Un artiste martial doit s’entraîner sans cesse pour vaincre le voleur brutalement puissant appelé Centipede.
Avis de Cherycok :
Lau Shut-Yue a commencé sa carrière comme stagiaire à la TVB, puis a travaillé en coulisses pour le studio Shaw Brothers. Alors que c’est la fuite des cerveaux chez le célèbre studio dans la première moitié des années 80, ils décident en 1984 de confier sa première réalisation à ce jeune premier avec New Tales of the Flying Fox. Malgré le flop de ce dernier et une société qui est au bord de la banqueroute, Lau Shut-Yue réalise l’année suivante, toujours pour le compte de la Shaw Brothers, The Young Vagabond qui nous intéresse ici, à peine quelques mois avant que le studio ne tire sa révérence en 1985. Plus tard, on verra Lau Shut-Yue à la tête de comédies d’horreur telles que Ghost Fever (1989), Ghost Busting (1989), My Neightbours are Phantoms (1990) ou encore Forced Nightmare (1992). Mais revenons-en à nos moutons, ou plutôt à The Young Vagabond, un film qui représente bien la fin de la Shaw Brothers.
Oui, The Young Vagabond représente bien la fin du mythique studio de Hong Kong, avec ses patrons qui refusaient de changer, d’innover, englués depuis la fin des années 70 dans les mêmes formules, malgré une tentative de diversifier au début des années 80 mais clairement trop tardive, incapable d’arriver à répondre à la concurrence de Jackie Chan, Sammo Hung ou des nouveaux polars nerveux qui arrivaient en masse. Nous sommes ici dans une kung fu comedy en costume comme la Shaw en faisait des dizaines à la fin des années 70 / début 80, une kung fu comedy pas mauvaise, mais qui à aucun moment ne sort du lot au point qu’on a l’impression par moments de revoir encore et toujours le même film. D’autant plus que le personnage central est Beggar So, figure déjà utilisée dans de nombreux films de Hong Kong, des années 50 jusqu’à encore aujourd’hui dans les DTV chinois. A la Shaw Brothers, Gordon Lui (qui l’interprète ici) jouait par exemple déjà ce rôle dans Heroes of the East (1978) et Philip Kwok l’incarnera l’année suivante dans Ten Tigers of Kwangtung. Bref, tout ça pour dire que la Shaw jouait plus sur le recyclage que la nouveauté, ce qui a précipité sa perte, et ce Young Vagabond n’est clairement à aucun moment un minimum original. Pourtant, l’ensemble n’est jamais désagréable, bien au contraire, le film se montre même parfois très amusant, en partie grâce à un scénario de Wong Jing qui cherche sans cesse à amener de la légèreté et du rire via des gags jusque dans les combats. Certaines scènes, à l’instar de celle du diner, sont très drôles et certains personnages, comme celui du policier crétin incarné par Ku Fung, valent leur pesant de cacahuètes. On n’échappe malheureusement pas aux blagues en dessous de la ceinture ou alors beaucoup trop enfantines pour réellement faire rire. Il faut dire que les gags sont nombreux pendant toute la première heure et il est clairement difficile, vu leur nombre, de faire mouche à tous les coups.
Le changement de ton pour les dernières 20 minutes a le mérite d’un peu plus marquer les esprits mais est un peu trop abrupt, lui conférant un côté un peu artificiel, comme si quelqu’un s’était dit aux deux tiers films que « hey, faut faire un truc sérieux et bien violent, parfait que c’est la mode ! ». A partir de là, les morts vont commencer à s’enchainer de manière un peu trop forcée. On en vient aux scènes d’action car, qui dit kung fu comedy dit combats. Law Keung a beau avoir eu une carrière d’acteur extrêmement prolifique dans les années 70, en particulier à la Shaw Brothers, dans de très nombreux petits rôles, on ne retiendra pas réellement sa période 80’s à la direction des scènes martiales. Non pas que le bougre soit mauvais, et d’ailleurs les scènes de fight de The Young Vagabond sont des plus sympathiques (bien que parfois trop accélérées, Benny Hill n’est pas loin), mais il n’a pas la carrure d’un Liu Chia Liang, d’un Tong Kai, d’un Robert Tai ou d’un Lu Feng qui ont longtemps œuvré pour le studio. Il faut dire qu’en fin de route de la Shaw, beaucoup avaient quitté le navire, réalisateurs, chorégraphes, et même artistes martiaux, et le studio était un peu obligée de composer avec ce qu’il restait. Et même si Gordon Liu ou Jason Pai Piao sont des artistes martiaux plus que confirmés, ni les chorégraphies certes sympathiques mais au final assez lambdas, ni la mise en scène qui l’est tout autant, n’arrivent à rendre hommage à leur talent. C’est très loin d’être mauvais à ce niveau-là, mais en face il y avait déjà des Police Story ou des My Lucky Stars dans le genre comédies d’action avec des combats. Les temps avaient changé, la Shaw Brothers n’a pas su suivre le mouvement, The Young Vagabond en est l’exemple même.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Des gags qui fonctionnent… ♥ Bien rythmé ♥ Des scènes de combats nombreuses ♥ Le casting sympathique |
⊗ … d’autres pas du tout ⊗ Déjà vu et revu ⊗ Le changement de ton trop abrupt |
The Young Vagabond reste malgré tout un spectacle assez distrayant, très généreux, qui sur le moment amuse et fait parfaitement le boulot. Mais il est tellement déjà-vu, et au final assez quelconque, qu’il sera très rapidement oublié. Sympathique malgré tout. |
Titre : The Young Vagabond / 少年蘇乞兒
Année : 1985
Durée : 1h25
Origine : Hong Kong
Genre : Kung Fu très Comedy
Réalisateur : Lau Shut-Yue
Scénario : Wong Jing
Acteurs : Gordon Liu, Jason Pai Piao, Johnny Wang, Wong Yu, Ku Feng, Kwan Hoi-San, Kwan Fung, Wong Man-Ying, Leung San, Lam Fai-Wong, Yu Feng, Feng Chang