[Film] Spirale: L’ Héritage de Saw, de Darren Lynn Bousman (2021)

Travaillant dans l’ombre de son père, une légende locale de la police, le lieutenant Ezekiel «Zeke» Banks et son nouveau partenaire enquêtent sur une série de meurtres macabres dont le mode opératoire rappelle étrangement celui d’un tueur en série qui sévissait jadis dans la ville. Pris au piège sans le savoir, Zeke se retrouve au centre d’un stratagème terrifiant dont le tueur tire les ficelles.


Avis de John Roch :

Tourné pour un peu plus d’un million de dollars en 18 jours, Saw est devenu en son temps un phénomène, le film dont tout le monde parlait et que tout le monde devait voir. D’habitude ce genre de bouche a oreille dithyrambique souvent incompréhensible amène à des déceptions énormes ( le Projet Blair Witch, Paranormal Activity et j’ en passe), mais pas dans le cas de Saw. Avec son script malin, son atmosphère, et ses pièges, James Wan braque le box office et se propulse à Hollywood. Box office justement, comme tout gros succès, la poule aux œufs d’ or doit continuer à pondre, et ça même si un film se suffit à lui même. Pourtant Saw 2, même si il a ses défauts, reste un bonne suite et va initier un cahier des charges qui va sceller le destin de la saga: un groupe de personnes enfermées dans un lieu remplis de pièges, du gore, la philosophie de comptoir de Jigsaw, un twist capillotracté et un script qui fait écho aux films précédents. Saw 3 ( dont on se souviendra de son interdiction au moins de 18 ans tombée le jour même de sa sortie) aurait pu boucler la boucle et rester une trilogie mais non, Jigsaw, de son identité civile John Kramer, a eu la gentillesse d’ anticiper les suites de la saga ou ses disciples reprennent le flambeaux, tout en apparaissant dans des flashbacks qui oublie de cacher la vieillesse de plus en plus apparente de Tobin Bell. Et il faut s’ accrocher, car entre un quatrième incompréhensible ( qui se passe pendant le 3, mais commence après, pour finir avant), un cinquième tellement à court d’ idée et paresseux que même le gore y est absent, un sixième qui montre que plus la saga avance, plus les flashbacks vont loin dans le passé au point de rendre l’ensemble complètement incohérent, un septième qui est dans la même veine mais par moment jouissif ( la scène de la voiture piégée mérite à elle seule de subir le reste) et qui a réussi à faire taire la saga pendant sept ans. Mais c’ était à prévoir, il faut bien que les grandes saga qui aient rapportées autant renaissent de leurs cendres. La franchise revient avec Jigsaw, qui fait office de suite, reboot et préquel. Le cahier des charges reste le même mais le métrage reste plaisant grâce à la présence des frères Spierig derrière la caméra, qui livrent un produit bien plus regardable que les précédents trips épileptiques sous photographie oscillant entre le vert citron et le jaune pipi.

Nous arrivons à ce nouvel opus, Spirale: l’ héritage de Saw, réinvention de la saga qui n’est pas une suite à proprement parlé mais un spin off comme le laisse entendre son titre original: From the book of Saw. Mais à qui doit on cette idée de génie? À Chris Rock, grand fan de la saga qui a écrit un premier jet qui a plu à Lionsgate, qui met la machine en marche. Darren Lynn Bousman revient derrière la caméra, le script est repris par Josh Stolberg et Pete Goldfinger, et Chris Rock en est le producteur exécutif et se réserve le rôle principal… et c’ est une mauvaise idée. Car ce qui gêne en premier lieu c’est Chris Rock, qui n’est tout simplement pas crédible dans son rôle de flic sur la corde raide. Au mieux il joue exactement comme il a joué dans l’ arme fatale 4 ( oui c’est ça le mieux, c’est dire !) , au pire il tente de jouer un personnage dark au bout de sa vie en fronçant les sourcils et en prenant un air constipé qui prouve qu’ il devrait se contenter de rester au stand up. Mais la saga nous a habitué à se genre de miscast, rappelez vous de Costas Mandylor, qui n’en avait absolument rien à foutre de son rôle dans les opus précédents. La structure du film abandonne celle usée jusqu’à la moelle des sept précédents films de la saga, à savoir un groupe de personnes enfermées dans un endroit remplie de pièges couplé à des scènes en extérieur centrée sur ceux qui sont censés les retrouver et mettre la main sur Jigsaw et plus tard sur ses disciples, pour se trouver plus proche du premier opus. On retrouve donc des cadavres un peu partout victimes de pièges qui demande un sacrifice pour y échapper, petite particularité: les victimes sont des policiers qui ont trempés dans des histoires de corruptions. A Zeke Banks ( Chris Rock, qui s’ est donc cru sur le tournage de Brooklyn Nine-Nine), flic mal vu au sein de son unité depuis qu’ il a dénoncer un ripoux 12 ans auparavant, de retrouver ce copycat de John Kramer, ce dernier et ses disciples n’ayant plus sévis depuis des années.

