[Film] Les Chiens De Guerre, de John Irvin (1980)

Jamie Shannon, un mercenaire, accepte d’enquêter dans un pays d’Afrique occidentale, le Zangaro, pour le compte d’un groupe financier britannique qui cherche à mesurer la stabilité du régime.

Avis de John Roch :
Avant d’être un film, Les Chiens De Guerre est un roman écrit par Frederick Forsyth, auteur réputé pour le réalisme de ses œuvres. Auteur s’inspirant de faits ou personnages réels, Forsyth est également un écrivain qui ne se lance pas dans la rédaction d’un livre sans s’être au préalable pleinement documenté. Pour Les Chiens De Guerre, il entre d’abord en contact avec des anciens résidents de Guinée Equatoriale, à cette époque dirigée par un dictateur sanguinaire et paranoïaque au point de ne pas fournir son armée en munitions, qui lui affirme qu’un coup d’état est possible avec seulement une poignée d’hommes entrainés. En plus de ces informations qui tiennent de l’anticipation (une tentative de coup d’état aura lieu en 2004 en Guinée Equatoriale), il rentrera en également en contact avec des mercenaires en leur faisant croire qu’il organise un putsch dans le pays susmentionné et infiltrera même le milieu du trafic d’arme sous une fausse identité, avant de se faire griller par une photo de lui au dos de l’un de ses romans. Mélange de réalité et de fiction, Les Chiens De Guerre aurait même, selon la légende, servi de base à de vrais mercenaires lors de l’une de leurs opérations. Sorti en 1974, Les Chiens De Guerre intéresse très vite Hollywood qui en tire un film d’abord destiné à Don Siegel puis Michael Cimino (qui refusa pour aller tourner La Porte Du Paradis, l’un des flops les plus marquants d’Hollywood). C’est finalement John Irvin qui se charge de l’adaptation, une belle opportunité pour le réalisateur qui signe ici son premier long métrage après une carrière déjà bien remplie à la télévision entre documentaires, téléfilms et épisodes de séries TV.

Bien que Les Chiens De Guerre appartienne au genre du film de guerre, plus précisément au sous-genre du film de mercenaires, cela ne concerne que la dernière partie du métrage. Le film est d’avantage un film d’espionnage respectant les codes du film de mercenaires tout en apportant une touche dramatique via son personnage principal. Les Chiens De Guerre se concentre sur l’élaboration d’un coup d’état au pays fictif du Zangaro où arrive Jamie Shannon, mercenaire chargé par son employeur de partir en mission de reconnaissance afin de voir s’il est possible ou non de renverser le régime totalitaire d’un dictateur sanguinaire et paranoïaque. Seulement sa couverture qui sème instantanément le doute (un ornithologue venu photographier la faune locale) est grillée et il finit en prison où il est torturé et sauvé de justesse par un journaliste. De retour au pays, Jamie, alors en pleine rédemption, refuse de prendre part au putsch et souhaite utiliser l’argent gagné pour se ranger et mener une vie normale auprès de son ex-femme qui refuse de le suivre. Condamné à être un chien de guerre, il va superviser le coup d’état et mener sa troupe de mercenaires à la victoire. Le scénario du métrage se concentre donc en grande partie sur l’élaboration du putsch, de la mission de repérage au recrutement des mercenaires. Mais Les Chiens De Guerre va plus loin en consacrant sa seconde partie à un élément rarement, si ce n’est jamais, vu au cinéma : la logistique. Si dans les films de mercenaires, ceux-ci arrivent sur le champ de bataille armés jusqu’aux dents, ici nous sommes face à l’adaptation d’un roman salué pour son réalisme.

De l’achat des armes à leur acheminement en passant par le paiement des mercenaires, Les Chiens De Guerre n’épargne aucune étape de l’opération et parvient à être crédible du début à la fin, notamment dans les enjeux du coup d’état plus politique qu’il n’y parait. En ce sens, le métrage pourrait décevoir ceux qui s’attendent à un film de guerre pur jus, qui seront récompensés lors des vingt dernières minutes pleine d’explosions plutôt spectaculaires, Il serait pourtant dommage de ne pas se laisser prendre au jeu pour un film certes lent, mais jamais long. L’autre élément qui fait basculer Les Chiens De Guerre du bon côté de la balance, c’est son personnage principal, et par extension Christopher Walken. On n’oublie pas le reste du casting, assez chargé et composé de Tom Berenger, Paul freeman, Ed O’Neil, JoBeth Williams, Jean-françois Stévenin ou encore Jean-Pierre Kalfon, mais on regrettera que les personnages soient sous exploités, chacun ayant en apparence son histoire qui ne sera jamais développée. Le film repose donc largement sur les épaules de Walken. Déjà auréolé deux ans plus tôt d’un Oscar pour son rôle dans Voyage Au Bout De L’Enfer, l’acteur est ici encore une fois tout simplement impressionnant dans son rôle de mercenaire en quête d’une rédemption impossible, littéralement possédé dès lors qu’il joue un soldat dénué de morale qui accomplit sa mission quoi qu’il en coute non sans un minimum de conscience. En témoigne la scène où il épargne l’une des maitresses du dictateur, qui est aussi glaçante que touchante, ou ce final parfait où les mercenaires partent après avoir accompli la mission en se questionnant sur le sens de leur vie. Une scène d’autant plus forte qu’elle ne comporte aucun dialogue, tout passe par la mise en scène et le jeu des acteurs. Les Chiens De Guerre n’est pas un film de guerre à proprement parler, en ce sens il pourrait décevoir, mais il serait dommage de passer à côté de cette une véritable plongée dans le monde des mercenaires crédible de bout en bout.

Titre : Les chiens de guerre / The dogs of war
Année : 1980
Durée : 1h50
Origine : Angleterre
Genre : Guide du coup d’état illustré
Réalisateur : John Irvin
Scénario : Gary DeVore et George Malko

Acteurs : Christopher Walken, Tom Berenger, Paul freeman, Ed O’Neil, JoBeth Williams, Jean-françois Stévenin, Jean-Pierre Kalfon, Colin Blakely, Georges Harris, Winston Ntshona