[Film] Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins, de William Friedkin (1978)


Au début des années 1950, Tony Pino est un escroc qui vit de petites arnaques dans les rues de Boston. Un jour, il observe que le système de sécurité de la société de transports Brink’s s’avère inefficace. Tony fait donc appel à quelques camarades malfrats et décide de monter le casse du siècle…


Avis de Cherycok :
Vous saviez que William Friedkin, le réalisateur de L’Exorciste (1973), French Connection (1971), Le Convoi de la Peur (1977), Traqué (2003) et Killer Joe (2011), avait réalisé un clip de Johnny Hallyday (la chanson « Ce que je sais ») en 1998 ? Eh bien moi non plus. Je l’ai découvert après avoir regardé sur IMDB la filmographie du monsieur. Voilà, c’était l’information inutile du jour. Mais nous ne sommes pas là pour parler de notre Johnny national mais de Têtes Vides Cherchent Coffres Plein, The Brink’s Job en VO, petite comédie policière méconnue qu’il a mise en boite en 1978, comme s’il avait besoin d’un peu se détendre au sortir du tournage éprouvant du Convoi de la Peur avec quelque chose de bien plus léger, avant de se lancer dans à nouveau quelque chose de plus lourd avec son film qui suivra, Cruising, avec Al Pacino. Friedkin a beau trouver que Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins n’est pas un film qui marque, qu’il n’a laissé aucune empreinte malgré des moments agréables, et qu’il est au final loin de ce qu’il avait imaginé, c’est malgré tout un très chouette divertissement qui, sur le moment, fait du bien par où il passe.

En 1950, un braquage fait grand bruit aux États-Unis, un évènement parfois appelé le braquage du siècle là-bas. Un groupe de malfrats braque la célèbre compagnie de transport de fonds Brink’s, volant pour l’occasion la modique somme de 2,7 millions de dollars de l’époque. Bien que certains des braqueurs aient été arrêtés, 50000$ seulement ont été retrouvés sur la somme totale. Ça a inspiré des romans, comme Big Stickup at Brink’s de Noel Behn en 1977, et ça a bien entendu inspiré le cinéma. Il y a d’abord eu La Police Était au rendez-vous (1955), Hold-Up au Quart de Seconde (1961) et, pour la télévision, Opération Brinks (1976). A cette liste s’ajoute donc le film de William Friedkin en 1978 qui en est une réécriture fictive, bien que quelques-uns des vrais braqueurs aient travaillé comme consultants sur le film, que certains journalistes/photographes qui ont couvert l’évènement à l’époque aient été utilisés comme figurants, et qu’une partie du film ait été tournée dans le garage où le véritable braquage a eu lieu, garage qui depuis n’est plus qu’un parking ordinaire plus du tout utilisé par la Brink’s. Dans Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins, on va être dans un mélange assez subtil de comédie, de drame, et de tension proche du thriller, bien que ce qui prédomine soit la comédie. Cette comédie est, malgré quelques moments qui tombent dans le slapstick, plus dans la situation presque ridicule de ces voleurs un peu bras-cassés et dans leur façon d’aborder, puis de faire, ce braquage. Les personnages sont un des points forts du film. Ce sont ici des gens au demeurant lambdas, qui ne sont pas à fond dans la criminalité, bien que le vol semble être une deuxième nature pour certains. Ils ne sont pas romancés pour en faire des icônes. Juste une brochette de « monsieur tout le monde » qui ont choisi comme métier l’ouverture de coffres forts parce que, malgré quelques maladresses, ils sont bons là-dedans. En dehors de ça, ils mènent une vie ordinaire. L’un d’eux travaille dans un restaurant, un autre n’est même pas dans le besoin. Ils ne se cachent même pas et s’ils doivent faire des petits séjours en prison, ils les font.

