[Film] Shaolin Prince, de Tang Chia (1983)


Le 9ème Seigneur usurpe le trône de l’Empereur, qu’il assassine. Les deux enfants héritiers sont alors cachés. Le plus jeune devient un brillant épéiste tandis que le plus âgé est instruit par trois moines shaolin un peu fous.


Avis de Sanjuro :
Maître chorégraphe à qui l’on doit un nombre incalculable de scènes d’action made in Shaw brothers (The magic Blade, La vengeance de l’aigle, Les 13 fils du dragon d’or, et j’en passe des dizaines…) et grand créateur d’armes bizarroïdes en tous genres, Tang Chia eut aussi une courte (et tardive) carrière de réalisateur. Tandis que le règne de la Shaw touchait à sa fin, il signa 3 films en l’espace de 2 ans (1983-84) et vu la qualité de celui que j’ai eu l’occasion de voir, c’est fort regrettable qu’il n’ait pas pu en réaliser plus.

Peu après l’assassinat de leur père (et du reste de leur famille), deux nourrissons héritiers d’un trône sont séparés. L’un d’eux (Ti Lung) sera élevé par trois moines Shaolin pour le moins particuliers, l’autre (Derek Yee) sera adopté par le Premier Ministre. Quelques années plus tard les 2 frères seront amenés à se recroiser… Sous ce canevas des plus standard se cache une œuvre singulière que l’on pourrait décrire comme étant une sorte de « best-of » de la Shaw Brothers, un récapitulatif de ce que la firme a pu produire (dans le registre du cinéma martial en costumes), bref un dernier sursaut avant l’agonie. On y trouve pêle-mêle une narration hystérique (genre Chu Yuan sous acides !), du carnage « ogresque » à la Chang Cheh (l’introduction où les nourrissons sont décimés par paquets de 12 !), de la kung-fu comedy bien grasse, des armes farfelues pour le moins innovantes (normal c’est une des spécialités de Tang Chia), des débordements graphiques en tous genres (voir l’inoubliable sort réservé au bad guy de service qui tient du cartoon live pur et dur !), des SPFX grattés sur pellicule (oui, oui comme dans Buddah’s Palm !) et même une séquence d’attaque de fantôme (aussi gratuite que jouissive !) toute droit sortie d’une ghost kung-fu comedy type L’Exorciste Chinois… Le genre étant alors à la mode autant en profiter (bien que les principaux fleurons n’aient pas été produits par la shaw) !

En dépit d’un scénario plus ou moins expédié et aux enjeux réduits à peau de chagrin (ne vous attendez pas à voir le thème de la fraternité traité avec le lyrisme d’un Chang Cheh), Shaolin Prince s’impose comme un délire martial des plus revigorants, un spectacle de chaque instant enchaînant les combats virtuoses (et savoureusement barrés en sucette) sur près d’une heure et demie. Il ne se déroule jamais 5 minutes sans la moindre séquence martiale, et il faut voir les bastons en question mes amis ! Câblés à outrance sans pour autant laisser une technicité plus classique de côté, les innombrables affrontements qui émaillent le film rivalisent d’ingéniosité et ne cessent de créer la surprise. Là où une telle orgie de combats en tous genres aurait pu susciter la lassitude, Tang Chia parvient à maintenir notre intérêt constant (je dirais même qu’il va crescendo) par une inventivité sans cesse renouvelée. Il est impossible pour tout amateur de cinoche pop légèrement bis (mais soigné) sur les bords de ne pas sourire comme un gamin devant le combat mettant en scène « la chenille aérienne de Shaolin », ou bien celui opposant nos 2 héros aux généraux du feu et de l’eau, sans oublier l’anthologique final où le méchant se bat assis sur une chaise escamotable (soulevée par des porteurs) et bourré d’armes qui n’est pas sans rappeler le chariot de ce cher Ogami Itto.

Au rayons de l’interprétation, on signalera un Ti Lung plutôt surprenant (mais toujours convaincant) dans un registre plus comique et léger que d’habitude. De son côté, Derek Yee semble plus effacé, moins impliqué dans son rôle de sabreur tragique… Par contre, force est d’avouer qu’il assure lorsqu’il s’agit de sortir l’épée du fourreau ! Mais en tant qu’amateurs de cinoche psychotronique on retiendra avant tout les 3 moines shaolin débiles interprétés par Alan Chan, Chao Ma et Lam Fai-Wong. Ces derniers s’en donnent à cœur joie dans le cabotinage afin renforcer l’aspect « out of this world » de ces 3 personnages complètement cramés du bulbe qui, au détour d’une séquence, se déplacent (et combattent) juchés sur des pogo-sticks (!). Comme je le mentionnais auparavant, Shaolin Prince peut être vu comme un digest hautement roboratif de tout ce que le cinoche d’arts martiaux HK « old school » pouvait proposer.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le mélange des genres
♥ Les combats fous
♥ Ti Lung
♥ Très bien rythmé
⊗ …

Un magnifique fourre-tout, à la fois chant du cygne d’une époque et pont vers une nouvelle ère… En cela on peut le rapprocher de films tels que Duel to the Death, Zu ou Buddah’s Palm qui annoncent, près d’une décennie à l’avance, les WXP « hystéro-aériens » qui feront le bonheur des spectateurs hongkongais au début des 90’s. Un indispensable de la Shaw.


SHAOLIN PRINCE est sorti chez Spectrum Films en coffret Blu-ray, accompagné des films SHAOLIN INTRUDERS et OPIUM AND THE KUNG FU MASTER, au prix de 45€. Il est disponible à l’achat ici : Spectrumfilms.fr

En plus des films, on y trouve : Présentations de Arnaud Lanuque, Interview de Robert Mak, Interviews de Jackie Yeung, Les Années Shaw – Entretien avec Derek Yee par Frédéric Ambroisine (1ère Partie), Le Maître des Arts Martiaux – Entretien avec Tang Chia par Frédéric Ambroisine (1ère Partie), Bande-annonces



Titre : Shaolin Prince / Iron Fingers of Death / 少林傳人
Année : 1983
Durée : 1h29
Origine : Hong Kong
Genre : Kung Fu Pian / Wu Xia Pian / Comédie
Réalisateur : Tang Chia
Scénario : Wong Jing

Acteurs : Ti Lung, Derek Yee, Jason Pai Piao, Ku Feng, Chan Shen, Yue Tau-Wan, Alan Chan, Lam Wai-Fong, Lee Hoi-San, Elvis Tsui, Tong Kai, Chiang Tao

 Shao Lin chuan ren (1982) on IMDb


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Auteur : Sanjuro

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