[Film] Prisoners of the Ghostland, de Sono Sion (2021)

Hero, criminel notoire, est envoyé au secours d’une fille kidnappée ayant disparue dans un univers surnaturel. Au sein de ce territoire qu’on appelle le Ghostland, ils vont essayer de briser la malédiction qui les garde captifs de mystérieux revenants.


Avis de Rick :
La hype est-t-elle mauvaise pour le monde du cinéma ? Assurément, puisqu’au final, cela n’amène qu’une déception certaine. Et niveau hype, Prisoners of the Ghostland en a eu. Et il faut dire que l’association de Sono Sion, soit un des réalisateurs Japonais les plus intéressants de ces 15 dernières années, bien qu’à la carrière inégale, et de Nicolas Cage, acteur déchu créateur officiel de méme sur Internet, revenu en force depuis quelques années avec des séries B bien barrées comme Mandy, Color out of Space ou encore Mom & Dad, et bien ça promettait. Et puis Prisoners of the Ghostland, c’est aussi le premier film Américain de Sono Sion, après moults essais qui ne se sont jamais concrétisés. Même si pour le coup, le réalisateur a eu bien plus de chances que ces compatriotes, puisqu’il a pu tourner avec pas mal d’acteurs Japonais, et que ça parle autant Anglais que Japonais dans son film. Et surtout, que l’on retrouve à pas mal de postes une équipe technique Japonaise, ce qui permet donc tout naturellement de mieux se faire comprendre et d’avoir plus de contrôle. Le tournage au Japon, grâce à Nicolas Cage d’ailleurs, aide. Et puis, faire son premier film Américain avec la boite XYZ Films derrière, c’est un beau cadeau. Ils ont d’ailleurs déjà produit plusieurs métrages avec Nicolas Cage. Toutes les séries B sympathiques que je citais juste au-dessus. Le verdict général après passage en festival ? Et bien Prisoners of the Ghostland se fait un peu descendre de partout, et sa moyenne imdb affiche à l’heure actuelle un beau 4,5/10, soit sans doute la note la plus basse pour un film réalisé par Sono Sion depuis… toujours ? Et une simple question se pose devant le film. Faut-il le prendre comme une série B Américaine mais avec Sono Sion aux commandes ? Comme un pur film de son auteur ? Comme un film de Nicolas Cage qui serait aller chercher Sono Sion ? Pourquoi pas les trois à la fois ? Une chose est sûre, c’est que si la présence de Sono Sion se ressent derrière la caméra, c’est avant tout de manière visuelle, ou dans certains éléments du film qui ne peuvent pas être considérés par le commun des mortels comme majeurs. Car les grandes lignes, son histoire, son déroulement, ça, c’est signé par deux autres auteurs, et on ne va pas mentir, là ce n’est pas glorieux du tout. Voir pas bon.

Car Prisoners of the Ghostland, en gros, c’est un peu New York 1997. Un criminel bad-ass capturé, et qui est envoyé dans le Ghostland, sur des Terres désolées, afin de retrouver la petite fille du gouverneur. On lui donne une tenue spéciale, armée d’explosifs, au niveau de son cou, de ses bras, et de… ses testicules, et il a 3 jours pour retrouver la fille, et 2 jours pour la ramener. Voilà, niveau postulat de base simpliste qui ne fait pas du tout penser au chef d’œuvre de Carpenter, ça se pose là. Mais pourquoi pas, cela donne une base solide et assez de liberté au scénario pour se démarquer, se faire fou. Et ça commence très bien d’ailleurs, avec ce braquage qui tourne mal et qui va amener notre héros, surnommé, et bien, Héros, à être capturé. Un peu comme si Carpenter remontait son film pour y inclure sa scène coupée en quelque sorte. Puis, sans perdre de temps, le gouverneur arrive, les figurants chantent, on retrouve Nakaya Yuzuka pour un petit rôle après avoir débutée sa carrière, et bien, justement dans The Forest of Love, Sakaguchi Tak est un homme de main samouraï qui a la classe sans dire un mot de tout le film et qui vient donc du chanbara, le shérif et les divers hommes de mains qui sont des cow boys et qui renvoient donc au western (les deux genres étaient similaires au final, pourquoi pas), et on donne à ce grand Nic sa tenue tout en cuir et en explosif, et sa mission. Il doit partir sur les terres désolées (donc, du post apo) pour sauver la petite fille du gouverneur (Sofia Boutella), dans les 3 jours, sinon les explosifs de sa tenue explosent. Et pour être sûr qu’il ne tente rien de pervers, il a aussi deux explosifs au niveau des testicules, au cas où. On s’attend donc avec un tel départ à un film hystérique comme Sono en a fait par le passé (et souvent, pas ses meilleurs films, mais cela n’engage que moi), et Sono brise nos attentes en un temps record. Nic prend sa voiture, pète la classe, et après un dérapage que Baboulinet aurait adoré dans sa saga rapide et furieuse, s’arrête, sort de la voiture, et se casse en vélo… Une manière comique (qui fonctionne) de tout briser d’un coup et de faire comprendre que non, Prisoners of the Ghostland ne sera pas une série B hystérique ultra rythmée, mais un film au rythme posé. Cet élément, il respire la touche Sono Sion, se pose finalement comme un aveu face à un film qui ne peut survivre à sa hype.

