Au Cap, Barry est un héroïnomane qui, malgré les supplications de sa femme, persiste désespérément dans la même voie. Après une violente dispute et une nouvelle injection, il est enlevé par des extra-terrestres. Désormais, il est persuadé qu’un alien a pris possession de son corps.
Avis de John Roch :
D’origine Britannique, c’est en Afrique du Sud que Ryan Kruger s’est fait un nom. Dans le monde du clip d’abord puis avec des courts métrages dont Fried Barry. Nominé dans beaucoup de festivals, raflant quelques prix au passage, ce court montre pendant quatre minutes un junkie en plein (bad) trip après une injection d’héroïne. Un film « this is your brain on drugs » glauque, aux images fortes et porté par un certain Gary Green, acteur inconnu qui ne devrait plus l’être très longtemps. Fried Barry, le long métrage, n’est pas une adaptation mais un véritable prolongement qui fait office de suite directe. On suit donc Barry qui sort du squat dans lequel il s’est shooté (avec des images du court en guise de flashback) pour rentrer chez lui. L’occasion de donner une personnalité au personnage: un junkie qui se défonce avec le premier venu, laissant à l’abandon femme et enfant dans la pauvreté au profit de sa dose d’héroïne. C’est justement après une autre injection de la drogue qu’il va se faire kidnapper par des extra-terrestres qui vont prendre possession de son corps pour découvrir la terre.
Fried Barry conserve le discours anti-drogue du court mais ne le limite plus aux effets désastreux des drogues dures, Ryan Kruger exploite un peu plus le sujet en faisant de Barry un homme au départ comme tout le monde tombé dans le piège de la chasse au dragon, fuyant ses responsabilités tout en faisant des efforts pour être un meilleur mari et père jusqu’à ce que l’appel de la drogue ne se fasse plus fort. Une humanité qui se dévoile dès lors que l’alien prend possession de Barry, faisant ainsi tout redécouvrir à l’enveloppe charnelle du personnage, le métrage alternant entre monde de la nuit versant drogue et sexe, et moments plus intimistes parfois touchant. Mais ça ne fonctionne qu’un temps, Fried Barry étant un métrage qui non seulement est WTF qu’ en apparence et qui trouve rapidement ses limites à cause d’un script qui ne sait pas vraiment où il va. Pas tant la faute aux influences revendiquées et bien présentes, en premier lieu Starman et Bad Boy Bubby dont Fried Barry est une sorte de mélange qui reprend du premier l’extra-terrestre qui prend forme humaine pour découvrir la terre, et le personnage qui ne connaît rien du monde extérieur auquel il est soudain exposé du second. Le problème, c’est la trop grande part d’improvisation laissé à un scénario écrit à 90% à même le plateau. Le film en devient alors une succession de saynète sans aucun réel rapport, qui tient toutefois la route tant qu’il reste sur le chemin de l’alien qui découvre le monde dans le corps d’un camé, mais beaucoup moins lorsqu’il dévie trop de sa trajectoire, notamment dans un deuxième tiers qui n’a pas vraiment de sens avec le reste, en plus d’occasionner un gros ventre mou dans le milieu d’un métrage qui aurait gagner à se débarrasser de quelques scènes superflues pour gagner en rythme et en cohérence dans ce qu’il raconte.
Si d’ordre scénaristique, Fried Barry a du mal à convaincre sur la longueur, le film possède néanmoins d’autres atouts, à commencer par un aspect technique solide. La photographie colorée et pleine de néons est superbe lors des scènes nocturnes, la mise en scène est solide et on ne ressent presque jamais le passé de clipeur de Ryan Kruger, qui fait de la métropole sud-africaine du Cap un lieu photogénique qui tranche avec sa réputation de ville la plus dangereuse de tout le continent africain. Mais la véritable révélation de Fried Barry, c’est Gary Green. Employé avant tout comme extra, l’acteur qui porte le film sur ses épaules trouve ici un rôle qui lui permet de faire étalage de mimiques et d’expressions hallucinantes, qui de plus à une vraie gueule comme on n’en voit plus aujourd’hui. Gary Green est la principale attraction d’un film à l’écriture bien trop improvisée et dont le coté WTF ne dépasse jamais son pitch d’alien malgré lui camé qui découvre un monde de la nuit finalement trop propre et trop sage par rapport au sujet traité et la ville qui lui sert de cadre. Le coté social n’est pas plus mis en avant que ça, se résumant à des camés, des prostitués, des homosexuels, un tueur d’enfant et des malades mentaux sans en tirer le moindre constat ou critique de la société et finalement, Fried Barry échoue à devenir l’œuvre transgressive qu’elle se verrait être. De bonnes idées, il y en a dans Fried Barry, mais on est loin du trip sous acide et social annoncé.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Gary Green ♥ La mise en scène ♥ La photographie ♥ De bonnes idées |
⊗ Un scénario dont l’improvisation se ressent trop ⊗ Un gros ventre mou en milieu de métrage ⊗ Finalement pas aussi WTF que ça ⊗ Trop propre et trop sage |
Fried Barry a pour lui des arguments solides avec son aspect technique soigné et son acteur principal qui porte le film sur ses épaules. Mais le métrage trouve rapidement ses limites, la faute à un script dont l’improvisation se ressent trop, son coté trop propre et trop sage par rapport à ce que ça raconte et finalement, ce n’est pas aussi WTF qu‘ annoncé. |
Titre : Fried Barry
Année : 2020
Durée : 1h39
Origine : Afrique du Sud
Genre : This is your brain on drugs
Réalisateur : Ryan Kruger
Scénario : Ryan Kruger
Acteurs : Gary Green, Chanelle de Jager, Brett Williams, Joey Cramer, Bianka Hartenstein, Sean Cameron Michael, Steve Wall, Hakeem Kae-Kazim, Tamer Burjaq, Jonathan Pienaar, Colin Moss, Brendan Sean Murray