[Film] Shocker, de Wes Craven (1989)

Dans la banlieue de Los Angeles, des crimes sanglants sont commis par un tueur en série, Horace Pinker. Les dernières victimes du meurtrier sont la femme, la fille et le fils de l’inspecteur Don Parker, chargé de l’affaire. Son fils adoptif, Jonathan, a eu un rêve prémonitoire du drame. Grâce aux rêves de l’adolescent, dont la petite amie sera elle aussi l’une des victimes de Pinker, le policier réussit à arrêter le tueur en série. Condamné à la chaise électrique, Pinker attend sans angoisse l’exécution de sa peine. En effet, il sait pouvoir résister à une charge de 200 000 volts. Il parvient à s’enfuir en se dématérialisant. Le tueur est également capable de prendre possession du corps d’innocents pour les tuer. Pinker va alors traquer Jonathan.


Avis de John Roch :
Alors que le carton des Griffes de la nuit aurait dû permettre à sa carrière de s’envoler, c’est tout le contraire qui se passe pour Wes Craven. Ses deux films suivants, L’Amie Mortelle et L’Emprise Des Ténèbres sont de gros bides, justifié pour le premier mais incompréhensible pour le second, au box-office, pendant que la New Line elle s’enrichit toujours plus avec Freddy, boogeyman déjà à l’époque élevé au statut d’icône de la pop culture. Une situation qui mine de rien est teintée d’ironie, puisque si la créature fait vendre, ce n’est pas le cas de son créateur, qui trouve refuge chez Alive Films, boite indépendante chez qui John Carpenter a tourné Prince des Ténèbres et Invasion Los Angeles. Avec Shocker, Craven tente de réitérer l’exploit accompli 5 ans plus tôt en créant un nouveau boogeyman. En la personne d’Horace Pinker. D’abord envisagé comme une série télé, ce sera finalement sous la forme d’un long métrage que Craven donne vie à sa nouvelle création sensée être le début d’une franchise qui sera tuée dans l’œuf pour cause de nouveau bide au box-office. Nouveau coup dur pour celui qui a été pourtant estampillé (un peu trop vite si l’on se plonge dans sa filmographie qui il faut l’avouer n’est au final pas si folle que ça) « maitre de l’horreur » qui sera abonné aux échecs critiques et commerciaux pendant une bonne partie de sa carrière. Sans doute frustré par le succès de la saga Freddy, Wes Craven ne va finalement pas chercher loin pour créer Horace Pinker tant celui-ci ressemble à Fred Krueger, tout autant que Shocker ressemble aux Griffes de la nuit.

On y retrouve une introduction similaire, le personnage principal a un père flic, Horace Pinker ne manque pas de punchline et a toujours le mot pour rire, même utilisation du cadre onirique, au sens propre mais aussi figuré via la télévision, dont il faut extirper le boogeyman afin de le détruire… en ce sens Shocker manque d’originalité et aurait très bien pu être un opus de la saga Freddy mais passées ces similitudes, Craven réussit tout de même à faire exister sa créature, et son film par la même occasion, qui s’avère être fourni à en partir dans tous les sens, sans doute dû à un script développé à la base pour la télé duquel les idées ont été condensées en une durée déjà assez raisonnable d’1h50. Le film se divise en trois parties distinctes qui développent le scénario tout en proposant successivement son lot d’idées qui font progressivement basculer le métrage de slasher onirique dans sa première partie à un délire quasi-cartoonesque dans sa dernière. Car à y regarder de plus près, Shocker n’est pas un film sérieux, dont le coté horrifique est désamorcé d’entrée de jeu par l’utilisation d’images d’archives de guerre, manifestation et autres émeutes qui rappellent que la violence bien réelle diffusée sur les chaines d’info va au-delà de celle fictive tournée sur pellicule. En ce sens, Shocker en devient une petite charge envers les médias toujours là pour le sensationnel quitte à en diffuser des images choquantes tout en pointant du doigt celles des films d’horreur dès lors que l’un d’entre eux a choqué la morale bien-pensante ou se retrouve cité dans des affaires tragiques. Mais plus qu’une sorte de critique de la télévision, les médias donc mais aussi d’une société Américaine aliénée par le petit écran, Shocker tient plus du ride fun et généreux, mais pas dénué de défaut. Fun et généreux car il se passe toujours quelque chose dans Shocker, Horace Pinker, quoique personnage classique dans sa première partie, va rapidement hériter de pouvoirs qui lui permettent de sauter de corps en corps en milieu de métrage avant de se retrouver maitre de la transmission hertzienne et d’apparaitre sur toutes les chaines TV dans le dernier tiers.