Ce genre d’idées, qui ne peuvent venir que de Sono Sion, elles fonctionnent. Mais elles sont rares, le film se contentant la plupart du temps de suivre son scénario, assez banal, avec des péripéties prévisibles peuplées de personnages peu voir pas du tout développés, malgré un bien beau casting. Le souci, ce n’est pas le rythme posé du film, ni son visuel (bien que quelques éléments paraissent cheap), ni ses idées, mais bel et bien son scénario, comment tout cela nous est raconté. Et ce n’est pas toujours le plus palpitant du monde. Sono Sion aura beau nous abreuver de magnifiques images (la photographie et le son sont très travaillés), il ne fait que nous montrer un univers aux multiples possibilités qui ne seront jamais explorées. Toutes ces idées de mise en scènes, de décors, de concepts, elles sont là, elles passionnent si on passe quelques éléments cheapos comme déjà dit, mais elles restent en surface. On a ces criminels qui arpentent le Ghostland, ces fameux fantômes, les hommes « rats » issues directement de Mad Max 2, ces hommes recouverts de fausse peau, de porcelaine ou que sais-je encore pour ressembler à des mannequins, ou bien encore ces pauvres crétins qui tiennent l’aiguille d’une horloge avec une corde pour empêcher le temps d’avancer. Des idées cool, des idées visuelles avant tout, des idées de concepts. Qui ne seront, au choix, jamais exploitées ou jamais expliquées. Il est beau le Ghostland, son univers semble passionnant, on aurait aimé en savoir plus, en voir plus. Mais non, le scénario lui nous le refuse et part dans sa direction, de série B pas subtile et surtout pas nouvelle, et puis c’est tout. Et c’est là la grosse déception du film. On nous vends du rêve, Sono Sion livre de belles images, un univers qui semble passionnant, Nicolas Cage joue encore une fois le gars sûr de lui qui pète la classe et ne parle pas des masses (souvent en roue libre quand il parle), il est entouré d’acteurs et actrices confirmés (bien que certains Japonais ne semble pas à l’aise quand il faut parler Anglais), mais la sauce a souvent du mal à prendre. Sans pour autant être insupportable.

Car comme d’habitude, les avis que l’on peut lire un peu partout ne sont jamais nuancé, à coup de « 1/10 pire film que j’ai vu de ma vie ». Alors si Prisoners of the Ghostland était si ignoble que ça, autant dire que la moitié des films que j’ai vu dans mon vie n’existent en réalité même pas. Ou alors suis-je dans un univers parallèle où les films de Uwe Boll sont bien aimés du public ? Non, nous vivons tout simplement à une époque où les extrêmes sont devenus la norme. On adore ou on déteste, pas de demi-mesure. Les films un peu ratés mais plein de potentiels, ou divertissants, ça n’existe plus pour le grand public. Prisoners of the Ghostland est prisonnier de tout ça, en étant un semi échec, mais aussi une semi réussite. Trop barré pour le grand public lambda, mais aussi bien trop sage et lisse pour les habitués de Sono et Cage. Surtout que dans un sens, je reste persuadé que le même film, enfin, la même base, mais avec un scénario plus personnel écrit par Sono Sion lui-même aurait donné un film totalement différent, et sans doute plus personnel, et plus intéressant. Il suffit de voir Exte, soit la tentative de Sono Sion en 2007 de livrer un film de J-horror pour un gros studio, ce qu’il faisait finalement en utilisant ses artifices habituels, pour livrer un film bien différent des autres du genre, même si tout ne m’avait pas convaincu non plus. Voilà donc, le résultat est décevant, pas aussi fou que prévu, et souffre surtout d’un scénario bâtard et peu développé. Un Sono assez faible, mais pas honteux pour autant si vous avez de l’affection pour l’auteur, et pour l’acteur.

LES PLUS LES MOINS
♥ Nicolas Cage qui en impose comme toujours
♥ Un univers visuel travaillé
♥ Quelques notes d’humour qui font mouche
♥ Le début démarre fort
⊗ Une hype et une communication qui font du mal au film
⊗ Pas si fou que ça
⊗ Un scénario prétexte peu développé
⊗ Univers, personnages, c’est beau, mais on ne saura rien
note75
Prisoners of the Ghostland a déçu, beaucoup. Et on comprend rapidement pourquoi, tant l’univers du réalisateur semble un peu bridé. Le gros souci du film, c’est son scénario qui reste toujours à la surface des choses, peu importe combien Sono Sion et Nicolas Cage se donnent à fond.


Titre :  Prisoners of the Ghostland

Année : 2021
Durée :
1h43
Origine :
U.S.A.
Genre :
Action
Réalisation : 
Sono Sion
Scénario : 
Aaron Hendry et Reza Sixo Safai
Avec :
Nicolas Cage, Cofia Boutella, Bill Moseley, Nick Cassavetes, Sakaguchi Tak, Charles Glover, Young Dais, Cici Zhou, Kurihara Louis, Watanabe Tetsu, Yonemoto Takato et Nakaya Yuzuka

 Prisoners of the Ghostland (2021) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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