Durant une tempête de neige, un vagabond qui rentre chez lui, dans la ville canadienne isolée où il est né, se retrouve bloqué dans un pub. Il propose au barman de régler une vieille dette en lui racontant une histoire, les événements de la nuit se transforment en une histoire d’erreurs d’identité, de trahisons et de violence.
Avis de Cherycok :
Avec son affiche noire, arborant une scie à métaux et avec en filigrane écrit : « Vous ne croirez jamais ce qui s’est passé à Oak Room », nous étions en droit d’attendre une bobine horrifique, surtout en provenance de Cody Calahan (Vicious Fun, Let Her Out) et de sa société de production Black Fawn Films. Mais que nenni, il va s’aventurer ici sur le terrain du thriller, en nous présentant un huis clos dans un bar. Les huis clos sont un exercice périlleux tant ils peuvent vite tourner en rond, mais Calahan est un réalisateur plutôt solide qui a pondu, à minima, des films au moins sympathiques. Avec The Oak Room, à défaut de mettre en scène un film mémorable, il livre néanmoins une bobine qui vaut le coup d’œil, bien qu’assez particulière malgré tout.
The Oak Room, c’est un peu comme si on avait des histoires dans une histoire. On a un type, qui raconte à un type, une histoire qu’un autre type lui a racontée. Mais le deuxième type raconte lui aussi une histoire au premier type. On est presque ici dans un film à sketchs mais où tous les sketchs se situeraient dans des bars. On se demande où tout cela va nous amener, on sent bien que quelque chose se trame derrière tout ça. Et bien entendu, à la fin, tout prendra sens et on verra apparaitre un liant entre toutes ces histoires. Nous sommes ici dans un film très intimiste, à tout petit budget. Le réalisateur Cody Calahan et son scénariste Peter Genoway, qui adapte ici sa propre pièce de théâtre, transforment ce qui pourrait facilement devenir un montage d’histoires ennuyeux, sans vie, et lourd en dialogues, en un thriller atmosphérique, audacieux et même captivant. Oui, The Oak Room est bavard, c’est l’idée même du film, on a l’impression que ça s’étire un peu trop en longueur, surtout au début. Puis à fur et à mesure que le récit avance, on est happé et on a besoin de savoir le dénouement et où le film veut en venir. C’est là qu’on constate le pouvoir de la narration, car les dialogues sont très bien écrits, très percutants, et malgré l’abondance de paroles, ce n’est jamais ennuyeux. Parfois nous vient à l’esprit cette fameuse scène de Desperado ou Quentin Tarantino vient raconter une histoire au barman d’un bar et où tout le monde est pendu à ses lèvres. Il parait que si le conteur est bon, et que la personne qui écoute est bien réceptive, une historie banale peut devenir captivante. Il parait aussi que les bars sont les lieux où on entend les histoires les plus loufoques, l’alcool aidant souvent. Et bien ça tombe bien, c’est un huis clos dans un bar, Calahan / Genoway savent bien raconter les histoires et j’étais très réceptif.
Cody Calahan travaille toujours bien ses ambiances, c’est de nouveau le cas ici. La musique, les dialogues, les décors contribuent tous à l’atmosphère créée par le réalisateur, donnant l’impression d’être là, aux côtés des personnages, pendant une tempête de neige. Dès l’instant où le personnage de Steevie entre dans le bar, la tension commence à monter. Pas une grosse tension, mais une tension latente, diffuse, qui reste en fond. L’ambiance y est des plus inquiétantes, parfois même atmosphérique et la mise en scène arrive, malgré un lieu unique, à ne jamais donner cette sensation de redondance dans les décors, en partie grâce à un joli travail sur les éclairages. Le film s’attarde sur la psychologie des personnages qu’on finit presque par connaitre en profondeur sans même qu’on s’en rende compte. Il faut dire que le casting est très bon, avec des gueules bien choisies, au jeu très juste. Peter Outerbridge (Slevin, Saw 6) en rajoute parfois des caisses, mais RJ Mitte (la série Breaking Bad) et Ari Millen (Vicious Fun, la série The Expense) sont vraiment très bons. Bien entendu, le scénario fini par partir en cacahuètes à 1h10 de film, sans jamais verser dans le gore (alors qu’il aurait facilement pu) mais la fin est suffisamment ambigüe pour laisser le spectateur se faire sa propre idée sur ce que tout cela signifie.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ L’ambiance lourde ♥ Très bon casting ♥ De nombreux dialogues très bien écrits ♥ Le principe du film en lui-même |
⊗ Un rythme languissant ⊗ Le jeu parfois poussif de Peter Outerbridge |
Définitivement un réalisateur à suivre, Cody Calahan change de registre et propose un thriller des plus intéressants, un huis clos faisant la part belle aux joutes de dialogues. Le rythme lent pourra malgré tout en laisser certains sur le carreau. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Ari Millen, qui joue Michael, a joué le même rôle dans la pièce théâtre que dans le long métrage. Amos Crawley, qui incarne Thomas Coward, était le metteur en scène de la pièce au Fringe Festival (2013). Comme quoi, la pièce et le film restent intimement liés.
• Lors d’une séance de questions-réponses, le scénariste Peter Genoway a déclaré que la version originale du scénario, datant de 2010, portait le titre » Elk Lake « .
Titre : The Oak Room
Année : 2021
Durée : 1h30
Origine : Canada
Genre : Une histoire vaut mieux que 1000 mots
Réalisateur : Cody Calahan
Scénario : Peter Genoway
Acteurs : RJ Mitte, Peter Outerbridge, Ari Millen, Nicholas Campbell, Martin Roach, David Ferry, Amos Crawley, Avery Esteves, Coal Campbell, Adam Seybold