Hinako a quitté Shikoku alors qu’elle était encore enfant. Lorsqu’elle y remet enfin un jour les pieds, c’est pour découvrir que la singularité de l’endroit est toujours intacte. Elle retrouvera alors Fumiya, un de ses amis d’enfance, qui lui apprendra que sa meilleure camarade, l’étrange Sayori, est décédée il y a maintenant quelques années. Certains avouent pourtant, le regard tremblant, l’avoir vue hanter les lieux que côtoie encore aujourd’hui le triste Fumiya…
Avis de Oli :
Il y en a qui achètent les DVD à la jaquette, d’autres qui s’arrêtent parfois sur un nom. En l’occurrence ici et dans le cas présent, un film qui porte le titre de SHIKOKU ne pouvait qu’attiser mon attention.
L’île de Shikoku c’est en effet, à elle seule, déjà tout un programme. Dernière des quatre îles principales du Japon à avoir été reliée aux autres, Shikoku reste, aujourd’hui encore, le symbole de la nature et des croyances ancestrales préservées au Japon. Oui là-bas tout est un peu différent, les touristes d’ailleurs, y sont bien moins nombreux. Les Japonais eux-mêmes s’y rendent moins souvent : Shikoku ce n’est pas le centre dynamique du Japon, cela va sans dire. Pourtant on y trouve autre chose que ces buildings empilés, que ces milliers de néons branchés, que cette vie constamment vue en accélérée.
Pour se rendre compte de la singularité de Shikoku, il faut sans doute y avoir un jour posé les pieds. Ou bien peut-être aussi avoir eu l’opportunité de voir les quelques films qui traitent de cet incomparable îlot japonais. La référence en la matière est, à mes yeux, le long métrage INUGAMI, de Harada Masato. Étrange coïncidence (mais qui en fait n’en est pas une), le film SHIKOKU est adapté d’un roman de Bando Masako, auteure japonais qui est également à l’origine du livre qui inspira INUGAMI.
S’annonçant sous les meilleurs auspices, le film tient bien toutes ses promesses. La singularité de l’île de Shikoku, la très jolie photographie de l’ensemble (le regretté Shinoda Noboru était ici directeur de la photo), et cette très belle idée de départ qui plonge Shikoku au centre même de l’intrigue : tout cela a vraiment tout pour mon plaire. Il est en effet ici question du fameux pèlerinage des 88 temples, qui existe réellement au Japon. L’écrivaine Bando Masako détourne ici cette croyance séculaire pour improviser un processus capable de réveiller les morts. Quiconque terminerait ce pèlerinage un nombre de fois correspondant à l’âge de la personne décédée, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (donc dans le sens inverse du vrai pèlerinage), serait ainsi susceptible de ressusciter l’être tant regretté. Une mère va ainsi tout tenter pour ramener sa fille à la vie. Cette même fille qui hante toujours son village de Yaku, perdu dans la région de Kôchi, au sud de Shikoku. Éternellement amoureuse, Sayori ne s’éloignera jamais de son amour d’enfance, Fumiya. Aussi lorsque celui-ci s’éprendra d’une autre personne, Sayori ne comprendra pas…
Cette tragique histoire d’amour donne beaucoup de force au long métrage. Profondément lent, le film trace sa voie, déambule au gré du vent… Sous le regard des esprits, il prend son temps. Attention aux kami ! Avare en scènes choc, SHIKOKU fait le choix de l’ambiance lourde, des regards pesants… des apparitions qui n’effraient pas, mais qui attristent. Les rites shintoïstes étant étroitement liés à la nature, le choix du réalisateur de tourner dans les fabuleux paysages naturels de Shikoku vient encore renforcer la force d’un récit maitrisé, à peine écorné par une conclusion très belle sur le fond, mais sans doute pas totalement réussie sur la forme.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Histoire originale, triste ♥ Les apparitions fantomatiques plus tristes que surprenantes ♥ Visuellement réussi |
⊗ Un final un peu bancal sur la forme |
Un très joli film, qui tourne le dos aux scènes choc pour s’attarder sur des pratiques reculées et des amours… contrariées. |
Titre : Shikoku / 死国
Année : 1999
Durée : 1h40
Origine : Japon
Genre : Drame / Fantômes
Réalisateur : Shunichi Nagasaki
Scénario : Kunimi Manda
Acteurs : Yui Natsukawa, Michitaka Tsutsui, Chiaki Kuriyama, Toshie Negishi, Ren Osugi, Makoto Satô, Taro Suwa, Tomoko Otakara, Haduki Kôzu