Le scénario de Shocker s’apparente une succession de couches qui prennent le pas sur les autres au fur et à mesure que celui-ci progresse, quitte à parfois frôler l’indigestion et le ridicule, notamment dans le développement de ses personnages. Si Horace Pinker est un boogeyman cool, interprété par un Mitch Pileggi (Skinner, le boss de Mulder et Scully dans X-Files) qui s’en donne à cœur joie dans son rôle de psychopathe réparateur de télé adepte du vaudou, le film se casse les dents sur les autres personnages. Pas tant sur le héros du métrage Jonathan (campé par un Peter Berg encore loin d’être le réalisateur que l’on connait), mais sur ce qui gravite autour. Ainsi, faire revenir sous la forme d’un fantôme Allison, sa petite amie assassinée par Pinker, est de trop dans le métrage, finalement peu utile à l’intrigue (mais indispensable aux yeux, tant Camille Cooper est superbe) mais qui surtout n’évite pas des clichés gênants (le fantôme tout de blanc vêtu), voire des éléments un rien ridicule (la seule chose à laquelle Pinker est vulnérable, c’est le pouvoir de l’amour) et surtout présent pour développer une histoire d’amour gnangnante mais qui paradoxalement s’avère par moments touchante. Peu utile aussi les liens qui unissent Horace Pinker et Jonathan, vite évoqués pour ne plus jamais être mentionnés. C’est ici le plus gros défaut de Shocker, le film a trop d’idées à exploiter et le mélange donne un métrage qui n’a au final aucun sens, d’autant plus dommage que le film s’avère plaisant à suivre et ne lasse jamais puisqu’il a tout le temps autre chose à offrir, ce qui insuffle un rythme correct mais pas parfait car la mise en scène de Craven fait trainer en longueur certaines scènes qui auraient pu être largement raccourcies. Une mise en scène qui par ailleurs est par moments réussie, mais aussi parfois assez foirée (la scène du parc, incohérente et blindée de faux raccords, semble avoir été tournée à l’arrache). Shocker n’est pas parfait, il reste cependant un film fun, généreux et parfois jouissif, au casting impliqué et à la très bonne bande son hard Rock.

LES PLUS LES MOINS
♥ Horace Pinker
♥ Un film remplie d’idées…
♥ On ne s’ennuie jamais
♥ C’est fun et généreux
♥ La B.O
⊗ Une mise en scène en dent de scie
⊗ …. Jusqu’à indigestion
⊗ Un boogeyman trop proche de Freddy
⊗ Des scènes qui trainent parfois en longueur
⊗ Des effets spéciaux qui ont pris un coup de vieux
Avec Shocker, Wes Craven tente de donner naissance à un nouveau boogeyman de la trempe d’un Freddy Krueger dans un film qui ne convainc qu’à moitié en se perdant dans trop d’idées qui frôlent l’indigestion et un aspect technique en dents de scie. Un métrage qui n’est pas parfait, mais qui reste cependant recommandable, fun et généreux.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Heather Langenkamp fait un caméo dans le film.
• Jonathan et Jessica Craven, fils et fille de Wes, font une apparition dans le film.
• Après une courte carrière en tant qu’actrice, Camille Cooper est devenue experte réputée dans le domaine du droit de l’enfance qui a fait passer plusieurs lois pour la défense des enfants.



Titre : Shocker
Année : 1989
Durée : 1h49
Origine : U.S.A
Genre : Coup de jus
Réalisateur : Wes Craven
Scénario : Wes Craven

Acteurs : Peter Berg, Camille Cooper, Mitch Pileggi, Michael Murphy, Ted Raimi, Richard Brooks, Sam Scarber, Emily Samuel, Virginia Morris

 Shocker (1989) on IMDb


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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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