Dans les années 2070, dans la citadelle de Libria, les émotions n’existent plus, supprimées par l’absorption quotidienne de Prozium. Cette drogue anti-anxiété rend les gens plus heureux et plus productifs. Les individus ont ainsi accepté de mettre de côté leur liberté pour vivre en harmonie avec leur dirigeant spirituel connu sous le nom de Père. Les personnes qui refusent de prendre leur dose sont considérées comme des rebelles et vivent en retrait de la ville. S’ils sont pris à jeun, c’est la peine de mort assurée. John Preston travaille au service de Père et applique la loi à la lettre. Un jour, celui-ci brise le flacon de sa dose et n’a pas le temps de s’en procurer une de rechange. Il est alors submergé par toute une gamme d’émotions. Victime d’un revirement spirituel qui le confronte à ses supérieurs hiérarchiques, il mène l’enquête sur ce nouvel état de vie.
Avis de Oli :
EQUILIBRIUM a constitué, pour ma part, une surprise d’autant plus forte qu’elle était complètement inattendue. Pensez donc : un film américain qui tentait de surfer sur la vague MATRIX et sa collection cuir, et qui (outrecuidance manifeste) se vantait de détourner un style de combat purement HK (le gunfight) pour l’adapter à la sauce SF. Et bien malgré toutes mes réticences j’ai fait le premier pas, regardé dans un premier temps le film d’un œil discret, bientôt celui-ci s’est vite senti plus concerné tant et si bien qu’à la fin j’avais les deux yeux grands ouverts : oui j’en avais pris plein les mirettes !
Malgré tout, il faut bien le reconnaître, le film de Kurt Wimmer ne s’embarrasse que fort peu : il abuse ainsi souvent de ficelles scénaristiques bien connues (en vrac : le méchant qui se découvre une âme, l’amour sacrifié et qui appelle à la vengeance, etc.), mais celles-ci passent plutôt bien. On le doit avant tout au talent de Christian Bale, qui parvient à donner du charisme à son personnage, et du sens à des scènes moyennes qui auraient pu littéralement sombrer si elles avaient été portées par d’autres (le sauvetage héroïque du chien). De plus, ces quelques approximations se digèrent d’autant mieux qu’elles ne sont pas si nombreuses : le réalisateur a eu l’intelligence de ne pas en faire trop en matière de philosophie, de dualité Bien/Mal, et le film qui ne dure ainsi qu’un peu moins de deux heures mise d’avantage sur l’action que sur les longs discours.
Côté références là aussi nous sommes servis. Certains grinceront des dents en hurlant au plagiat, voire à l’adaptation barbare et maladroite. Soit… Il faut malgré tout reconnaître que les nombreux emprunts (LE MEILLEUR DES MONDES d’Huxley ; FAREINHEIT 451 de Truffaut) constituent un background intéressant au scénario d’EQUILIBRIUM. Je ne compte d’ailleurs pas les clins d’œil nombreux à MATRIX, car réalisateur et producteurs ne se sont pas arrêtés là puisqu’ils sont allés puiser leurs sources d’inspiration jusqu’en Asie afin d’inventer un nouvel art martial, dérivé des films de John Woo : le Gun-Kata. Cette technique révolutionnaire consiste en fait à calculer les statistiques de toutes armes et de ses angles de tir possible, afin d’anticiper les balles et de répliquer au mieux. Complètement irréaliste, le système du Gun-Kata risque d’en refroidir plus d’un. Toutefois, si l’on accepte les règles du jeu et ses incohérences (après tout on est quand même dans un film d’anticipation), si l’on ne cherche pas constamment la petite bête en faisant une fixette sur certains détails un peu énormes, il faut bien avouer que ce Gun-Kata est tout simplement jouissif à souhait, d’une originalité à toute épreuve (il fallait oser développer un tel concept), d’une beauté plastique époustouflante.
Vous vouliez des morceaux de bravoure ? Et bien le Gun-Kata vous en proposera à la pelle, jusqu’au duel final entre Preston et Brandt, cette fois ci à l’arme blanche comme dans nos bons vieux chambara. Ce duel là d’ailleurs, entre les deux Clerics en chef, n’est pas sans rappeler le fameux final du film SANJURO de Kurosawa. Un nouveau clin d’œil aux passionnés du genre ? Peut-être. En tout état de cause cet instant là est purement et simplement électrique.
Malgré les risques que cela pouvait comprendre (pas facile de plaquer des discours sérieux sur des combats fantaisistes), EQUILIBRIUM ne sombre jamais dans le ridicule. Certes il ne passe pas très loin de l’erreur fatale, parfois, mais le jeu de Christian Bale rattrape alors aisément le tout. Les costumes bien laids des méchants (avec les casques de moto !) passent alors presque inaperçus, comme ce montage de temps en temps un brin maladroit, où l’on sent que le réalisateur a souhaité trancher dans le vif pour mettre d’avantage l’accent sur l’action : le film, qui semble alors ne plus se prendre totalement au sérieux et qui paraît assumer son statut de Série B, en ressort grandi. Et puis les combats s’enchaînent, la tension dramatique monte encore d’un cran, et malgré le fait que l’on sache presque inévitablement à quelle sauce on va être mangé, on y croit et mieux : on en redemande.
Là où la saga MATRIX s’est essoufflée car à court d’idée originale, EQUILIBRIUM s’impose comme l’alternative purement entertainment au bulldozer des frères Wachowsky. Sans états d’âmes, pompant à droite et à gauche tout ce qui peut servir le seul loisir du spectateur, le film de Kurt Wimmer se détache aisément de ses concurrents car s’il recycle, il le fait toujours intelligemment.
Titre : Equilibrium
Année : 2002
Durée : 1h42
Origine : U.S.A
Genre : Science Fiction / Action
Réalisateur : Kurt Wimmer
Acteurs : Christian Bale, Emily Watson, Taye Diggs, Angus MacFadyen, Sean Bean, Matthew Harbour, William Fichtner, Dominic Purcell, Maria Pia Calzone
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