[Film] Leo, de Lokesh Kanagaraj (2023)


Dans une petite ville de montagne en Inde, Parthiban mène une vie paisible avec sa famille. Il tient à la fois un café et participe occasionnellement à la capture d’animaux sauvages. Lorsque cinq assassins pénètrent un soir dans son café, il les tue en situation de légitime défense et devient un véritable héros local, mais cette soudaine gloire va faire ressurgir son terrible passé.


Avis de Nasserjones :
En 2022, mes deux films préférés ont été des films indiens, à savoir RRR et Ponniyin Selvan 1. En 2023 et bien ça continue encore avec ce Leo. L’année n’est pas encore totalement finie, c’est vrai, mais il y a quand même de fortes chances qu’il reste en haut de mon classement jusqu’à fin décembre. Leo est le sixième film de Lokesh Kanagaraj qui du haut de ses 37 ans peut déjà être considéré comme le futur du cinéma indien de genre aux côtés de S.S. Rajamouli (RRR) qui lui est bien plus âgé et à déjà 50 ans. Après son très intéressant Vikram en 2022, qui m’avait quand même laissé sur ma faim, notamment à cause de sa première heure totalement inutile et du choix de l’acteur principal Kamal Haasan trop âgé et raide comme un manche à ballet qui ne convenait pas du tout dans les nombreuses scènes de baston, Lokesh corrige pour moi le tir sur ce nouveau Leo. Premièrement, le film démarre direct sur les chapeaux de roues avec d’entrée une scène qui va nous annoncer la couleur de ce qui va venir avec une hyène enragée qui court dans les rues d’une petite ville en déchiquetant tout ce qui se met sur son passage. Et surtout le choix de l’acteur principal, la super star Tamil, Vijay Thalapathy. Certes Vijay n’est pas un artiste martial ou un pratiquant de sports de combat mais au moins il est beaucoup plus jeune que Kamal Haasan et surtout c’est un super danseur ce qui le rend bien plus crédible dans les scènes de bagarre car il est plus vif et plus agile, plus souple dans sa gestuelle. Donc pour moi, Leo reprend toutes les qualités du précédent Vikram avec la plupart de ses défauts en moins.

Alors n’allons pas par quatre chemins, si vous ne connaissez pas du tout le cinéma de genre indien, Leo n’est pas vraiment la meilleure des portes d’entrée, sans doute trop déstabilisant pour un non initié. Si vous n’aimez pas le cinéma indien en règle générale, vous n’aimerez sans doute pas Leo. Et si pour vous le visionnage du pourtant très plébiscité RRR a déjà été une souffrance et bien Leo sera certainement un nouveau calvaire pour vous. Bien que le cinéma Tamil soit très différent du cinéma de Bollywood, les différents cinémas régionaux indiens partagent quand même un certain nombre de spécificités entre eux. Ces spécificités devenues une véritable marque de fabrique pour toute une industrie, et même l’affirmation d’une identité culturelle, continuent d’être considérées par beaucoup comme des tares. Effectivement, on a le droit de pas aimer les scènes dansées / chantées dans un film, on a le droit d’être allergique aux ralentis à la Zack Snyder à la moindre petite claque ou bousculade ou de détester les effets clipesques à outrance dans le cinéma. Oui Leo c’est tout ça, c’est un long clip épuisant de 2h40, qui enchaine les effets de style, avec une musique envahissante rock/éléctro qui contribue pleinement à la narration mais qui donne encore plus cette impression d’être devant un clip interminable. Et puis il y a aussi de vilains CGI dans Leo, une hyène numérique pas trop mal faite mais aussi une course poursuite en voiture immonde, quasi-irregardable tant ça fait jeux vidéo. Les féministes passeront aussi leur chemin. Le seul rôle féminin, la femme du héros, est une nunuche comme ce n’est pas permis. Elle voit son mari massacrer dix gros gangsters à mains nues et continue à croire ses bobards, sans jamais se demander où il a bien pu apprendre à se battre aussi bien. Et puis passons aussi sur le scénario, remake du History of Violence de Cronenberg, qui de toute façon n’est qu’un prétexte à un déferlement de violence gratuite.

