Inspiré de l’histoire vraie de Jann Mardenborough, le film retrace la concrétisation d’un rêve – celui d’un adolescent adepte de Gran Turismo qui, grâce à ses talents de gamer, a remporté une série de compétitions organisées par Nissan et a fini par devenir un véritable pilote de course.
Avis de Cherycok :
Neill Blomkamp a impressionné le monde entier avec son premier film, District 9, dans lequel il faisait un parallèle avec la ségrégation raciale qu’a connu son pays, l’Afrique du sud. Propulsé immédiatement nouvelle coqueluche de Hollywood, la suite de sa carrière a déçu. Elysium et Chappie ont beau avoir tous les deux de nombreuses qualités, ils n’ont pas eu le succès critique et public espéré, au point que les nouvelles envies de Blomkamp, des nouveaux films Alien et Robocop, ont rendu les producteurs très frileux. Blomkamp revint au pays et créa sa petite boite de prod, Oats Studios, et avec des outils technologiques de pointe, s’est mis à faire des courts et moyens métrages disponibles gratuitement sur Youtube tels que Rakka, Zygote ou Firebase. Après une tentative timide, mais surtout assez catastrophique, de revenir sur le devant de la scène en passant par la petite porte avec Demonic, il accepte le projet plus commercial Gran Turismo, initié en 2013 mais relancé en 2022, adaptation de la série très lucrative (90M d’exemplaires vendus) de jeux vidéo du même nom. Alors oui, on se méfie tous des adaptations de jeux vidéo tant les bouses sont nombreuses, mais on a parfois droit à de bonnes surprises comme le très bon Tetris sorti cette année. Et puis, Blomkamp a une revanche à prendre sur l’industrie hollywoodienne qui est capable d’effacer des noms aussi vite qu’elle les a mis en lumière.
Comme pour Tetris, ce film n’adapte pas Gran Turismo à proprement parler. Gran Turismo est une simulation de voiture et il n’y a pas de scénario. Là où Tetris choisissait de raconter la création rocambolesque du jeu en lui-même, Sony choisit ici de raconter une histoire vraie et tout aussi folle autour de sa saga vidéoludique, celle du projet un peu fou d’un homme d’affaires de créer une académie, la GT Academy, dans laquelle il fera venir les meilleurs pilotes virtuels des jeux Gran Turismo pour au final n’en sélectionner qu’un. Il est persuadé que, en plus d’être un gigantesque coup de comm, ce pilote connaissant les circuits par cœur à force de parties dans le jeu pourrait devenir un vrai pilote et courir avec les meilleurs pilotes de courses de grand tourisme. Gran Turismo est un film biographique retraçant le parcours un peu fou de Jann Mardenborough, un adolescent fan jusqu’au bout des ongles de la célèbre saga de Polyphony Digital qui, grâce à ses talents dans les jeux gagne la GT Academy, et est embauché par Nissan pour son programme GT. Là, alors que personne ne croit en lui et qu’il est moqué voire raillé par les vraies personnes du métier, il est pris en charge par un ancien pilote professionnel pour le driver et se met à gagner des courses après des débuts difficiles. Aujourd’hui âgé de 32 ans, devenu pilote de course professionnel, il a participé à plus de 200 courses dans les domaines de la Formule 3, la Super Formula, ou encore la Super GT, et il a même participé aux 24 Heures du Mans. Comme quoi, jouer aux jeux vidéo, ça mène à tout. Afin de rendre le film le plus authentique possible, Jann Mardenborough est co-producteur du film mais également consultant principal de Gran Turismo. Il a également doublé Archie Madekwe, qui l’incarne, lors de certaines cascades motorisées. Bien que le film a suscité une controverse pour son utilisation de son accident en 2015 au Nürburgring Nordschleife qui a tué une personne du public, Mardenborough a insisté pour que cette scène soit présente dans le film, pour plus de fidélité aux vrais évènements. Le film n’est pas la réussite espérée en termes de recettes puisqu’avec un budget de 60M$US (sans compter le budget promo), il n’en a rapporté « que » 114 (mais devrait se rattraper avec l’exploitation vidéo, VOD et SVOD). Les critiques étaient assez mitigées, saluant la réalisation et les scènes de courses mais grinçant des dents sur l’écriture. On ne peut pas leur donner tout à fait tort, mais pourtant au final, on ressort réellement enjoué de Gran Turismo.
