Une jeune femme, prise en auto-stop, découvre que le conducteur est un serial killer en cavale. Il l’agresse et lorsqu’elle se réveille, elle se retrouve dans un tube rempli de pièges mortels. Pour ne pas mourir, elle devra constamment avancer…
Avis de Cherycok :
J’avoue, avant de tomber sur Méandre, je ne connaissais absolument pas le réalisateur français Mathieu Turi. Je n’ai pas vu son premier film Hostile sorti en 2017, je ne connaissais même pas son existence, et je partais donc sans aucun apriori, sans aucune attente. La seule chose que je savais, c’était qu’on était ici dans un rejeton du Cube (1997) de Vincenzo Natali que j’avais adoré à l’époque au cinéma. Nombreux sont les films de claustration, qui ont vu le jour après la sortie du film de Natali, qui ont transposé le concept dans divers endroits avec plus ou moins de réussite. Ascenseur, Cercueil, labyrinthe, salle noire, … avec des titres tels que Buried, Circle, Devil, House of 9, Nine Dead, Breathing Room, ou plus récemment Escape Room 1 et 2 ou encore Oxygène. Ils ne sont pas toujours réussis, ne savent parfois pas quoi faire de leur concept, mais depuis 25 ans la liste s’agrandit chaque année. La France ajoute donc sa pierre à l’édifice avec Méandre, une série B plutôt réussie.
Méandre va rapidement mettre son concept en place. Après une introduction de 5/6 minutes nous présentant une jeune femme désespérée, proche du suicide, prise en stop par ce qu’elle découvrira être un tueur en série, ce dernier agresse notre héroïne qui soudainement se réveille dans une pièce exiguë de laquelle va s’ouvrir une sorte de tube, ou de conduit, dans lequel elle va devoir ramper, avec comme seule source de lumière un bracelet lumineux impossible à enlever. On ne sait pas pourquoi elle est là, quel est cet endroit, ce qu’elle doit y faire, depuis quand elle y est réellement, mais on voit très vite que c’est piégé et qu’elle doit sans cesse avancer car elle a un certain temps, en général 11 minutes, pour arriver au bout de son « parcours » piégé avant de périr par les flammes. Une fois le parcours terminé, un nouveau s’ouvre, lui aussi limité dans le temps, et ainsi de suite. Elle va croiser moult pièges divers et variés (plafond qui descend, conduit qui se remplit d’eau, duel de vitesse avec un autre prisonnier, …), cadavres de ses prédécesseurs qui n’ont pas réussi à s’échapper. Le film va petit à petit se construire, nous donner quelques pistes et devenir une métaphore de la mort, une métaphore du purgatoire, avec ce long chemin vers la lumière. Notre héroïne se lance en fait dans une lutte contre le deuil, initiée par une réplique en tout début de film, lorsqu’elle exprime son immense douleur causée par la perte de son enfant, mais surtout une lutte contre la mort puisque ce « parcours » est piégé. Elle n’a d’autre choix que d’avancer, constamment avancer, braver les difficultés, se remettre en question, et on se rend compte que, bien que le Méandre privilégie l’efficacité, il tente dans sa deuxième partie de se montrer plus philosophique, plus spirituel.
Méandre est donc un huis clos dans un tube qui ne va laisser aucune place à l’ennui car le principe même du film fait que son héroïne n’a pas le temps de lambiner. Les « péripéties » sont incessantes et le réalisateur Mathieu Turi va jouer avec nos émotions en essayant de nous faire ressentir ce que son héroïne ressent, aussi bien ce sentiment d’enfermement, de claustrophobie, ce sentiment de course perpétuelle ou encore ce sentiment de dégout lors de certains moments bien craspecs. Certaines scènes lorgnent parfois vers le gore pour le plus grand plaisir des amateurs de genre bien que ce ne soit pas là son réel fond de commerce. Malgré un budget semblant très réduit, cela ne se fait jamais sentir et la mise en scène de Mathieu Turi est précise. C’est visuellement très beau et il arrive à se renouveler sans cesse en termes de décors. On sent que le réalisateur est un amoureux du cinéma d’horreur et de SF, on remarque facilement les sources d’inspiration de son film (Descent, Alien, …) et son Méandre est réellement très efficace bien que la deuxième partie du film, plus étrange, avec des moments où il se détache de la réalité, soit en deçà de la première avec un dénouement qu’on devine facilement. Mais dans l’absolu, là n’est pas le plus gros problème du film pour moi. Il vient de son héroïne. Gaia Weiss s’en sort très bien car elle a une vraie présence physique et fait bien ressortir toutes les émotions par lesquelles passe son personnage. Elle est moins à l’aise lorsqu’il faut sortir des lignes de dialogue mais, qu’importe, elle est seule dans 95% du film. Là où le bât blesse, c’est que, comme elle est seule, on sait qu’il ne va pas lui arriver grand-chose avant la fin du film, parce que sinon, eh bien, il n’y a plus de film. Contrairement à Cube qui mettait en scène plusieurs personnages à être piégés et où, du coup, on ne savait pas trop qui allait être le suivant à périr, le réalisateur ici a beau essayer de faire monter le suspense, ça ne prend qu’à moitié. Il suffit de regarder combien de temps il reste avant la fin du film pour se dire que non, c’est bon, elle ne va pas mourir. Néanmoins, si on prend le film dans son ensemble, ça fonctionne plutôt bien à défaut de bouleverser ce sous-genre du cinéma horrifique.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ La mise en scène ♥ Bien rythmé ♥ La pointe de gore ♥ La prestation physique de Gaia Weiss |
⊗ La 2ème partie en deçà ⊗ Le faux suspense |
Méandre est une série B qui s’assume comme telle et qui va chercher l’efficacité et l’immersion. Bien qu’il ne soit pas réussi de bout en bout, sa mise en scène, son utilisation intelligente des décors et la prestation de Gaia Weiss en font un divertissement des plus honorables. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Gaïa Weiss explique son inspiration pour le personnage de Lisa : « Je me suis inspirée de cette période de mon entrée dans ma vie d’adulte où je faisais le deuil des illusions pour affronter le réel. On le retrouve dans cette métaphore du tube qui est un passage, un rite initiatique. En réalité, on ne sort jamais complètement du tube, car après avoir surmonté une épreuve, on en affronte une autre. »
• Tous les murs de la salle de départ portent des inscriptions en morse. Le texte près de l’entrée semble être le mot « Vite ». Le chronomètre à poignet de 11 minutes semble confirmer cela.
• Dans une interview, Mathieu Turi cite le créateur de jeu Hideo Kojima (Metal Gear Solid et récemment Death Stranding) comme référence suprême pour son film.
Titre : Méandre
Année : 2021
Durée : 1h30
Origine : France
Genre : Cube a fait des petits
Réalisateur : Mathieu Turi
Scénario : Mathieu Turi
Acteurs : Gaia Weiss, Peter Franzen, Romane Libert, Frédéric Franchitti, Corneliu Dragomirescu, Eva Niewdanski, Carl Laforêt, Henri Benard, Fabien Houssaye