Au Texas, Chris, délinquant à la petite semaine, doit rembourser 6 000 dollars dans les plus brefs délais. Pour s’acquitter de ses créances, il met au point, avec l’aide de son père Ansel et de sa belle-mère Sharla, un plan complètement glauque et tordu : engager un tueur professionnel afin de liquider sa propre mère et ainsi empocher l’assurance-vie par l’intermédiaire de sa petite sœur Dottie, seule héritière désignée. Pour exécuter le contrat, Chris contacte alors un inspecteur de police qui se trouve être tueur à gages à ses heures perdues, Killer Joe.
Avis de Rick :
William Friedkin, a 80 ans passé, a toujours une sacré patate. Non content de nous avoir livré bon nombre de films cultes par le passé (pour n’en citer que quelques uns : French Connection, L’Exorciste, Le Convoi de la Peur, La Chasse, Police Fédérale Los Angeles), sa carrière trouve un nouveau souffle en 2006 lorsqu’il s’allie avec Tracy Letts. Dramaturge Américain, l’homme avait commencé en livrant en 1993 la pièce de théâtre Killer Joe, puis Bug en 1996. Ça tombe bien, puisqu’avec Friedkin, ils adaptent en 2006 Bug, ce qui nous donnera un film sur la folie jusqu’en boutiste, totalement fou et dérangeant, et qu’ils retravaillent ensembles en 2011 pour adapter Killer Joe. Ici, pas de film sur la folie ou sur l’enfermement, mais encore un grand portrait de personnages, une ambiance poisseuse, un film d’une violence inouïe qui débarque quand on ne l’attend pas. Et putain de merde, que c’était bon à la première vision, et que c’était bon à la seconde. Killer Joe, c’est un grand portrait de loosers du Sud, de tarés, de psychopathes en puissance. Chris (génial Emile Hirsch, que l’on a revu en 2016 dans The Autopsy of Jane Doe) doit 6 000 dollars à un trafiquant du coin. Sauf qu’il ne les a pas, sa mère ayant préféré lui voler sa drogue pour la revendre et réparer sa voiture. La solution dans un premier temps ? Aller voir son père, qui a refait sa vie avec une nouvelle femme, pour lui emprunter de l’argent. Sauf que le père, Ansel, vit une petite vie paisible et n’a pas un sous, vivant du peu qu’il a avec sa femme peu pudique (ouvrant la porte à poil en plein milieu de la nuit) et son autre enfant, Dottie (géniale Juno Temple). Immédiatement donc, solution numéro 2, engager un tueur à gage nommé Killer Joe pour assassiner la mère et récupérer l’argent de l’assurance.
Oui, Killer Joe est un portrait de personnages pas franchement amicaux. Chris pense au meurtre pour régler ses dettes, le père Ansel le suit immédiatement dans l’aventure, la belle mère est vulgaire, crue et passe son temps à crier. Dans ce milieu, Dottie paraît innocente, honnête, et donc folle, puisque la jeune femme dit les choses comme elles viennent, étant franche en toute circonstance, paraissant du coup par moment beaucoup plus jeune que son âge, et à d’autres beaucoup plus mature et âgée. L’Amérique profonde quoi. Et bien entendu, il y a Killer Joe, énorme Matthew McConaughey, dingue, presque toujours calme, effrayant. Killer Joe est clairement un film de personnages, ceux-ci sont pourris, mais sont forts, hypnotisants, effrayants et attirants à la fois. Et il fallait bien ça, puisqu’au final, oui, Killer Joe a une histoire simple, celle de la tentative de meurtre sur quelqu’un, meurtre qui bien entendu tourne mal et amène des rebondissements. Une histoire classique, mais avec des êtres la peuplant qui relancent l’intérêt et un réel talent dans l’écriture des situations, mais surtout dans la manière de les mettre en image. Soyons clair, Friedkin maîtrise sa mise en scène, l’ambiance entre le bon vieux film noir et le western détonne, l’éclairage est souvent magnifique. Alors quand en plus, les acteurs sont parfaits et le ton entre violence trash et humour noir nous hypnotise, que demander de plus ?
Oui, Killer Joe n’est pas a mettre entre toutes les mains, d’ailleurs son interdiction en France au moins de 12 ans est peut-être un peu légère, tant la violence éclate souvent, peu importe qu’elle soit psychologique ou visuelle. Car les deux sont présentes, Killer Joe prenant son temps pour nous montrer le vrai visage des personnages, avant d’éclater totalement dans sa dernière demi-heure quitte à briser quelques tabou en cours de route pour notre plus grand plaisir, partant alors dans une violence visuelle radicale, surprenante, et donc choquante. C’est dans ces moments de violences intenses que chaque personnage révèle sa vraie nature. Et croyez-moi, la vraie nature des personnages fait peur. L’innocence pourtant présumée de Dottie n’a pas sa place dans le métrage, elle parait comme une enfant certes, mais une enfant qui ne demande qu’à exploser. Joe tout le long du film nous parait flippant même dans les moments calmes, ne demandant qu’à se déchainer dés que la situation tournera à son avantage. Au final, seul le père, Ansel, semble normal, conscient de la situation et de sa situation, et ne voulant absolument pas plus. Sa petite vie dans une caravane avec sa bière, sa télé et son poulet frit lui suffit. Seulement dans un tel univers, être trop gentil se paye également. Alors oui, Killer Joe n’est pas pour tout le monde, il est sans concession, choquant, violent, vulgaire. Et bordel que c’était bon !
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Des acteurs remarquables ♥ Une ambiance poisseuse ♥ Les excès de violence surprenants ♥ Très bien écrit |
⊗ Voilà bien un film qui va déstabiliser |
Killer Joe, c’est du très grand Friedkin. Sombre, poisseux, violent psychologiquement mais également physiquement, prenant, effrayant mais attirant à la fois. |
Année : 2011
Durée : 1h42
Origine : U.S.A.
Genre : Policier
Réalisation : William Friedkin
Scénario : Tracy Letts
Avec : Matthew McConaughey, Emile Hirsch, Juno Temple, Thomas Haden Church, Gina Gershon et Marc Macaulay
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