Himeki, aspirant à devenir actrice, doit participer à une émission pour youtube, où avec deux autres idoles, elle va devoir s’installer dans un appartement qui aurait été le lieu de terribles crimes, en espérant pouvoir y filmer des fantômes.
Avis de Rick :
Le tout petit cinéma, celui bricolé avec deux francs six sous, a encore de beaux jours devant lui, et pas seulement pour le pire vu la carrière de plus en plus remplie de certains tacherons au Japon. Avec Shin Jiko Bukken, on est dans ce très petit cinéma, celui qui n’a pas beaucoup d’argent, pas beaucoup de lieux, pas beaucoup d’acteurs, mais une envie de proposer quelque chose, peu importe que cela soit réussi ou non d’ailleurs. Et il faut croire que ça a marché, puisque le film, qui a eu une suite tournée dans la foulée, bénéficie d’avis plutôt favorables en fouinant un peu. Ou en fouinant beaucoup, car oui, on parle bien de petit cinéma Japonais, qui n’a déjà pas une grande visibilité dans son pays malgré sa présence dans l’abonnement Amazon Prime, et n’a donc encore moins de visibilité hors de son pays. Shin Jiko Bukken n’est pas un grand film pour autant. Il est plein de bonnes intentions, il a un réalisateur qui y croit sérieusement derrière la caméra, un directeur de la photographie qui malgré les moyens de bord limités fait son travail de manière plus que compétente, mais on a souvent l’impression que le film ne sait absolument pas sur quel pied danser, et donc peine à convaincre sur la durée, même si celle-ci est très courte, 1h19 au compteur pour ce premier métrage. En réalité, on pourrait, pour simplifier les choses, séparer le film en trois parties distinctes et très différentes. L’introduction, amenant son concept bien connu au Japon de vidéos youtube dans des lieux réputés hantés ou alors où ont eu lieux des meurtres, ainsi que ses personnages principaux, très sérieusement réalisée, mais s’éternisant un peu trop pour un concept bien simple. Oui, notre héroïne, Himeki (Ebino Cocoro) se voit un peu forcée de participer à cette émission, rencontre les deux autres participantes, elles se rendent sur les lieux, ça parle avec l’équipe, avec l’agent, ça explore l’appartement.
On a vite compris, les lieux sont très rapidement limités, et 20 minutes pour nous présenter tout ça, c’est longuet. Dans le même genre, on pensera à Stigmatized Properties d’un certain Nakata signé en 2020. Puis vient la partie tentant de jouer sur l’ambiance. Là aussi, un poil trop long, mais plein de bonnes intentions, quelques bonnes idées, et un hommage très appuyé à Audition de Miike, jusque dans la composition d’un plan, mais qui en soit fonctionne du tonnerre. Car dans le domaine de l’horreur, s’il y a bien quelque chose que le cinéma Japonais a compris, bien plus que le cinéma Américain, c’est que si un plan semble étrange ou inhabituel pour une raison ou pour une autre, il ne faut pas hésiter à faire durer ce plan, justement pour faire durer cette atmosphère, cette ambiance, ce doute chez le spectateur. Shin Jiko Bukken, même s’il tire un peu sur la corde à plusieurs reprises, réussi cet élément deux fois de manière fort convaincante, encore une fois pour un film de ce calibre. C’est dans ces moments là que les intentions de l’équipe derrière le métrage semblent honorables. Puis sans prévenir, tout bascule, pour le meilleur, et pour le pire, en plongeant clairement dans le film d’horreur gore et frontal durant ses 20 dernières minutes. Pour le meilleur car soyons honnêtes, ces effets spéciaux, en ce qui concerne les effets sanglants, sont très convaincants, et l’arrivée de l’horreur pure dans le récit fonctionne très bien, surtout après toute cette attente. Surtout que cette partie comporte elle aussi deux scènes très efficaces. Ça parvient à surprendre, à captiver, et on notera même un hommage à Frayeurs d’un certain Lucio Fulci. Le souci, c’est que là aussi, le film décide d’en faire trop.
Etrange sentiment que voilà, avec un film qui change de bord et décide d’y aller à fond, sans trop savoir quel ton il devrait aborder. On a en réalité l’impression que le réalisateur essaye de faire comme Shiraishi Kôji, en allant dans le grotesque, dans l’horreur peu crédible mais frontale et à la frontière donc du ridicule, sans savoir s’il doit franchir cette frontière ou non. C’est devant un étrange spectacle que l’on se retrouve donc, difficile à totalement prendre au sérieux, mais néanmoins assez premier degré dans son approche, alternant les bons coups et les moments moins glorieux, voire moins intéressants. Une première partie trop longue mais avec une ambiance assez réussie et quelques scènes qui marchent, puis une seconde partie plus rentre-dedans, qui fait plaisir, mais justement y va peut-être trop constamment à fond pour être prise au sérieux et pleinement fonctionner. Un spectacle bancal, qui pourra autant plaire que rebuter vu sa proposition. Une proposition que je n’ai pas détesté à titre personnel. Mais au moins, l’équipe derrière y croyait, et y est allée à fond, et c’est à saluer.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Techniquement appliqué ♥ Une poignée de scènes à l’ambiance qui marche ♥ Le gore, bien fait ♥ Ebino Cocoro fort charmante |
⊗ Une première partie qui prend trop son temps ⊗ Une seconde partie bien trop grotesque ⊗ Certains maquillages moins convaincants |
Shin Jiko Bukken est un petit film bien bancal, avec ses hauts et ses bas, autant dans l’ambiance que dans l’horreur frontale. En résulte un film souvent boiteux, qui traine parfois un peu en longueur, mais plein de bonnes intentions. |
Titre : Shin Jiko Bukken / Hontô Ni Kowai Jûnin Tachi – 真・事故物件/本当に怖い住民たち
Année : 2022
Durée : 1h19
Origine : Japon
Genre : Horreur
Réalisation : Sasaki Katsumi
Scénario : Sasaki Katsumi
Avec : Ebino Cocoro, Takeuchi Hana, RaMu, Kojima Miyu, Ono Kento, Shibue Jōji, Shimada Shûhei, Minorikawa Eve et Kishibata Masahiro
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