Une organisation vole des statues sacrées du Bouddha un peu partout à Kyoto. Beniko, jeune lycéenne, est entraînée dans ce complot cauchemardesque lorsque ses parents, gardiens d’une des statues, se font tuer. Elle entreprend alors un voyage fantastique pour assouvir sa vengeance.
Avis de John Roch :
Ujicha est un réalisateur à part dans le cinéma Japonais, voire mondial. Ses métrages sont créés selon le procédé de la Gekimation, hériter du Kamishibai, le théâtre de papier Japonais qui consiste à raconter des histoires en faisant défiler des illustrations. Ujicha va plus loin car il met en scène des personnages découpés dans des décors, en filmant le tout, une méthode entre le stop motion et l’animation, qui donne un cachet DIY, d’autant plus que le réalisateur œuvre seul. Après deux courts métrages, The Retnepac et Space Yokai War, il s’attaque au long avec The Burning Buddha Man, qui aura mis trois ans avant de voir le jour. Il est judicieux de commencer par regarder un court d’Ujicha afin de prendre la température, car bien qu’amateurs, The Retnepac et Space Yokai War sont des métrages qui annoncent le style et l’univers pour le moins particulier du réalisateur, et si ça ne passe pas sur un quart d’heure, n’espérez pas passer un bon moment devant ce film d’1h20, mais les courts ne rendent pas justice au long, et bien que j’ai eu du mal avec les premiers, ce métrage est bien passé. Car Ujicha est du genre à retourner le cerveau, d’où la présence de deux notes, pour un film dont il est compliqué de parler. Mais ce qui est sur, c’est que cette œuvre va créer deux camps.
Beniko, une lycéenne, retrouve ses parents assassinés dans leur temple. Elle est recueillie par Enju, un ami de la famille qui lui révèle que les coupables sont un groupe de voleurs de statues de Buddha qui se fait appeler SEADDATTHA. Mais elle découvre que c’est Enju qui est à l’origine du vol des statues, qui fusionne avec les Buddha pour gagner en puissance. Beniko va alors s’allier avec SEADDATHA, en réalité des expériences ratées d’Enju, pour trouver l’illumination et se venger. The Burning Buddha Man peut être résumé comme un film qui traite de la recherche du pouvoir dans la religion, la spiritualité, et la fusion entre l’homme et des statues de Buddha, ce dernier point étant étonnant. Tout autant que le character design des personnages dessinés par Ujicha, sexuellement et physiquement difformes, auxquels le réalisateur fait vomir des substances étranges, les fait mourir dans des débordements gores, ce qui confère à The Burning Buddha Man une atmosphère particulière, plutôt glauque, sous influence des mangakas Junji Ito et Gao Mataro, de H.R Giger, mais aussi de Shynia Tsukamoto et David Cronenberg pour le coté body horror et la fusion des chairs. Ce qui n’empêche pas au métrage d’être parfois délirant : un groupe d’hommes-Buddha qui s’assemblent pour donner ce qui ressemble à un robot géant issu d’un Sentaï, un passage vers un autre monde qui se fait via ce qui ressemble à un anus, ou ces câbles qui sortent de ce qui semble être anatomiquement parlant placé au niveau du service trois pièces qui découpent en deux ceux qui se trouvent sur leur chemin. Et bien que l’ensemble est pour le moins statique, le film est bourré d’action, ça tranche, ça se bastonne, ça use de tentacules pour enlacer son adversaire, du pur délire Nippon.
Depuis ses courts, Ujicha a affiné son style, les dessins de ses décors et de ses personnages ont gagné en finesse et en détails, et le réalisateur fait tout pour donner un cachet cinématographique à son œuvre malgré les limitations qu’impose naturellement la gekimation, mais il faut savoir s’affranchir de cette méthode d’animation, déroutante au départ, car la sensation de ne voir qu’une succession de vignettes peut rapidement peser et, de ce fait, le temps peut paraître long. Et c’est là tout le paradoxe de The Burning Buddha Man, rythmé mais avec une sensation de lenteur, rempli d’action sans pour autant la montrer, ou du moins l’animer, scénario foutraque mais cohérent, glauque mais drôle. C’est un métrage qui va diviser. Ceux qui recherchent une expérience autre et se laissent porter par le style visuel unique du réalisateur apprécieront ce film, les autres risquent de rester de marbre et de s’ennuyer ferme.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Une expérience à part ♥ Une proposition d’ animation autre… ♥ Un scénario barré ♥ Un film rythmé pour les uns… |
⊗ … mais qui ne plaira pas à tout le monde ⊗ … long et plat pour les autres |
Pour ceux qui adhèrent : Pour les autres : |
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De par son style unique, Burning Buddha Man est une œuvre qui va clairement diviser. Il serait pourtant dommage de passer à coté de cette expérience à la fois glauque et délirante, aussi figée que rythmée, aussi incroyable que détestable. |
The Burning Buddha Man est sorti chez Spectrum Films en Blu-ray, accompagné du second long métrage de Ujicha, Violence Voyager, au prix de 25€. Il est disponible à l’achat ici : Spectrumfilms.fr |
Titre : The Burning Buddha Man / 燃える仏像人間
Année : 2013
Durée : 1h20
Origine : Japon
Genre : Expérimental
Réalisateur : Ujicha
Scénario : Ujicha, Reo Anzai et Ken Nakazawa
Acteurs : Nao Hanai, Chisako Hara, Moeka Haruhi, Shunsuke Hirai, Mitsuko Hoshi, Yuka Iguchi, Reijirô Katô