[Film] L’Enfer des Armes, de Tsui Hark (1980)


Trois étudiants renversent un passant en voiture, ils s’enfuient, paniqués. Wan-Chu assiste à la scène et les fait chanter. La jeune fille, portée par un nihilisme radical, les embringue dans des actions de plus en plus dangereuses. Leur route croise celle de trafiquants d’armes.


Avis de Oli :
Troisième film de Tsui Hark après deux premiers retentissants échecs commerciaux (Butterfly Murders et Histoires de Cannibales), L’Enfer des Armes n’est pourtant pas le film de la consécration pour son réalisateur, et encore moins l’œuvre qui va contribuer à assagir le turbulent jeune auteur.

Le film de Tsui Hark a ainsi connu une histoire assez rocambolesque il faut bien l’avouer, une sortie à rebondissements que beaucoup d’amateurs de cinéma HK connaissent aujourd’hui sur le bout des doigts aussi me contenterai-je de résumer toute l’affaire : jugeant le film trop violent et surtout trop axé sur la réalité de certains faits (explosions de bombes dans les cinémas, rebellions d’une certaine jeunesse, …) Tsui Hark fut contraint de remonter complètement son film et de retourner de longues scènes afin d’orienter son histoire dans une direction toute autre que celle envisagée préalablement : si dans l’histoire originale les trois étudiants sont de naïfs poseurs de bombe, dans le film remonté et charcuté ils se transforment en simples gamins ayant pris la fuite après avoir renversé un passant en voiture. Le montage original retrouvé à l’époque par l’équipe de HK Video et reproposé ici par Spectrum Films rend donc enfin hommage au film tel que Tsui Hark l’avait tourné à l’époque : il s’agit donc d’un objet rare, qui permet également d’envisager le problème de la censure avec de véritables preuves à l’appui (les 2 montages sont présents sur l’édition).Passé la joie des retrouvailles avec un film oublié, on peut alors calmement mais sûrement se pencher sur la valeur intrinsèque d’une telle œuvre, ovni inespéré par beaucoup, qui fit couler encore plus d’encre que de sang sur les écrans.

Eh bien le film original est bon, néanmoins je ne peux pas crier au chef d’œuvre, il faut dire aussi que ce film, sacralisé avant l’heure comme un Graal trop vite enterré, avait sans doute trop fait parler de lui : aussi m’attendais-je à une claque monumentale, qui n’est hélas jamais venue. A dire vrai, seul le climax final m’a véritablement fasciné, scotché au fauteuil avec les yeux écarquillés. Pour le reste, si le film se suit bien évidemment sans déplaisir, je dois avouer n’avoir goûté qu’à moitié les choix musicaux de certaines scènes (bien entendu les partitions de J.M Jarre, mais pas uniquement), ni le jeu de la plupart des protagonistes, si brouillon qu’il rend difficile l’implication du spectateur dans le film, parfois même les caricatures sont si extrêmes (les personnages américains) qu’un tueur effrayant nous apparaît alors comme un stupide bouffon. Trop souvent comparé à l’Orange Mécanique de Stanley Kubrick, L’Enfer des Armes de Tsui Hark peine à se rapprocher de son glorieux aîné. Et si l’on s’amuse encore à effectuer un parallèle entre les deux œuvres, il convient de ne pas oublier qu’Orange Mécanique est sans nul doute le film de Kubrick qui a le plus mal vieilli. En ira-t-il de même avec le long métrage de Tsui Hark ? Je vous laisse seul juge, mais force est de constater qu’il n’est pas toujours évident de se prendre d’affection pour tous ces personnages surjouant à outrance, placés qui plus est dans un contexte qui encaisse mal le choc des années.

LES PLUS LES MOINS
♥ Le climax final
♥ Le côté nihiliste
♥ La mise en scène chaotique
♥ Un tournant dans la carrière de Tsui Hark
⊗ Un jeu d’acteur aléatoire
⊗ Certains choix musicaux
L’Enfer des Armes reste un film à voir : sauvage, nihiliste, il saura vous captiver pour peu que vous n’accordiez pas trop d’importance à ses quelques défauts. Il constitue également un évènement majeur de la carrière de Tsui Hark, jeune et talentueux cinéaste alors en conflit avec le public de l’époque : et tandis que des étudiants posaient des bombes dans les cinémas, Tsui Hark les imita mais c’est sur le plan artistique qu’il envoya tout voler en éclats.


L’ENFER DES ARMES est sorti chez Spectrum Films en Blu-ray, accompagné de la version Director’s Cut, au prix de 30€. Il est disponible à l’achat ici : Spectrumfilms.fr

En plus du film, on y trouve : Présentation de Arnaud Lanuque, Commentaire audio de Podcast on Fire, Interviews de Albert au, Paul Cheu, O Sing Pui, Tsui Hark, Szeto Cheuk-Hon et Kristof Van Den Troost, la Director’s Cut selon Tsui Hark, et bande annonce.



Titre : L’Enfer des Armes / Dangerous Encounter – 1st Kind / Don’t Play With Fire / 第一類型危險
Année : 1980
Durée : 1h34
Origine : Hong Kong
Genre : Noir c’est noir
Réalisateur : Tsui Hark
Scénario : Tsui Hark, Szeto Cheuk-Hon

Acteurs : Lo Lieh, Lin Chen-Chi, albert Au, Ray Lui, Ada Fung, Lung Tin-Sang, Paul Che, Leung Po-Chi, Ronny Yu, John Shum, Tsui Hark, Alex Cheung, Terry Tong, Stephen Shin

Dangerous Encounters of the First Kind (1980) on IMDb


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Auteur : Oli

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