[Film] The Goldfinger, de Felix Chong


Dans les années 70, Henry Ching un ingénieur ruiné, débarque à Hong Kong dans l’espoir de se refaire. Un peu par hasard, il se retrouve au milieu d’une escroquerie immobilière qui va lui permettre de gagner une somme d’argent assez importante. C’est le début d’une ascension fulgurante dans les domaines de l’immobilier et de la finance dans lesquels il va bâtir un empire mais très vite il va trouver sur sa route l’inspecteur Lau Kai-Yuen de l’ICAC. De procès en procès, ce dernier n’aura de cesse d’essayer de l’arrêter pendant plus de 10 ans.


Avis de Nesserjones :
Sur le papier, The Goldfinger était bien évidemment un projet alléchant, reformant le duo magique Tony Leung/Andy Lau pour l’anniversaire de la sortie d’Infernal Affairs en nous plongeant dans un nouveau duel psychologique très inspiré du Loup de Wall Street de Martin Scorsese. Toutes les étoiles semblaient donc alignées pour qu’on ait droit à un nouveau gros polar : un réalisateur chevronné qui depuis son travail comme scénariste sur Infernal Affairs a enchainé les grosses productions comme la trilogie Overhead, le wu xia The Lost Bladesman avec Donnie Yen ou le thriller Project Gutenberg avec Chow Yun Fat, un casting de luxe, un budget conséquent et donc un scénario inspiré d’un film de Martin Scorsese qui avait lui-même gagné son premier Oscar en remakant Infernal Affairs. Une façon presque évidente de boucler la boucle.

The Goldfinger est un film ambitieux. Dès les premières minutes, cette ambition transpire à l’écran avec un énorme travail de reconstitution pour recréer le Hong Kong des années 70, pas seulement des petites ruelles mais des grands boulevards entiers ont été recréés même si on ne les voit que quelques secondes à l’écran. Il y a cette photographie très particulière aussi, avec une image presque dorée pour coller au thème de l’argent qui donne une vraie touche au film. The Goldfinger a décidément des allures de gros blockbuster Hollywoodien. Une bonne partie des acteurs les plus chevronnés de Hong Kong défilent à l’écran pour prêter main forte à Tony Leung et Andy Lau : Simon Yam, Alex Fong, Philip Keung et même Charlene Choi, aujourd’hui devenue une vraie femme, dégage une sacrée présence à l’écran. The Goldfinger est aussi un film qui a l’ambition de parcourir 20 ans de tout un pan de l’histoire de Hong Kong, des débuts houleux de l’ICAC (la brigade anti-corruption), qui dû se heurter à un rejet massif de tout le corps policier, aux années de spéculations immobilières sauvages où beaucoup de gens sans scrupules se sont enrichis. Oui tout était réuni pour faire de The Goldfinger un grand film mais souvent l’ambition et le résultat final sont deux choses opposées et c’est le cas ici. Qu’est-ce qui cloche donc dans le film de Felix Chong ? Déjà, The Goldfinger est un film bavard. Trop bavard. En soi, ce n’est pas un défaut, les films de Tarantino aussi sont très bavard et c’est pour ça qu’on les aime mais là on a énormément de dialogues très techniques que les non-initiés à la finance comme moi vont avoir du mal à comprendre. En effet, je n’ai toujours pas compris en quoi acheter des biens immobiliers pas chers pour les revendre beaucoup plus chers est un délit… Nike aussi nous vend des chaussures à 150 euros qui ne leur reviennent même pas à 10 euros. Enfin, ce n’est pas le pire mais ces longs dialogues pas toujours très clairs n’aident pas du tout à rentrer dans le film. Le pire en fait, c’est tout simplement que le film souffre énormément de la comparaison avec son modèle Le Loup de Wall Street qui, même en étant loin d’être le meilleur Scorsese, reste un film complètement fou, n’hésitant pas à nous montrer le niveau de dépravation et d’indécence des voyous de la finance avec leurs soirées où se mélangent allègrement cocaïne et prostitution.

Alors, est-ce qu’il faut nécessairement montrer de la drogue et du sexe explicitement pour faire un bon film sur ces odieux voyous de la finance ? Pas nécessairement, mais ici tout est trop sage, trop lisse, trop propre, alors qu’on parle quand même d’un type de la pire espèce, qui au fur et à mesure du film va se révéler bien plus qu’un simple homme d’affaire malhonnête mais un véritable mafieux sans cœur. Mais la moitié du temps, on a surtout droit à de gros plans de Tony Leung dans ses beaux costumes arborant un sourire narquois et prétentieux lors de ses différents procès. Felix Chong semble complètement paralysé par la peur de la censure chinoise. Une peur complètement justifiée d’ailleurs car on sait que, sans l’aval de la fameuse China Film Administration, un film HK ne peut être distribué sur le territoire Chinois. Soi Cheang a par exemple dû attendre 3 ans cette fameuse autorisation pour Limbo avant de tout bonnement jeter l’éponge et ce qui a condamné le film à un échec commercial. Même le duel psychologique entre Tony Leung et Andy Lau manque d’intensité, on croirait presque un tournoi sportif très fairplay. Même lorsque Tony Leung, excédé par la persévérance de Andy Lau, décidera d’utiliser des méthodes d’intimidation plus radicales, le duel ne montera jamais d’un cran, Andy Lau restant toujours dans les clous de la loi, toujours très droit dans ses bottes et jamais on ne sent vraiment monter la haine entre eux. Alors que par exemple dans Infernal Affairs, dès le début du film la haine entre Eric Tsang et Anthony Wong explose à l’écran dans le face-à-face dans la salle d’interrogatoire où Eric Tsang annonce à Wong : « T’as déjà vu quelqu’un serrer la main à un mort ? ». D’ailleurs, le personnage de Andy Lau est tellement lisse et sans relief qu’il se fait bouffer tout cru à l’écran par Tony Leung. Bref, The Goldfinger est un film qui manque de tout, de suspense, de tension, d’audace et de rythme, très loin de ses promesses.

LES PLUS LES MOINS
♥ La prestation de Tony Leung Chiu-Wai
♥ L’esthétique générale du film
♥ Le travail de reconstitution
⊗ Andy Lau, très en dessous de Tony Leung
⊗ Pas de tension
⊗ Ennuyeux
⊗ Trop lisse
Malgré une belle esthétique et une ambition formelle certaine, The Goldfinger est un film ennuyeux, trop lisse, trop propre, trop mou qui n’arrive jamais à recréer le suspense et la tension d’Infernal Affairs, et trop en dessous de son modèle Le Loup de Wall Street.

LE SAVIEZ VOUS ?
• The Golfinger est inspiré de l’ascension et la chute du magnat de l’immobilier George Tan et de son groupe Carrian..



Titre : The Goldfinger / 金手指
Année : 2023
Durée : 2h06
Origine : Thaïlande
Genre : Thriller
Réalisateur : Felix Chong
Scénario : Felix Chong

Acteurs : Andy Lau, Tony Leung Chiu-Wai, Simon Yam, Alex Fong, Charlene Choi, Chin Ka-Lok, Philip Keung, Carlos Chan, Michael Ning, Tai Bo, Anita Yuen, Catherine Chow

The Goldfinger (2023) on IMDb


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Auteur : Nasserjones

Fan névrosé de cinéma HK, élevé aux girls with guns et heroic bloodsheed, j'essaye depuis quelques années de me soigner comme je peux en m'ouvrant un peu plus à des films plus intimistes et différents. Des Philippines au Kazakhstan, de la Corée à l'Indonésie, je poursuis tant bien que mal mon auto-thérapie.
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