[Film] La Disparition, de Stuart Cooper (1977)


Jay Mallory, tueur à gages, se retrouve déstabilisé lorsque sa femme, Celandine, disparaît sans explication. Cherchant désespérément à la retrouver, il plonge dans une enquête qui révèle des aspects troublants de sa propre vie. Tandis qu’il tente de percer le mystère, il se rend compte que rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît, et que sa quête pourrait le mener vers des vérités inattendues.


Avis de Cherycok :
Ce qui est bien lorsqu’on travaille avec des petits éditeurs, c’est qu’ils permettent de découvrir des films méconnus ou oubliés, en leur donnant de très jolies éditions blu-ray, parfois remplies de bonus. On sent leur amour pour ces films, et on ne peut que saluer le courage de le proposer à un public certes de niche, avec des éditions parfois limitées à 1000 exemplaires, afin qu’il soit découvert dans les meilleures conditions possibles. C’est ce que fait MDC Films en proposant des bobines telles que Miami Blues (1990), Dark Angel (1990) ou encore L’Esprit de la Mort (1972), des films qui méritent que le cinéphile averti (ou non) s’y intéresse de près. Et c’est le devoir des sites internet de venir compléter le travail des éditeurs sur les réseaux sociaux en proposant des textes un peu plus fournis sur ces films. Alors on va parler aujourd’hui d’une autre sortie MDC Films, un film certes particulier mais injustement boudé à sa sortie en 1977, à savoir La Disparition avec Donald Sutherland dans une de ses meilleures performances.

Basé sur le roman Echoes of Celandine de Derek Marlowe, La Disparition a été un projet compliqué dès le départ. Le film a dépassé son budget pendant le tournage et a failli ne pas voir le jour. Il ne doit son salut qu’à une collecte de fonds à laquelle ont participé le producteur Jake Eberts et même Donal Sutherland lui-même afin que le film puisse sortir. Malheureusement, ça sera un énorme échec au box-office ricain. La narration du film, non linéaire, pourra en perdre plus d’un. Le film fait sans cesse des allers retours entre le présent le passé, nous amenant ainsi soit des pièces du puzzle, soit de la profondeur aux personnages et au scénario. On comprend malgré tout ce qu’il se passe, mais il n’y a jamais quelque chose (comme un filtre) qui permette de rapidement différencier les deux époques, ce qui oblige une réelle mécanique du cerveau et ne rend pas forcément le film facile d’accès pour un public novice, bien que cela avait déjà été fait par le passé sur des films tels que Hiroshima Mon Amour (1959), Le Point de Non-Retour (1967) ou encore Ne Vous Retournez Pas (1973). Il existe d’ailleurs plusieurs versions du film, la version originale du réalisateur de 101 minutes, la version la plus connue d’une durée de 91 minutes, mais également une version américaine de 81 minutes, non autorisée, qui tente de remettre le récit dans un ordre plus cohérent afin de réduire sa complexité, diminuant la fréquence des flashbacks et leur durée. Le réalisateur du film, Stuart Cooper, déteste d’ailleurs cette dernière version, la qualifiant de désastre, expliquant sans doute son échec sur le territoire de l’Oncle Sam, mais a approuvé la version de 91 minutes, bien qu’il ne sache pas qui l’a réellement supervisée.

Le rythme du film est relativement lent, du moins dans sa première moitié, mais sans que cela ne soit réellement gênant, le réalisateur prenant le temps de bien planter son décor, la psychologie de ses personnages, et de bien commencer à semer la zizanie dans le cerveau des spectateurs avec sa narration éclatée. Dans la deuxième moitié, tout s’accélère au fur et à mesure qu’il permet aux spectateurs de recoller les morceaux et de comprendre ce qui se trame réellement derrière tout ça. Mais une chose est sure, c’est que du début à la fin, le film est intrigant car, bien que les différents ingrédients narratifs soient familiers, la plupart des points de certitude sont absents, et c’est sans doute voulu. Le récit est sombre, froid, et le réalisateur joue sur les changements d’humeur et sur l’ambiguïté des tons qu’il va employer. Certaines scènes pouvant sembler légères (les moments entre notre héros et sa femme) jonglent parfois avec deux tonalités différentes et peuvent même être lourdes de sens. Mais il joue également avec les émotions de son personnage principal, tueur au sang-froid, qui va soudainement vivre des émotions inédites lorsque sa femme disparait. Il se faits soudain plus nerveux, plus hésitant.