Même si la saga est débarrassée de l’ ombre de Jigsaw, il est difficile d’ imaginer comment celle-ci pourrait se renouveler tant elle respecte un cahier des charges qui n’ a jamais évolué d’ un iota, à part s’ en affranchir. La prise de risque a surement du être considérée comme trop importante, car pour un supposé renouveau, Spirale fait fort, puisqu’ il n’ est qu’un ajout de plus à une boucle qui tourne depuis trop longtemps. Car passé un discours dans l’ air du temps, à savoir les corruptions et violences policières qui reviennent sans cesse à la une des news aux USA, de surcroît dénoncé par un Afro-américain, Spirale reste un spin off de Saw, et rien ne ressemble plus à Saw qu’ un Saw. On retrouve donc une structure narrative sans ambition et répétitive ( personne kidnappée, piège, enquête, flashback personne kidnappée de la même manière, piège…), un scénario qui se veut comme d’habitude malin mais échoue lamentablement avec ses flashbacks qui tendent vers un suspect tellement insistant que l’ on devine bien que ce n’est pas lui le tueur, quand à la réelle identité de celui-ci, vous l’ aurez trouvé bien avant un twist moisis qui est comme toujours tiré par les cheveux après un claquage au sol, bâclé tout comme le final rushé qui donne le sentiment que les scénaristes ne savaient pas comment conclure l’ histoire. Techniquement, le premier quart d’heure de Spirale fait peur, mise en scène épileptique, effets clipesques, c’est un vrai retour aux sources qui est proposé ici, à la différence prêt que le filtre vert/jaune pipi cher à Bousmann ne recouvre pas l’intégralité du métrage. Pourtant le réalisateur soigne sa mise en scène dans les moments calmes mais lorsque ça bouge, ça devient vraiment brouillon, et au coté des effets sus-mentionnés il faut subir des scènes filmées caméra à l’ épaule par un membre de l’ équipe qui visiblement ne buvait pas que de l’ eau sur le plateau.

Reste l’ ultime arme de la saga pour ne pas laisser le spectateur se barrer de la salle: les pièges. Bien qu’il faut reconnaître qu’ils sont sympa, et que l’on se rapproche plus du premier opus que des mécanismes irréalistes des sequels ( il faut néanmoins un triple diplôme d’ ingénieur et 18 mois de préparation pour les réaliser à la maison), on y perd en gore, ce qui en fait le film le plus soft depuis l’ épisode 5. On peut également se poser la question de la légitimité de l’ emploi des pièges, puisque ceux-ci laisse aucune chance aux victimes ( la faible chance laissée font qu’ ils sont d’ une certaine manière truqués), les rendant inutile si l’on se réfère à leur utilité dans la saga, à savoir laisser le choix de se racheter aux yeux de Jigsaw, ce qui n’est pas ici le cas puisqu’ il s’agit d’ une simple histoire de vengeance. Aux spectateurs toujours présents, Spirale leurs donne quelques coups de coude en faisant référence à des situations ramenant directement à Saw premier du nom, balance quelques notes du célèbre thème de la saga entre deux morceau de R’nB et de Hip Hop, et fait dire à Samuel L. Jackson ( par ailleurs inutile et peu motivé) une réplique qui lui était destiné mais ça ne suffit pas, et ce renouveau qui n’en est pas un a déjà une suite annoncée dans laquelle on aura aucune confiance, à moins de changer de réalisateur, de scénaristes, voire même de franchise tout court. A un moment, le citron ne donne plus de jus, faut savoir arrêter de le presser.

LES PLUS LES MOINS
♥ Mise en scène correcte dans les moments calmes…
♥ Les pièges sympa…
♥ Le coté social avec la dénonciation des abus et corruptions policières
⊗ … mais qui s’emballe dès que ça bouge
⊗ … mais peu nombreux, et qui perdent en effets chocs
⊗ Chris Rock, jamais crédible
⊗ Un twist prévisible
⊗ Un scénario qui ne surprend pas
⊗ Une fin rushée
⊗ Un nouvel opus inutile
Bien que le mystère autour de ce nouvel opus ait fait monter la sauce, les fans de la saga eux même risquent d’ être déçus. Retour raté de la franchise, Spirale: l’ héritage de Saw est un film vain, qui n’ a rien d’ un renouveau et peine à justifier son existence.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Dans une interview, Darren Lynn Bousman a déclaré: «Ce n’est pas parce que Spirale existe qu’il n’y aura jamais de Saw IX. […] Vous n’avez pas du tout fini de voir Tobin Bell. […] Ce que je pense qui se produira […] vous verrez Spirale 2, puis vous verrez Saw IX. Et puis vous verrez Spirale 3, vous verrez Saw X. Vous pourriez voir une série télévisée. Je pense donc que vous verrez la MarvelVerse de la franchise Saw…». Autant dire qu’ on a pas fini avec la saga.
• C’ est la quatrième fois que Darren Lynn Bousman réalise un film de la franchise.
• Une scène contenant un piège a été coupé pour que le film puisse être Rated R.


Titre : Spirale: l’ héritage de Saw / Spiral: from the books of Saw
Année : 2021
Durée : 1h33
Origine : U.S.A
Genre : Tourne en boucle
Réalisateur : Darren Lynn Bousman
Scénario : Josh Stolberg et Pete Goldfinger

Acteurs : Chris Rock, Samuel L. Jackson, Max Minghella, Marisol Nichols, Dan Petronijevic, Richard Zeppieri, Patrick McManus, Ali Johnson

 Spirale: l'héritage de Saw(2021) on IMDb


 

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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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