrivera certainement à provoquer quelques frayeurs chez les esprits les plus fragiles, avec des notes parfois très aigües, pour provoquer l’effroi. Le monde qui nous est présenté est sans pitié pour les plus faibles qui se retrouvent chassés, tués, voire mangés. L’ambiance y est sale, poisseuse, avec des protagonistes recouverts de boue, de crasse, des vêtements sales, déchirés et sincèrement, l’ambiance fin du monde est très bien retranscrite avec des humains réalisant des actes parfois désespérés. On sent le poids du désespoir sur les épaules des personnages et on se demande régulièrement ce qu’on ferait si on était à leur place, dans leur situation. Les scènes d’action possèdent également une jolie intensité. Que ce soit deux des protagonistes principaux qui se cachent d’une meute de chiens affamés, qu’ils soient cachés et assistent à un meurtre en espérant ne pas se faire voir, ou encore l’attaque d’un camp pour essayer de trouver quelques vivres, on a tendance à immédiatement ralentir notre respiration, la rendre plus silencieuse, comme si on était à leurs côtés en train de se cacher.

D’autant plus que la mise en scène est efficace, tout comme la photographie nous présentant un monde qui semble dépourvu de vie, aux couleurs ternes, aux forêts et au champs qui semblent sans fin, créant de très beaux plans d’ensemble certes mornes, mais très en phase avec l’univers dépeint. Le casting s’investit pleinement et est une des forces du film. On ressent qu’ils ont froid, on ressent leur peur, on ressent leur détermination. Toby Goodger, dont c’est le premier rôle, livre une excellente prestation, très crédible, très athlétique, tout comme l’imposant Luke Massy (Hooligans 2, la série Hôpital Central) en leader sans pitié. Mais le problème, c’est que le protagoniste principal est assez énervant car il fait constamment les mauvais choix et ça en finit par être parfois très agaçant au point qu’on a envie de le traiter de tous les noms au travers de la télévision. A l’instar d’un film comme Silent Night de John Woo, qui jouait sur le même créneau du film sans parole (ou presque), le concept tombe dans certains travers. Parfois, ce n’est clairement pas justifié que les personnages ne s’expriment pas entre eux. Qu’ils cherchent à ne pas faire de bruit pour ne pas se faire détecter, soit, mais lorsqu’ils sont clairement seuls, l’absence de paroles n’est pas justifiée. Même chose lorsque les méchants chassent en meute, il n’y a aucune raison pour laquelle ils devraient rester silencieux entre eux, ils pourraient chuchoter sans aucun souci. Autre problématique de cette absence totale de dialogues, c’est qu’on ne se sent pas pleinement lié aux personnages puisque nous n’avons pas accès à leurs pensées, à leurs motivations, à ce qui les pousse à faire certaines choses. Certes, certaines émotions n’ont pas besoin de paroles, mais on perd parfois un peu en compréhension et le film n’aurait eu que plus de force si les personnages s’étaient exprimés de temps à autre, quitte à limiter au maximum leurs paroles. Du coup, malgré tous les efforts sonores, on n’est clairement pas immergés comme on devrait l’être dans ce type de film et c’est très dommage car un réel grand soin a été apporté à tout le reste. Néanmoins, même si ça manque d’interactions verbales, le concept fonctionne suffisamment pour nous garder concentré et on s’habitue sans aucun souci à ce que personne ne parle. En même temps, dans le même genre, Sans un Bruit est passé par là il y a quelques années et ceux qui ont vu le film de John Krasinski ne seront pas dépaysés par Year 10.

LES PLUS LES MOINS
♥ Ambiance post-apo bien retranscrite
♥ Maigre budget savamment utilisé
♥ Le casting
♥ Jolie photographie
♥ Bon travail sonore
⊗ Le concept parfois artificiel
⊗ Un personnage principal énervant
⊗ Au final très classique
Bien qu’il manque un peu de mordant et qu’on sente qu’il s’agit d’un court métrage étiré en long, Year 10 reste malgré tout un honnête divertissement suffisamment prenant pour que les amateurs de survie post-apo y trouvent un certain intérêt.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Avant d’arriver directement en VOD / SVOD aux Etats-Unis le 6 décembre 2024, le film a tourné dans quelques festivals comme le FrightFest en aout 2024 ou le Sitges Film Festival en octobre 2024.



Titre : Year 10
Année : 2024
Durée : 1h36
Origine : Angleterre
Genre : Survie à tout prix
Réalisateur : Ben Goodger
Scénario : Ben Goodger

Acteurs : Toby Goodger, Luke Massy, Hannan Khalique-Brown, Alexander Anderson, Emma Cole, Joseph Coleman, Tom Gaskin, King Gayle, Ellis Jones, Duncan Lacroix

Year 10 (2024) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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