Il y aurait par exemple clairement à redire sur les personnages. Certes, ils sont sympathiques, suffisamment développés pour qu’on s‘attache à eux et pour qu’on ait envie de voir comment ils vont évoluer. Mais ils sont aussi extrêmement clichés. Entre le père un peu bourru qui ne croit pas en son fils, le jeune pilote qui veut à tout prix atteindre son rêve d’enfant, le vieil entraineur un peu bourru qui va projeter dans le jeune pilote ce qu’il n’a pas pu faire durant sa jeunesse, ou l’homme d’affaires un peu farfelu et cabotin, on est dans du grand classique qu’on pourrait retrouver dans n’importe quel film sur le sport, automobile ou non. Mais pourtant ça marche. Ça marche parce que, comme dit juste au-dessus, qu’ils soient clichés ou pas, on s’attache à eux. Ça marche parce qu’ils sont extrêmement bien interprétés par des acteurs et actrices qui croient au projet. David Harbour (Hellboy, Stranger Things) est parfait en coach qui voit là une forme de rédemption. Le jeune Archie Madekwe (Midsommar, Beau is Afraid) est très crédible en geek passionné de courses automobiles. Orlando Bloom (Pirates des Caraïbes, Le Seigneur des Anneaux) s’en sort étonnamment bien en homme d’affaires partagé entre faire de l’argent à tout prix et la réussite du jeune pilote. Geri Halliwell ne nous fait pas penser aux Spice Girls mais à une maman qui s’inquiète pour son fils. Mais on y croit surtout parce que dès que le film laisse la place aux courses, les personnages se transforment et prennent toute leur ampleur. Beaucoup de choses ont été reprochées à Neill Blomkamp mais rarement sa mise en scène, et il prouve une fois de plus qu’il sait faire. J’ai toujours aimé les courses poursuites sauvages au cinéma mais rarement les vraies courses sur circuits. Mais là, Blomkamp happe le spectateur en le plaçant tantôt aux côtés des pilotes, tantôt en faisant des plans aériens virevoltants au drone que n’aurait pas reniés Michael Bay. La mise en scène de ces courses est tout bonnement impressionnante avec un réalisateur qui n’oublie pas qu’il est geek et qui sait parfaitement comment rendre hommage au matériau de base. Certains angles de caméra rappellent immédiatement ceux du jeu, aussi bien ceux des courses que ceux des replays qu’on aimait admirer une fois les tours terminés. On retrouve aussi les petits indices visuels au-dessus des voitures pour nous indiquer leur position, mais aussi pour les tours restants, faisant parfois directement un parallèle avec ces joueurs qui jouent avec des sièges vibrants et des volants à retour de force. Cela aurait pu être grossier si cela avait été fait par un tâcheron ne connaissant rien à la saga Gran Turismo, mais c’est ici parfaitement homogène, renforçant encore plus l’intensité de courses déjà assez bluffantes.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Des personnages attachants… ♥ Un bon casting ♥ Les courses, intenses ♥ Bonne mise en scène |
⊗ … bien que clichés ⊗ Parfois prévisible |
Gran Turismo n’est pas parfait, mais c’est un bon film et, après Tetris, une nouvelle bonne adaptation de jeu vidéo. Difficile de dire s’il annonce le retour aux affaires de Neill Blomkamp, mais que vous aimiez ou pas les jeux, vous pouvez tenter l’expérience. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• De nombreuses séquences de course du film ont été tournées sur le Hungaroring, en Hongrie, à la place de différents circuits. Le Hungaroring remplace notamment Silverstone pendant les séquences de la GT Academy, ainsi que Le Mans, où plusieurs des virages distinctifs du Hungaroring sont utilisés, le dernier virage étant le plus visiblement différent du tracé réel du Circuit de la Sarthe malgré l’ajout de décors et de toiles de fond numériques pour masquer l’emplacement du circuit.
• Le personnage de David Harbour, Jack Salter, n’a pas existé dans la véritable histoire de Jann Mardenborough. Il est par contre un amalgame de différents personnages qui eux ont réellement existé.
• Le scénariste Zach Baylin a cité Rocky (1976) et Top Gun (1986) comme influences sur ce film.
Titre : Gran Turismo
Année : 2023
Durée : 2h14
Origine : U.S.A / Japon
Genre : Vroum vroum
Réalisateur : Neill Blomkamp
Scénario : Jason Hall, Zach Baylin, Alex Tse
Acteurs : Archie Madekwe, David Harbour, Orlando Bloom, Takehiro Hira, Darren Barnet, Geri Halliwell Horner, Djimon Hounsou, Josha Stadowski, Maeve Courtier-Lilley