[Film] Mutations, de J. P. Simon (1988)

Plusieurs personnes meurent mystérieusement. Mike Brady pense en avoir découvert la cause, mais sa théorie sur des limaces tueuses n’est pas prise au sérieux par les autorités.


Avis de John Roch :
Vous souvenez vous du site internet Six degrees of Kevin Bacon ? Ce site sur lequel vous entriez n’importe quel nom en rapport avec le cinéma, connu ou obscur, qui se démerdait pour trouver un lien avec l’acteur ? Aujourd’hui je vous propose de trouver un lien entre Juan Piquer Simon, le réalisateur de l’ultra nanar Supersonic Man et du gorissime mais aussi débile Le Sadique à la Tronçonneuse, et James Cameron. Vous l’avez ? Et si je vous dis que c’est une histoire de limaces tueuses qui lie les deux cinéastes ? En effet Mutations est à la base un roman de Shaun Hutson, écrivain de bouquins d’horreur à succès qui publia Slugs en 1982. Toujours en activité de nos jours, le romancier est celui qui a été chargé de la novélisation de Terminator à la sortie de la bombe de Cameron. Voila pour l’information inutile du jour, à garder pour briller en conseil des ministres, mais aussi pour commencer une chronique quand on n’a pas la moindre idée de comment la commencer. Mutations est donc une histoire de limaces qui bouffent tout, même les gens, racontée au premier degré, réalisé par un Espagnol en quête des États-Unis qui n’a pas peur du ridicule, pas plus que Lucio Fulci l’a eu l’année précédente avec son Aenigma et la fameuse, mais pas pour les bonnes raisons, scène des escargots. Mieux encore, Slugs de son titre original s’en tire plutôt bien, le genre de petite série B gore et parfois rigolote, mais un peu conne sur les bords, qu’on sort de temps à autre pour passer 1h25 de son temps un jour de pluie lorsque les gastéropodes sont de sortie à l’extérieur.

Si les limaces mangeuses de chair humaine est pour le moins insolite, on n’en dira pas tant du scénario de Mutations, une invasion animale d’une petite ville tout ce qui a de plus banale. On y suit Mike Brady, inspecteur de l’hygiène qui découvre que des déchets toxiques ont transformés les limaces du coin en machine à tuer, voila pour le pitch. Il y a bien d’autres personnages, mais ceux-ci sont tous aussi fades et sans intérêt que le héros de l’histoire, qu’il n’y a pas matière à développer quoi que ce soit, leur personnalité étant tout aussi clichée qu’absente. On retrouve en guise de personnages secondaires le pote du héros qui est le seul à le croire dès le départ, le scientifique qui récite des définitions d’un dictionnaire, le shérif qui ne gobe aucun mot de cette histoire de gastéropodes carnivores, le reste du casting étant de la chair fraîche pour les limaces, et le peu de personnages restant disparaissent de l’intrigue au fur et à mesure que celle-ci avance. Le déroulement de l’histoire est des plus classiques, avec les premiers événements étranges qui surviennent tout à coup dans toute la ville, la découverte des premiers cadavres puis plus tard des responsables, le héros qui tente en vain de prévenir les autorités avant de se lancer la tête la première dans le nid pour en finir, la dernière image qui annonce que l’invasion n’est pas terminée… Bref, Mutations tient du archi-déjà vu. Pourtant, en dépit d’une mise en scène des plus simples et d’un casting qui joue mal, le film se suit sans déplaisir lors des scènes d’exposition. Mais là où le métrage gagne en intérêt, c’est dans les scènes qui impliquent les limaces, explicitement mais aussi implicitement.

Car comment rendre crédible une invasion de limaces tueuses ? Comment rendre menaçant un gastéropode que vous avez semé en faisant juste un pas en avant ? Juan Piquer Simon a trouvé la solution : en faire des tonnes, avec du gore mais aussi avec rien. Ce dernier point est source d’humour involontaire tant les acteurs qui se croient dans un film catastrophe peinent à convaincre en récitant des dialogues qui ont font des caisses, à base de 《oh mon dieu elle sont partout》, 《regarde ces limaces, elles sont énooormes, et notre héros qui hurle à tout va 《si on ne coupe pas l’eau, toute la ville court à sa perte》alors que les gastéropodes s’infiltrent plus par les sous-sols que par les robinets. Et que dire de cette musique par moment kitchissime, parfois hors sujet, et qui devient carrément épique pour au final pas grand chose. En parlant de final, il va falloir s’armer de sérieux pour ne pas avoir la mâchoire qui se décroche devant une conclusion explosive dans tous les sens du terme ou le terme dommage collatéral prend tout son sens. En faire des tonnes avec du vide donc, mais pas que, car dès que les limaces entrent en action, ça charcle. Notons que la mutation donne aux rampants une force surhumaine (elles sont capable de déplacer un corps humain), elles sont dotées de parasites qui bouffent un acteur de troisième zone de l’intérieur, et en réalité c’est leur bave qui tue leurs victimes. Tant mieux car se faire bouffer à petit feu comme ça, quelle mort horrible ! Et Simon y va dans le gore, les limaces étant de véritables ninjas, personne ne remarque leur présence, que ce soit ce jardinier qui se fait dévorer la main avant de la découper, cette pauvre ado de 25 ans qui glisse sur une petite armée de gastéropodes qui la bouffent de partout, ou ce pauvre gars qui a la tête qui explose de l’intérieur, Mutations est rempli de scènes gores réussies, et de petits moments limite révulsant, notamment ces plans sur des centaines de limaces bien baveuses qui se chevauchent, de quoi donner la gerbe aux anthelmophobes les plus sensibles. Série B par moment jouissive, parfois involontairement drôle et bien gore par instants, Mutations possède un petit capital sympathie certain qui fait passer un agréable moment.

LES PLUS LES MOINS
♥ Les limaces tueuses
♥ C’est gore
♥ Involontairement drôle…
♥ La musique qui semble avoir été composé pour un autre film qui en fait des tonnes
♥ On ne s’ennuie pas
♥ Une série B par moment vraiment jouissive
⊗ Des limaces tueuses, sérieusement?
⊗ Un scénario des plus basique, déjà vu et vide
⊗ … mais c’est aussi sacrément con parfois
⊗ Que ça joue mal
⊗ Des personnages creux, très creux
⊗ Une mise en scène des plus basiques
Mutations est une série B qui remplit son objectif : faire passer le temps tout en divertissant le spectateur avec du gore, de l’humour involontaire et des moments parfois what the fuck, si l’on ne se pose pas trop de questions sur l’acting douteux, son scénario inexistant et le concept de base très con mais au final exploité comme il faut.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Le film a été interdit en Australie jusqu’à la dissolution du comité de censure Australien.

• Le film a un casting Américain et Espagnol, chacun ont tourné leurs scènes dans leurs pays respectif.



Titre : Mutations / Slugs / Slugs, muerte viscosa
Année : 1988
Durée : 1h32
Origine : Espagne
Genre : Gluant, mais appétissant
Réalisateur : J. P. Simon
Scénario : José Antonio Escriva et Ron Gantman

Acteurs : Michael Garfield, Kim Terry, Philip MacHale, Alicia Moro, Santiago Alvares, Concha Cuetos

 Slugs (1988) on IMDb


 

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Auteur : John Roch

Amateur de cinéma de tous les horizons, de l'Asie aux États-Unis, du plus bourrin au plus intimiste. N'ayant appris de l'alphabet que les lettres B et Z, il a une nette préférence pour l'horreur, le trash et le gore, mais également la baston, les explosions, les monstres géants et les action heroes.
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