[Film] The Hunt, de Craig Zobel (2020)


Des inconnus se réveillent bâillonnés en pleine nature. Ils découvrent rapidement qu’ils sont les candidats d’une chasse à l’homme grandeur nature orchestrée par de riches Américains qui ne désirent qu’une seule chose : chasser et abattre comme des animaux, par snobisme ou mépris de classe, des citoyens pauvres issus d’états ruraux. Mais cette partie dégénère lorsque l’une des proies, Crystal, décide de lutter pour sa vie en tuant les chasseurs.


Avis de Cherycok :
Voici donc The Hunt de Craig Zobel (Z For Zachariah, Compliance) qui a tant fait parlé de lui ces derniers mois, un film qui, dès sa sortie a été adulé un peu partout sur la toile, récoltant bon nombre de superlatifs divers et variés. Un film qui se veut une satire de la société américaine sous couvert de chasse à l’homme façon Les Chasses du Comte Zaroff, concept moult fois utilisé au cinéma avec plus ou moins de succès mais que j’apprécie particulièrement. Et alors que j’en attendais beaucoup, sans doute trop, me voilà au final déçu par le spectacle d’1h30 que je viens de voir. Non pas que l’ensemble soit mauvais, loin de là, mais pour un film soit disant polémique, controversé, ça reste au final extrêmement gentillet et un peu trop facile. Néanmoins, certains points sauvent le film et le résultat est plutôt fun à défaut d’être réussi.

The Hunt devait sortir au départ en septembre 2019. Mais une fois de plus, des fusillades ont secoué l’Amérique et Universal a annoncé que, même s’ils soutiennent leurs réalisateurs qui font dans la satire sociale, ils préféraient sortir leur film à un meilleur moment. Le film est donc programmé pour mars 2020 au cinéma mais, une fois de plus, actualité covid-19 oblige, ce dernier est de nouveau annulé. D’autant plus que le film s’est attiré les foudres du président des States, Donald Trump himself, l’accusant d’inciter au chaos. La bonne blague. Mais Universal ne se laisse pas abattre et sort sa bobine directement en VOD, d’abord aux Etats-Unis, puis dans le reste du monde. Il va donc s’agir ici du coup désormais classique de la chasse à l’homme. Des gens de tout horizon se réveillent bâillonnés, au milieu d’un champ, et découvrent une énorme caisse dans laquelle se trouvent des armes. Ils comprennent vite qu’ils vont devoir se défendre face à un groupe d’individus qui vont se mettre à les chasser. Alors que tous se font décimer un à un, une femme va se détacher du lot, par son efficacité, par sa capacité à ne pas se faire avoir par tous les pièges qui lui sont tendus. Une femme bien décidée à mettre fin à tout cela, et à comprendre pourquoi ils ont été choisis pour faire office de cibles vivantes à des tarés armés jusqu’aux dents.
Craig Zobel n’est pas le réalisateur le plus connu du monde. Réalisateur essentiellement TV, il s’était néanmoins fait remarquer avec Z For Zachariah (2015), un post-apo plutôt bien branlé, et un intéressant Compliance (2012). Sous la houlette de Blumhouse Productions, qui est capable du meilleur comme du pire, il revient cette année avec The Hunt, une chasse à l’homme sur fond de lutte des classes, une satire sociale qui aurait pu être vraiment très réussie si son traitement avait été plus soigné. Car pour son The Hunt, Craig Zobel a enfilé ses énormes sabots.

