L’aube de l’an 2000, Detroit est la proie du crime et de la corruption. Pour pallier à ce terrible état, les services de Police inventent une nouvelle arme infaillible, Robocop, mi-homme, mi-robot, policier électronique de chair et d’acier qui a pour mission de sauvegarder la tranquillité de la ville. Mais ce cyborg a aussi une âme…
Avis de Cherycok :
Robocop fait partie de ces personnages cultes des années 80/90 aux côtés de Predator et Terminator. Il aura eu droit à deux suites, la première en 1990, la deuxième en 1992, et un remake en 2014. Mais ce n’est pas tout puisqu’une série de 22 épisodes voit le jour en 1996, intitulée sobrement Robocop, une autre en 2001, Robocop 2001, de 4 épisodes de 90min, deux séries d’animation, une de 12 épisodes en 1988, et une de 40 en 1998-1999, ainsi que tout un tas de comics, de jeux vidéo, de romans, et même des jeux de société. Une rumeur dirait même qu’une suite directe du premier film serait en prévision, écrite par Edward Neumeier (scénariste de l’original) et réalisée par Abe Forsythe (Little Monsters), avec Peter Weller qui endosserait de nouveau le costume. Robocop est un personnage culte et écrire sur le premier film, réalisé par Paul Verhoeven (Total Recall, Starship Troopers), est malgré tout assez compliqué tant il y a à la fois beaucoup de choses à dire, et si peu car tout le monde l’a déjà vu et revu. Alors on va essayer quand même, et on verra bien.
C’est après avoir participé au tournage de Blade Runner que l’idée de Robocop est arrivée dans la tête de Edward Neumeier. Il écrit un scénario et, très rapidement, Orion Pictures, société de production indépendante (à l’époque) qui s’était lancée dans des grosses machines dans les années 80 avec des films tels que Amadeus, Platoon ou encore Terminator, s’intéresse au projet. Ce dernier est proposé à divers réalisateurs tels que David Cronenberg, mais il sera finalement confié au réalisateur néerlandais Paul Verhoeven, fraichement débarqué aux States après le succès mondial de La Chair et le Sang. Ce dernier accepte uniquement s’il peut retoucher certains éléments du scénario. Il veut pousser encore plus loin l’ironie sur les paradoxes de l’Amérique de Ronald Reagan. Puis vint le moment de choisir quelqu’un pour endosser le costume du Robocop. Rutger Hauer (Hitcher, La Chair et le Sang), acteur fétiche de Verhoeven, Arnold Scharzenegger (Terminator, Predator) et Michael Ironside (Scanners, la série V) sont un temps envisagés, mais il fallait un acteur assez fin pour rentrer dans le costume qui avait été imaginé. C’est finalement Peter Weller (Les Aventures de Buckaroo Banzaï) qui obtiendra le rôle et le rendra célèbre, et ce malgré des débuts difficiles à tel point qu’à peine quelques jours après le début du tournage, le rôle sera proposé à Lance Henriksen (Terminator, Aliens) qui refusa la proposition.
Robocop sort en 1987 et connait un succès commercial des plus corrects, rapportant 53M$US de recettes pour 13M$US de budget, uniquement sur le sol américain. Mais les critiques ont du mal à vraiment situer le propos du film. Est-ce qu’il s’agit d’un pamphlet contre la politique sécuritaire de Ronald Reagan ? Ou à l’inverse des propos dépeignant un monde au bord de l’implosion qu’il est nécessaire de contrôler par la sécurité à outrance ? Oui oui, 10 ans avant Starship Troopers, tous les intellectuels des States se posaient déjà la question de qui était réellement Paul Verhoeven et de ce qu’il voulait réellement exprimer avec ses films. Comme on se rend vite compte en creusant un peu que ce dernier est bel et bien « un mec de gauche » comme il aime à se définir, et que les scénaristes du film Edward Neumeier et Michael Miner sont eux carrément d’extrême gauche, voire limite anarchistes, il y a fort à parier que c’est dans le but d’ironiser sur la situation actuelle (les années 80 donc) des États-Unis et du programme de leur Président du moment, Ronald Reagan, que Verhoeven ne semble pas porter dans son cœur.