La mise en scène froide est réussie, bien dans le ton du film, et surtout de son protagoniste principal, avec en particulier la photographie élégante de John Alcott, chef opérateur sur Barry Lyndon ou encore The Shining, qui capture magnifiquement les décors tout aussi froids que le reste, aussi bien parce que film se passe dans des lieux enneigés du Canada et dans la froideur de l’Angleterre, mais aussi par les sites utilisés, comme cette gigantesque maison ou ces immeubles presque futuristes. Les nombreux plans fixes sans parole ont beau parfois être déroutants, Ils renforcent pourtant cette ambiance particulière qui est cultivée dès les premières secondes, le tout étant accentué par une excellente musique lancinante au piano qui reflète la tension du film. Donald Sutherland en impose dès sa première apparition avec son charisme particulier et livre une très bonne performance. L’alchimie qui se dégage de son duo avec Francine Racette, qui deviendra sa femme dans la vraie vie, est palpable et ils arrivent à faire ressortir toutes les émotions parfois ambigües de leurs personnages. Cette situation de mari à la recherche de sa bien-aimée est immédiatement crédible malgré l’interrogation qui va peser tout le long du film : Pourquoi a-t-elle disparu ? On regrettera malgré tout de ne pas réellement savoir les raisons pour lesquelles le personnage de Sutherland est devenu tueur à gage, mais on comprend que sa relation passionnée avec sa femme lui permet de garder toute sa tête face au meurtre lorsque des signes d’épuisement et son désir de quitter la profession arrivent.

LES PLUS LES MOINS
♥ L’ambiance
♥ La musique
♥ La tension qui monte crescendo
♥ Un bon jeu d’acteurs
♥ Bien mis en scène
⊗ Une narration difficile d’accès
⊗ Un rythme qui pourra rebuter

Bien qu’il puisse être un peu difficile d’accès au premier abord avec sa narration déroutante, La Disparition est un bon thriller sombre et froid dans lequel Donald Sutherland livre une très bonne prestation. Une bonne pioche !

LE SAVIEZ VOUS ?
• On voit Donald Sutherland fumer tout au long du film, alors qu’il était, dans la vraie vie, un farouche opposant au tabagisme et qu’il n’aimait pas que des fumeurs s’approchent de lui.


LA DISPARITION est sorti chez MDC Films en blu-ray au prix de 20. Il est disponible à l’achat ici : https://mdcfilms.myshopify.com/

Spécifications techniques : 1.85:1 respecté (Version Cinéma) – 1.33 (Version Director’s Cut) – 24p – Encodage AVC. Audio : Anglais en DTS-HD Master Audio 2.0 et Français en DTS-HD Master Audio 2.0. Sous-titres : Français (nouvelle traduction).

En plus du film, on y trouve :  Le film en VHS Vision (VF, 1h28), Introductions du réalisateur sur les deux versions du film (2min), Stuart Cooper : Avant la Disparition (27min), Stuart Cooper : Mémoires d’une Disparition (58min), Piste musicale isolée, Extrait de la version remontée américaine avec une bande originale différente (15min), Galerie Photos, Bandes annonces, Bandes annonces MDC Films.



Titre : La Disparition / The Disappearance
Année : 1977
Durée : 1h31
Origine : Angleterre / Canada
Genre : Thriller psychologique
Réalisateur : Stuart Cooper
Scénario : Paul Mayersberg, Derek Marlowe

Acteurs : Donald Sutherland, Francine Racette, David Hemmings, John Hurt, David Warner, Peter Bowles, Virginia McKenna, Christopher Plummer, Michele Magny

The Disappearance (1977) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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