The Hunt commence de manière vraiment très efficace. Pas le temps de tergiverser, on est immédiatement dans le bain et le massacre commence à peine au bout de cinq minutes. Ça tire dans tous les sens, ça explose de partout et le bain de sang est des plus funs avec des moments parfois très rigolos (la fosse aux piques). On nous refait le coup de Feast (2005) pour le héros –on n’en dévoilera pas plus- et les scènes funs et badass vont s’enchainer les unes après les autres. On est dans de la comédie noire gore, avec tout son lot de punchlines et de moments bien savoureux. Mais au bout d’un moment, le film va se lancer dans les explications, dans les justifications, dans la critique de la génération twitter, des conspirationnistes, de la société américaine de manière générale. Mais le film ne se donne pas les moyens d’une telle ambition. On va nous faire le coup des gentils qui en fait ne sont pas si gentils, des méchants qui en fait ne sont pas si méchants. Mais en fait, y’a-t’il vraiment des gentils et des méchants ? Où se situe la barrière ? Est-ce que les chassés ont réellement mérité un tel sort ? Est-ce que les chasseurs peuvent justifier un tel acte par une bonne intention de départ ? L’absence de développement des personnages va faire qu’on se contrefiche éperdument de leur sort, et du coup, le film a clairement moins d’impact. Plus les explications vont avancer, plus le discours va perdre en crédibilité jusqu’à la conclusion finale sans aucun impact émotionnel, après un combat plutôt fun mais bancal, façon Kiddo / Vernita Green dans Kill Bill, qui nous aura permis d’apprendre que le couteau à pain est mieux pour couper les tomates et que le gruyère est préférable en cuisine car il fond mieux.

Le problème principal de The Hunt, c’est que tous les messages qu’il essaie de faire passer, et surtout la manière dont il essaie de les faire passer, il le fait sans aucune finesse. Il n’y a qu’à voir la métaphore du petit cochon (celui de la jaquette) pour s’en persuader. Parfois, les choses passent sans souci, car on reste dans une comédie et que les choses sont parfois volontairement exagérées pour l’amour de la blague. Mais d’autres fois, on tombe dans la lourdeur. Même chose pour le côté subversif que le film essaie de se donner, de par son sujet, mais également avec ses effets gores parfois outranciers. Ça a déjà été fait moult fois. Production Blumhouse oblige, on se dit que le film est destiné à un public de jeunes adultes qui n’ont peut-être pas vu beaucoup de films de chasse à l’homme. Sans doute que le film leur plaira d’ailleurs. Mais pour un habitué du genre, force est de constater qu’il n’y a clairement rien de nouveau sous le soleil.
C’est dommage car la réalisation de Craig Zobel, sans avoir rien d’exceptionnel, s’en sort plutôt bien. La mise en scène est carrée, et se permet même quelques jolis effets. Même chose en termes de casting. L’actrice principale Betty Gilpin (Stuber, Isn’t It Romantic) est excellente et Ethan Suplee (My Name is Earl) très fun. Dommage que Hilary Swank ne soit malheureusement pas plus présente. Le film est plein de bonnes idées mais ne les exploite pas toujours très bien. En fait, si la deuxième partie du film était aussi bonne que la première, il y a fort à parier que The Hunt aurait été assez mémorable. Mais en l’état actuel des choses, il ne révolutionne absolument rien et ne réinvente le genre à aucun moment.

LES PLUS LES MOINS
♥ Betty Gilpin, impeccable
♥ Les scènes gores
♥ Bien rythmé
⊗ Aucune finesse
⊗ On se fout des personnages
⊗ Bancal
Après une excellente première partie, The Hunt s’enlise dans une satire sociale qu’il ne maitrise à aucun moment. Il en résulte une série B sympathique, fun et bourrine, mais au final un peu décevante.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Le film serait assez similaire sur bien des points au film brésilien Bacurau sorti en 2019, qui avait gagné le prix du jury au Festival de Cannes 2019 et qui était également nominé pour la Palme d’Or.
• A cause du Covid-19, Universal a annoncé que le film serait disponible en VOD uniquement pendant 48h pour 19.99$ aux Etats Unis. Ça a suffi pour que le film soit piraté et fasse le tour de tous les sites de téléchargement illégal.


Titre : The Hunt
Année : 2020
Durée : 1h30
Origine : U.S.A
Genre : Que le carnage commence !
Réalisateur : Craig Zobel
Scénario : Nick Cuse, Damon Lindelof

Acteurs : Betty Gilpin, Hilary Swank, Ike Barinholtz, Wayne Duvall, Ethan Suplee, Emma Roberts, Christopher Berry, Sturgill Simpson, Kate Nowlin

 The Hunt (2020) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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