Avec son Robocop, Paul Verhoeven va aborder de manière très cynique et moqueuse l’autoritarisme du pouvoir en place, le corporatisme, l’omniprésence des médias et l’influence qu’ils ont sur la population, le consumérisme, la corruption, l’omniprésence de la violence, l’amour pour les armes à feu, ou encore l’impuissance de la Police, … Le réalisateur va constamment être sur le fil du rasoir, pour toujours essayer de maintenir ce doute sur ses propos, et va user d’une arme qu’il maitrise parfaitement : l’ironie. Et quoi de mieux pour cela que de verser dans le too much, même parfois dans le grotesque ou le cartoon (les bruitages improbables du robot ED-209) pour traiter de sujets très sérieux. On a vraiment l’impression qu’il prend un malin plaisir dans ses nombreux excès gores, dans sa façon de traiter les médias via des pubs ou des messages de propagande (qui lui valurent des critiques dix ans plus tard avec Starship Troopers), ou encore d’imaginer comment le capitalisme américain est en train de devenir complètement hors de contrôle (des méga corpos qui contrôlent tout, la Police qui est en passe d’être privatisée, …). Verhoeven va même jusqu’à pousser le vice de situer son action à Détroit (même si le film a été tourné dans la ville de Dallas car elle avait un look plus « futuriste » à l’époque), ancien fleuron de l’industrie américaine, notamment dans l’automobile, mais aujourd’hui plus que l’ombre d’elle-même, ayant même été déclarée en faillite, et symbole du déclin de l’empire américain depuis la fin des années 60.
Paul Verhoeven va mener son projet d’une bien belle manière, et Robocop est un film tout bonnement jouissif. Par ce qu’il raconte d’une part, comme on vient de le voir ci-dessus, mais aussi par la manière dont il le raconte. Sa mise en scène est maitrisée de A à Z, de ses plans audacieux, à la photographie, en passant par la crédibilité de la dystopie qu’il dépeint (et ce malgré le côté exagéré). La direction d‘acteurs est excellente. Peter Weller campe un Robocop parfait, Nancy Allen est toujours juste, et la tripotée de têtes connues (Ronny Cox, Miguel Ferrer, Kurtwood Smith, Ray Wise, …) en tant que seconds rôles fait plaisir à voir. Alors oui, c’est sûr, certains effets spéciaux ont méchamment vieilli (le robot ED-209). Mais rappelons-nous que nous sommes dans les années 80 et qu’à l’époque, ça avait méchamment de la gueule, surtout quand comme moi on découvre le film à l’âge de 8 ou 9 ans et qu’on reste complètement hypnotisé par le spectacle proposé, même si c’est bien plus tard qu’on se rend compte de l’impertinence du film.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Le casting impeccable ♥ La satire / critique ♥ Les effets gores ♥ Aucun temps mort ♥ La mise en scène |
⊗ Certains SFX ont vieilli |
Paul Verhoeven est arrivé aux États-Unis et a montré aux yeux du monde avec Robocop qu’il était un sale gosse. Robocop est une œuvre culte à plus d’un titre, un film comme on n’ose plus en faire. A voir et à revoir sans modération tout en se disant que ce remake dégueulasse de 2014 n’a jamais existé. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Terminator, autre production de Orion Pictures, est considéré comme le grand frère avoué de Robocop. Un morceau de la bande originale du film de James Cameron est d’ailleurs présent dans le film.
• Peter Weller s’est inspiré de Nikolaï Tcherkassov, interprète du rôle principal du film russe Ian Le Terrible (1944), pour jouer son personnage de Robocop. Il explique qu’il avait une « façon quasi surnaturelle d’imposer sa présence par la seule force de son visage ».
• Le maquillage du personnage d’Emil Antonowsky, interprété par Paul McCrane, lorsque ce dernier tombe dans les produits toxiques, a demandé presque une tournée entière.
• Robocop a gagné pas moins de 11 prix dans divers festivals dont celui du meilleur réalisateur au Festival International du film de catalogne en 1987, le prix des effets spéciaux et le prix C.S.T au Festival International du Film Fantastique d’Avoriaz en 1988, ou encore celui de meilleur film de SF et celui de meilleure réalisation aux Saturn Awards de 1988
• En 2017, une campagne Kickstarter a été lancée pour qu’une statue de Robocop soit érigée à Détroit, le tout appuyé par Peter Weller lui-même. La campagne est une réussite, récoltant 67436$US et une statue de 3.60m est mise en production. En mai 2018, un accord est passée avec le Michigan Science Center, un musée de Détroit, afin d’héberger la statue de Robocop.
Titre : Robocop
Année : 1987
Durée : 1h42
Origine : U.S.A
Genre : Culte !
Réalisateur : Paul Verhoeven
Scénario : Edward Neumeier, Michael Miner
Acteurs : Peter Weller, Nancy Allen, Ronny Cox, Kurtwood Smith, Miguel Ferrer, Dan O’Herlihy, Robert DoQui, Ray Wise, Felton Perry, Paul McCrane