L’histoire d’une famille prisonnière des désordres politiques dans la Chine des années 50, lorsque le Communisme balayait encore les gens comme le vent emporte de simples feuilles de papier. Et peut-être aussi les cerfs-volants.
Avis de Oli :
Le film débute en 1953 et la mort de Staline. Le réalisateur s’attardera bien entendu sur le « Grand Bond en avant » de 1958, pour achever son récit quelques années plus tard, avec l’avènement de la « Révolution Culturelle » et ses purges dans tous les milieux sensiblement de droite (ou perçus comme tel).
La courageuse Shujuan (sublime Liping Lu, vue plus récemment dans le film LOVE WILL TEAR US APART) va faire face à tous les obstacles, lutter contre toutes les formes d’oppression, dans un seul et unique but : protéger son fils, Tietou. Très vite, elle va être amenée à faire preuve de force et de courage, quand son mari (interprété avec beaucoup de simplicité par Lu Quanxin) va être victime de la « Campagne des Cent Fleurs » en 1957. Il s’agissait en l’occurrence de donner la parole à tous les Chinois lors d’audiences publiques, afin que chacun puisse faire avancer le régime à partir d’observations et de critiques constructives. On sait ce qu’il est advenu après de tous ceux qui sont tombés dans le piège, puisque la plupart ont disparu, renvoyés au loin dans les campagnes afin de subir une revigorante rééducation. Un joli mot pour définir d’impitoyables déportations.
Famines, misères, hypocrisie, répressions, délations, la liste des maux qui ont bercé l’histoire de la Chine durant ces quelques dizaines d’années mériterait encore d’être allongée. Et il faut croire que les vieux démons ne meurent jamais, puisque LE CERF-VOLANT BLEU fut interdit dans son pays, et le réalisateur, Tian Zhuangzhuang, interdit d’exercer son métier pendant plusieurs années. Ce n’est ainsi que neuf ans plus tard, soit en 2002, qu’un nouveau long métrage de Zhuangzhuang voit le jour. Tian Zhuangzhuang fait partie de la même génération de cinéastes que Zhang Yimou, et tous deux ont visiblement subi d’importants traumatismes (on comprend aisément pourquoi). Quand on sait que Tian Zhuangzhuang lui-même a dû endosser l’uniforme de Garde Rouge pendant la « Révolution Culturelle », les images du film acquièrent encore plus de force. Ces hommes et ces femmes qui n’hésitèrent pas à s’en prendre à des malades, des femmes et même des enfants, la caméra de Tian Zhuangzhuang les condamne certainement, comme il se condamne lui-même pour ce qu’il a dû faire au nom d’un certain petit Livre Rouge. A l’époque il n’y avait certainement pas beaucoup de solutions pour s’en sortir : il fallait plier… ou rompre.
Le film de Tian Zhuangzhuang relate donc ces choix difficiles qu’ont eu à faire des millions de Chinois, tous ceux qui ne se reconnaissaient pas dans ce Communisme-là. Pouvait-on … peut-on vivre libre et heureux quand on doit supporter le poids d’un régime comme celui qui nous est décrit ? Tian Zhuangzhuang semble vouloir répondre par l’affirmative, puisque le titre de son film renvoie directement à la notion de liberté : malgré les attaches qui le maintiennent prisonnier, le cerf-volant parvient ainsi à s’envoler et à naviguer entre les vents… même si parfois il lui arrive de s’échouer contre des branches, malencontreusement. Le film de Tian Zhuangzhuang est donc une incontestable réussite, il brasse les années et les époques (un peu à la manière du VIVRE ! de Zhang Yimou), en immergeant dans les désordres historiques des familles volontaires mais oppressées.
| LES PLUS | LES MOINS |
| ♥ Lourd de sens ♥ Émotionnellement intense ♥ Liping Lü, sublime |
⊗ … |
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| On ressort ainsi du film les poings serrés, hésitant entre l’envie de vomir et de pleurer. On en revient également avec une certitude : celle que les gens simples peuvent aussi être les plus beaux. | |
Titre : Le Cerf-Volant Bleu / Lang Feng Zheng
Année : 1993
Durée : 2h20
Origine : Chine
Genre : Drame historique
Réalisateur : Tian Zhuangzhuang
Scénario : Xiao Mao
Acteurs : Tian Yi, Wenyao Zhang, Xiaoman Chen, Liping Lü, Quanxin Pu, Xuelian Li, Baochang Guo, Ping Zhong, Quanzhong Song, Hong Zhang, Yanjin Liu
