Tsui Peng, une jeune épéiste talentueuse mais un brin arrogante, arrive en ville avec la ferme intention de devenir disciple de Chung Yuei-Yang, dame d’épée respectée. Après être intervenue sur la place du marché en défendant un villageois sur le point de se faire déposséder par d’infâmes gredins, elle part chez son oncle Chuang et fait la connaissance de Chang Chun et d’une servante. Intriguée par une rumeur, selon laquelle Chung Kuei-Yang serait au temple Ba Yung, Tsui Peng s’y rend mais est mise à mal par les gardiens de ce lieu sacré. Défendue par le villageois qu’elle avait aidé, elle apprend par celui-ci, que dans la région, de nombreuses familles ont été tuées par des démons et que le seul moyen de se protéger de ces esprits maléfiques et assassins était d’acheter un talisman au temple.
Avis de Oli :
Ho Meng-Hua a toujours fait partie de la catégorie des « honnêtes faiseurs ». Rien de péjoratif dans ces propos-là, l’intéressé le reconnaît lui-même : il était plus un réalisateur commercial qu’autre chose, souvent fervent adepte du bis pur et dur. Eh bien curieusement, cet homme-là va nous pondre un wu xia pian presque « classique », en ce sens qu’il reprendra la plupart des codes du genre. Bien entendu, et c’est ce qui fait le charme de ce film-là, la patte de Ho Meng-Hua sera parfois bien visible, et des détails tirés du cinéma bis feront de temps en temps une discrète apparition (effets spéciaux ratés mais assumés, situations improbables comme ce moment où Chang Pei-pei soulève seule un tronc d’arbre entier).
LES GRIFFES DE JADE est le film préféré de son réalisateur, et on comprend pourquoi : ce titre est en effet une belle réussite. Tout d’abord il faut préciser que Ho Meng-Hua a fait ce film pour magnifier une dernière fois l’actrice Cheng Pei-pei. Cette dernière était sur le point de se marier et de quitter la SB, il fallait donc un film à la hauteur pour concrétiser ces adieux. La fiction rejoint alors très vite la réalité, puisque l’on fait appel à la toute jeune Shih Szu pour incarner l’élève souhaitant prendre Lady Hermit (Cheng Pei-pei) pour maître. Habile mise en scène de la part des décideurs de la SB, puisque si Shih Szu marche sur les traces de Cheng Pei-pei dans le film, il en ira de même dans les coulisses des studios : Shih Szu est en effet destinée, à court ou moyen terme, à prendre la relève de Cheng Pei-pei dans les wu xia pian de la Shaw Brothers. Ce passage de témoin est hélas à double tranchant, puisque si Shih Szu est visiblement pleine de bonnes intentions, son visage de bébé et son jeu approximatif (pour ne pas dire carrément mauvais) plombe la plupart des situations censées nous arracher une émotion. Shih Szu était sans doute un peu trop jeune pour porter seule un film avec Cheng Pei-pei. J’utilise bien le terme « seule », car la présence de Lo Lieh dans ce film-ci est anecdotique. Son personnage, très effacé, n’est visiblement là que pour attiser les jalousies entre les deux héroïnes. Pour le reste, il faut bien avouer que le pauvre Lo Lieh est complètement transparent.
Malgré ces quelques approximations au niveau des acteurs et des personnages (Shih Szu se rattrapera bien évidemment dans de futurs films), malgré un rythme un peu trop lent et des situations bien trop nonchalantes dans la première partie, le final des GRIFFES DE JADE, est parfaitement réussi. Plus que ce final, ce sont peut-être les dernières trente minutes du film qui vont cloueront sur place. Les combats vont en effet s’enchaîner (le plus souvent dans un déluge de gore que n’aurait pas renié Chang Cheh), et l’action va nous réserver des surprises de taille, que l’on n’aurait peut-être pas soupçonné de la part de Ho Meng-Hua : nous allons ainsi avoir droit à une scène (culte ?) où Shih Szu va devoir lutter sur un pont suspendu, avant que ce même pont ne s’effondre contre la falaise (Spielberg aurait-il vu LES GRIFFES DE JADE avant de tourner son INDIANA JONES ET LE TEMPLE MAUDIT ?). Il y aura d’autres moments, presque tout aussi forts, comme ce plan où Shih Szu grimpera au sommet d’une tour pour surplomber toute l’armée ennemie.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Les 30 dernières minutes ♥ Des scènes marquantes ♥ Les combats |
⊗ Le jeu de certains acteurs ⊗ Première partie un peu lente |
Et puis il y a Cheng Pei-pei, toujours aussi sublime, il y a enfin cette histoire romantique en forme de triangle amoureux, certes pas très originale, mais qui réserve quelques jolis moments. Une histoire qui prend surtout plus de profondeur lorsque l’on sait, comme je l’ai précisé plus haut, que l’actrice Shih Szu était, à l’image de son personnage dans le film, destinée à s’inspirer et à prendre la place de Cheng Pei-pei au sein des studios de la SB. |
Titre : Les Griffes de Jade / The Lady Hermit / 鍾馗娘子
Année : 1971
Durée : 1h32
Origine : Hong Kong
Genre : Wu Xia Pian
Réalisateur : Ho Meng-Hua
Scénario : Yip Yat-Fong
Acteurs : Cheng Pei-Pei, Shih Szu, Lo Lieh, Fang Mian, Wang Hsieh, Chao Hsiung, Chuan Yuan, Tong Tin-Hei, Lee Siu-Chung, Law Hon, Wu Chi-Chin, Siu Wa