Entraînée depuis l’enfance aux techniques de combat les plus violentes par une agence de renseignement après l’assassinat de son père, Sook-hee est une arme redoutable. Afin de gagner sa liberté, elle est engagée comme agent dormant. Mais un jour, elle va découvrir la vérité sur le meurtre de son père.
Avis de Cherycok :
Voilà donc la dernière bombe venue de Corée du Sud qui a eu droit à sa standing ovation au dernier Festival de Cannes 2017 lors de son avant-première mondiale en Séances de Minuit. Chaque année, un film en provenance du pays du matin calme se fait remarquer : Old Boy, Ivre de Femmes et de Peinture, The Host, The Chaser, Mother, … Et donc cette année, c’est The Villainess de Jung Byung-Gil (Confession of Murder, Action Boys) qui aura fait sensation. Et dès que la première vidéo est arrivée sur la toile, un combat de sabre sur motos en faux plan séquence aux points de vue impossibles, elle s’est répandue comme une trainée de poudre et les amateurs de péloches d’action sont rapidement devenus hystériques, attendant la sortie du film tel le messie tant ce dernier semblait redéfinir tous les codes du genre dans un pur style fun et bourrin. En tant qu’amateur de films d’action décomplexé, The Villainess a tout de suite titillé ma curiosité. Mais au risque de choquer une grande majorité des lecteurs qui semblent être tombés en admiration devant The Villainess, il aura été pour moi un joli pétard mouillé. Peut-être en attendais-je trop ?
The Villainess aura eu sur moi un effet très étrange, celui de ne pas savoir ce qu’on en a pensé. Vous savez, quand on ne peut pas dire qu’on a aimé mais qu’on ne peut pas dire non plus qu’on n’a pas aimé. La mise en scène de Jung Byung-gil est complètement folle. Il aligne plans séquences de fou furieux sur plans séquences de fou furieux, certes faux et aidés numériquement, plans caméras complètement impossibles et du coup tantôt hallucinants, tantôt déstabilisants. Il maitrise parfaitement son éclairage, avec des effets ombres / lumières particulièrement réussis, tout comme la photographie qui, aidée de filtres très ternes, donne un aspect bien noir à son film, parfois même un peu craspec. La caméra virevolte dans tous les sens un peu comme s’il avait voulu reproduire le plan fou de The Raid 2 lors de la course poursuite en voiture durant tout son film. Sauf qu’est venue rapidement cette désagréable impression de réalisateur qui se la pète. Alors certes, certaines scènes font preuve d’une maestria hallucinante (le combat dans le couloir, la course poursuite en moto, le saut dans le fleuve), mais punaise que c’est prétentieux ! Un peu comme si Jung Byung-Gil avait voulu envoyer un bon gros fuck des familles à Hollywood en leur disant « hey les gars, z’avez vu comment j’en ai une grosse ? Et en plus, elle a scotché tout Cannes ! C’est qui le meilleur hein ? C’est qui ?».
Sauf qu’en voulant un peu trop impressionner par son visuel, le réalisateur oublie ce que bon nombre de ses petits copains hollywoodiens oublient, la lisibilité dans les scènes d’action. Parfois, c’est justement illisible ! C’est bien joli de faire mumuse avec la caméra, de la faire tourner partout, la faire passer dans des endroits théoriquement impossibles grâce aux drones et au numérique, mais plutôt que, en pleine scène de course poursuite, la faire passer sous un camion lancé à vive allure, on aurait préféré voir ce qu’il se passait réellement au niveau des protagonistes. Et c’est à chaque fois comme ça, on nous balance de l’esbrouffe visuelle plein la gueule, certes ça en jette, mais ça ne sert à rien et en plus ça nous coupe l’action. Pire encore, étant donné que les plans séquences sont faux, on arrive à déceler à quel moment il y a eu la coupe, d’autant plus qu’il y a des problèmes de placement dans l’espace, avec des personnages qui ne sont plus tout à fait à la même place, un peu comme dans un faux-raccord. Le numérique a parfois du bon mais il ne fait pas tout… Et que dire de ces figurants qui, lors des combats, semblent attendre gentiment leur tour pour venir se faire charcuter…
Et puisqu’on parle du numérique -quelle magnifique transition ‘achement bien trouvée-, parlons des effets sanglants. The Villainess ne lésine pas sur les giclées de sang, se fourvoyant à de nombreuses reprises dans le gore. Mais bon sang (ah ah) pourquoi, alors que parfois c’est bien du vrai faux sang, ont-ils une fois de plus recours au sang numérique !?! Le sang par ordinateur, c’est dégueulasse, point barre. Et même s’il est vrai que The Villainess franchit un cap dans le cinéma coréen pour arriver à rendre ses effets en images de synthèse quasiment invisibles à l’écran, le sang pose toujours quelques problèmes.
En termes de scénario, on ne peut pas dire que le film brille non plus. On est là dans une resucée de notre Nikita nationale, sur laquelle on aurait greffé des éléments de Old Boy, Kill Bill, Hardcore Henry, John Wick, Colombiana ou encore Au Revoir A Jamais. Hommage ? Clins d’œil ? Pompage ? Quoi qu’il en soit, ça ne brille pas pour son originalité et, peut-être conscient de ça, le réalisateur nous colle des flashbacks à tour de bras rendant le déroulement de l’histoire parfois confus (pour ne pas dire brouillon), un peu comme s’il avait voulu complexifier artificiellement une histoire au final assez lambda.
Tout n’est heureusement pas à jeter et le côté nihiliste du film est courageux et à saluer. Certains regretteront peut-être le sort de certains personnages et appuieront le fait que ce n’est là que pour accentuer la noirceur d’un film qui n’avait pas réellement besoin de plus. Mais le déferlement de violence et le côté jusqu’auboutiste du film lui donnent un certain cachet. Il faut dire que les acteurs semblent très impliqués dans leur rôle et rendent leurs personnages très crédibles malgré le manque de prestance de certains, à commencer par l’héroïne interprétée par Kim Ok-Vin. Cette dernière a beau être impressionnante martialement parlant et assez juste en termes de jeu, elle ne brille pas par son charisme au point de se demander parfois, lorsque plusieurs actrices féminines sont à l’écran, laquelle est laquelle. Et point de truc du genre « tu n’as pas l’habitude des films asiatiques, c’est pour ça. » parce que j’en regarde depuis 25 ans. Juste voilà, elle ne dégage pas une aura folle.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Un film très noir ♥ Quelques bonnes scènes |
⊗ L’abus d’esbrouffe visuelle ⊗ Lisibilité des scènes d’action ⊗ Trop de flashback ⊗ Le charisme du casting |
L’expérience The Villainess risque de diviser. Certains crieront au génie devant tant de folie dans des scènes d’action décomplexées. D’autres n’y verront là qu’un produit lambda complètement boursoufflé par des effets visuels n’apportant strictement rien. Je me place personnellement dans la deuxième catégorie, mais à vous de vous faire votre propre avis. |
Titre : The Villainess / Ak-Nyeo / 악녀
Année : 2017
Durée : 2h03
Origine : Corée du Sud
Genre : Pétard mouillé ?
Réalisateur : Jung Byung-Gil
Scénario : Jung Byung-Gil, Jung Byung-Sik
Acteurs : Kim Ok-Vin, Shin Ha-Kyun, Sung Joon, Kim Seo-Hyung, Jo Eun-Ji, Kim Yun-Woo, Lee Seung-Joo, Jung Hae-Kyun, Son Min-Ji