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L’histoire d’une alcoolique, Abby, dont le mariage a connu des moments difficiles. Elle se sépare de son mari Brian et part vivre dans la maison de campagne de ses parents. Lorsqu’Abby y arrive, les choses prennent une tournure sombre. Elle est prise en otage par deux trafiquants de drogue qui fuient la police et doit faire tout ce qu’elle peut pour rester en vie.
Avis de Cherycok :
J’aime bien me lancer dans des films complètement au hasard, sans rien connaitre en avance, en ayant juste un titre et une affiche en tête. Et j’adore quand je ressors enchanté du visionnage, avec cette impression d’être tombé sur un petit film dont personne ne parle et qui pourtant vaut le détour. C’est ce qui s’est passé avec Last County, premier long métrage de Barret Mulholland après un court métrage en 2019, Grip, film qui a gagné plusieurs prix dans divers festivals tels que le Borrego Springs Film Festival ou encore le Blood in the Snow Canadian Film Festival. Des festivals de seconde zone me direz-vous. Peut-être. Mais il y a gagné des prix quand même, et lorsqu’on regarde les 1h23 de ce néo-western qui aurait croisé la route d’une comédie noire, ces prix semblent justifiés. Oui, même si Last County ne prétendra pas à l’Oscar du meilleur film, cette petite série B vaut clairement que l’amateur du genre s’y attarde.
Le scénario pourra paraitre classique au début, un home invasion où deux hommes, dont un blessé, pénètrent dans la maison d’une femme seule, mais ça va prendre une tournure différente et même surprendre dans son dernier acte. C’est certain, ça n’invente pas l’eau tiède, ça rappelle parfois le cinéma des frères Coen ou le Assaut de John Carpenter, mais c’est bougrement efficace. Le scénario est tendancieux dans le sens où à aucun moment il ne rend les « méchants » réellement méchants (il les rend même attachants) et où, à l’inverse, les policiers sont à moitié ripoux et donc forcément antipathiques. Le réalisateur prend un malin plaisir à brouiller la frontière entre les gentils et les méchants, entre le bien et le mal, et c’est en partie ce qui tient en haleine le spectateur tout le long du film, le rendant imprévisible sur certains points. L’un des braqueurs a une attitude très humaine, aussi bien envers son comparse qu’avec l’héroïne qu’ils prennent quelque part en otage. Les Policiers semblent bien plus intéressés par se mettre dans les poches l’argent des braqueurs que par faire régner une vraie justice dans leur conté. L’ensemble est teinté d’humour noir qui ne sert pas à désacraliser certains moments durs comme on le voit parfois, mais pour amener un peu de légèreté le temps de quelques secondes de temps à autres dans un film qui n’hésite pas à aller dans la violence parfois même assez graphique, en particulier dans le dernier acte virant au bain de sang avec des victimes qui vont s’entasser. Mais l’équilibre entre cet humour et la violence n’est pas toujours au point, comme s’il y avait parfois un décalage, comme si le réalisateur avait compris les codes mais qu’il n’avait pas su bien les appliquer, avec par exemple des policiers un peu trop caricaturaux.
Le scénario est savamment écrit et sait exactement quoi faire de ses personnages, en particulier celui de son héroïne, Abby, qui ne cherche qu’à en finir avec ce cauchemar, arrivant à trouver en elle-même suffisamment de résilience pour devenir quelqu’un qu’elle ne pensait pas pouvoir être. Il ne tombe pas dans le piège de la romance facile agresseur / agressé bien qu’il essaie de nous le faire croire par moments. Barret Mulholland sait parfaitement gérer son suspense au fur et à mesure que le film avance et que l’étau se resserre sur cette maison qui, finalement, subit un double assaut. Le rythme est savamment géré, sans aucun temps mort, le tout étant accompagné d’une excellente bande son qui va se faire de plus en plus intense à mesure que l’action avance et que le personnage d’Abby se retrouve acculé. Le tout est servi par une photographie très propre, peut-être un peu terne par moments, et par une mise en scène simple mais très efficace qui sert parfaitement le scénario. On comprend que le budget est mince, avec cette maison perdue au milieu dans la campagne en guise de quasi seul lieu de l’action, mais à aucun moment Last County ne parait kitch ou lowcost. Le casting participe à la réussite du film, avec des acteurs au jeu impeccable qui arrivent pour certains à amener beaucoup d’humanité à leurs personnages, aussi bien les deux premiers antagonistes, qui ne le seront au final pas tant que ça, et la relation qu’ils ont entre eux et avec le personnage d’Abby, mais aussi et surtout cette dernière interprétée par Kaelen Ohm (la série From) qui livre une prestation très intense dans laquelle chacune des émotions de son personnage est parfaitement lisible dans son regard, capturant l’essence d’une femme devant lutter contre ses démons internes (son alcoolisme) et externes (ses agresseurs).
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Très bon casting ♥ Bien rythmé ♥ Le dernier acte brutal ♥ Des personnages attachants |
⊗ Des policiers caricaturaux ⊗ Une photo parfois un peu fade |
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Jolie petite surprise que ce Last County, croisement entre le néo-western et la comédie noire, rejeton du cinéma des frères Coen et du Assaut de John Carpenter, qui en 1h23 propose un très bon divertissement. Une série B de choix. |
Titre : Last County
Année : 2024
Durée : 1h23
Origine : Canada
Genre : Neo-western à l’humour noir
Réalisateur : Barret Mulholland
Scénario : Matthew Kohnen, Sean Kohnen
Acteurs : Kaelen Ohm, Gord Rand, Nicholas Campbell, Keaton Kaplan, Benjamin Blais, Dayton Sinkia, Josh Cruddas, Pedro Miguel Arce, Antonina Battrick, Rodrigo Fernandez-Stoll