L’ambiance et le cadre de la classe ouvrière des années 50 sont parfaitement retranscrits, avec ces immeubles en brique, ces rues en pierres, ces vieilles voitures, et ce n’est pas un hasard si c’est le vieux logo Universal des années 40 qui est utilisé en guise d’introduction lorsqu’on lance le film. Tout est fait pour que cela fasse d’époque, et ça fonctionne. Le casting est vraiment excellent, en particulier Peter Falk qui trouve possiblement ici son meilleur rôle au cinéma. Alors qu’on aurait pu craindre qu’on l’associe forcément à L’Inspecteur Colombo, il arrive en à peine quelques minutes à nous faire croire à ce petit criminel très ordinaire sans complication, au bagout de premier ordre, et les échanges qu’il a, aussi bien avec sa femme qu’avec ses comparses de braquage, sont assez succulents. Autre point fort de Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins, c’est sa légèreté ambiante. Bien que le film sache faire monter la tension, comme lors de la scène de braquage, où lors des interrogatoires musclés en prison, le film se suit avec un sourire aux lèvres tout du long car on prend un réel plaisir à suivre cette équipe de petits malfrats, la façon dont ils vont préparer leur gros coup, et même leur vie de tous les jours. C’est peut-être aussi cette légèreté qui n’a pas joué en faveur de Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins et qui fait que, aujourd’hui, et même dans les décennies précédentes, peu ou pas de monde ne se souvient de lui alors qu’à sa tête et dans le casting, on retrouve tout un tas de noms assez prestigieux. L’ensemble est bien fait, que ce soit au niveau des personnages, des dialogues, de la mise en scène (qui sait s’effacer pour laisser vivre les péripéties), de la musique, … mais au final rien ne retient réellement l’attention ou va venir s’imprimer dans votre cerveau à l’exception de Peter Falk. Si vous cherchez une masterpiece, ce n’est pas ici que vous la trouverez. Mais si vous cherchez à passer une bonne soirée, quitte à l’oublier aussi rapidement, alors Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins fait parfaitement son office.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le casting
♥ Les personnages
♥ La reconstitution
♥ La légèreté ambiante
⊗ Un peu long à démarrer
⊗ Rien de marquant

Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins est un William Friedkin mineur. Pourtant, pour peu que vous cherchiez un petit divertissement léger qui fait du bien par où il passe, il offre un spectacle assez réjouissant et réellement sympathique.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Pendant la production, un habitant de Boston a été payé pour enlever le climatiseur de sa fenêtre afin de pouvoir filmer dans cette rue particulière pour un plan. Le lendemain, lorsqu’ils sont arrivés pour poursuivre le tournage, toutes les fenêtres de la rue étaient équipées d’un climatiseur.

• En août 1978, quinze bobines non montées du film ont été volées sous la menace d’une arme dans un studio de Boston, dans le cadre d’un hold-up cinématographique bizarre et ironique par rapport à l’intrigue du film. Cependant, les films volés étaient principalement des prises de vues et des rushes qui pouvaient être facilement remplacés. Les copies positives des négatifs du film étaient en fait conservées par Technicolor à New York. Les voleurs ont demandé une rançon de 600 000 dollars. L’argent n’a jamais été versé et le film a été achevé sans les séquences manquantes et sans retard préjudiciable. Lorsque les voleurs ont appelé pour réclamer leur rançon, le réalisateur William Friedkin leur a dit : « Prenez un projecteur et profitez du film. Il est à vous ! ».



Titre : Têtes Vides Cherchent Coffres Pleins / The Brink’s Job
Année : 1978
Durée : 1h44
Origine : U.S.A
Genre : Comédie policière
Réalisateur : William Friedkin
Scénario : Walon Green, Noel Behn

Acteurs : Peter Falk, Peter Boyle, Allen Garfield, Warren Oates, Gena Rowlands, Paul Sorvino, Sheldon Leonard, Gerard Murphy, Kevin O’Connor, Claudia Pelusa

The Brink's Job (1978) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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