Personnellement, j’ai adoré Leo pour les mêmes raisons que j’avais adoré RRR, c’est un film too much, excessif, qui va toujours plus loin à chaque nouvelle scène d’action. Toujours plus de violence, toujours plus d’idées folles, pour les amateurs de cinéma bourrin, débordant de testostérone, Leo est un sacré plaisir régressif. Vijay massacre des gangsters par centaines (oui oui des centaines), casse des bouches à coups de marteau, ouvre des cranes à coups de hache, égorge, casse des poignets et utilise tout ce qu’il a sous la main pour détruire ses adversaires : chaises, verres mais aussi gentes, pots d’échappement, tout est bon pour casser du vilain, des vilains d’ailleurs qui ont tous des têtes de bouchers. Parfois il envoie aussi des coups de pied volants comme Neo dans Matrix ou flingue avec son six coups comme Clint dans les Sergio Leone. Oui, Leo n’a pas de limite dans sa volonté de proposer un spectacle jouissif, quitte à flirter constamment avec le grand guignolesque. Générosité qui atteint son point culminant lors de la scène de danse du milieu de film où des centaines de figurants accompagnent Vijay dans sa chorégraphie sur le tube Naa ready. Une scène qui aurait fait pleurer de joie Michael Jackson s’il avait été encore vivant. Je me demande encore d’ailleurs comment ils ont réussi à synchroniser autant de monde sur un même plan. Toute la deuxième partie du film est du même acabit avec une baston générale géante dans un hangar, filmée en partie en plan séquence à l’aide d’un drone et un final qui repousse les limites du carnage cinématographique. Cette fois c’est pas Michael Jackson qui aurait été fier mais Chang Cheh. Ajoutez à cela la présence de Sanjay Dutt en grand bad guy, monstrueux de charisme, prototype du parfais méchant de cinéma et une prestation tout à fait honorable de Vijay, habituellement plus connu pour ses talents de danseur (c’est sans doute le meilleur dans ce domaine dans toute l’industrie indienne) que pour ses talents d’acteur et vous obtenez peut-être la parfaite série B. Une série B aux allures de blockbuster et hautement chargée en curry et autres épices mais quel spectacle ! Et c’est aussi ça la force de Leo : sa saveur. Est-ce que ce nouveau cinéma de genre indien apparu il y a tout juste quelques années avec des films comme La Légende de Bahubali, RRR, KGF, Kaithi, Vikram ou Leo inventent quelque chose ? Pas vraiment en fait, ni dans leur façon de concevoir l’action, ni dans leur langage cinématographique. Ces films inventent quelque chose, mais à travers leur esthétique, leurs acteurs, leur utilisation de la musique. Ces films apportent une toute nouvelle saveur et sont clairement dépaysant, proposant une véritable alternative au cinéma Coréen qui tourne en rond, au cinéma Sino/Hongkongais prisonnier de la censure et au cinéma Américain qui semble bien avoir du mal à tourner la page du chapitre super-héros.

LES PLUS LES MOINS
♥ Généreux
♥ Violent
♥ Complètement fou
♥ Le passage dansé déjà culte
⊗ Trop long
⊗ Les CGI affreux
⊗ La réalisation clipesque fatigante

Leo est un spectacle barbare, violent et démesuré. Une démesure à l’image de son passage dansé génial sur le tube Naa ready. Lokesh Kanagaraj vient rejoindre avec cette folie cinématographique S.S. Rajamouli au club des réalisateurs de film de genre dont on attend beaucoup à l’avenir.



Titre : Leo
Année : 2023
Durée : 2h41
Origine : Inde
Genre : Action / Boucherie
Réalisateur : Lokesh Kanagaraj
Scénario : Sam Curtain, Benjamin Jung-Clarke

Acteurs : Vijay Thalapathy, Sanjay Dutt, Arjun Sarja, Trisha Khrishnan, Gautham Vasudev Menon, Madonna Sebastian

Leo (2023) on IMDb


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Auteur : Nasserjones

Fan névrosé de cinéma HK, élevé aux girls with guns et heroic bloodsheed, j'essaye depuis quelques années de me soigner comme je peux en m'ouvrant un peu plus à des films plus intimistes et différents. Des Philippines au Kazakhstan, de la Corée à l'Indonésie, je poursuis tant bien que mal mon auto-thérapie.
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