Mauvaise journée pour Rachel : en retard pour conduire son fils à l’école, elle se retrouve coincée au feu derrière une voiture qui ne redémarre pas. Perdant patience, elle klaxonne et passe devant. Quelques mètres plus loin, le même pick up s’arrête à son niveau. Son conducteur la somme de s’excuser, mais elle refuse. Furieux, il commence à la suivre… La journée de Rachel se transforme en véritable cauchemar.
Avis de Cherycok :
La pandémie de COVID-19 a fait pas mal de reports au niveau des sorties cinéma. On ne compte plus les films qui se sont vus repoussés aux calanques grecques, certains ont même vu leur sortie annulée, arrivant du coup directement en VOD. Ça n’a pas été le cas d’Enragé, de Derrick Borte (American Dreamer, La Famille Jones) qui a été le premier film à arriver dans les salles à grande échelle aux States après la fermeture de la plupart des cinémas en raison de ladite pandémie. Avec son statut de série B assumée, le film avait tout à gagner à sortir sur le grand écran tant la concurrence avait complètement disparu. Sorti dans pas moins de 1823 salles, Enragé nous propose un thriller routier dans la veine de films tels que Duel (1971), Hitcher (1986), Highwaymen (2004) ou encore Une Virée en Enfer (2001). Mais le film dont il se rapproche le plus, c’est sans doute de Le Tueur de l’Autoroute (2019), bobine néerlandaise dont je vous ai parlé tout récemment, avec lequel il partage d’étranges similitudes, jusque dans ses points faibles. Pour ceux qui l’auraient raté, je vous renvoie donc à ma chronique de ce dernier.
Le point de départ d’Enragé et de Le Tueur de l’Autoroute sont similaires. Dans les deux cas, un psychopathe va traquer et terroriser une famille suite à un évènement survenu sur la route et le refus du conducteur de présenter ses excuses à celui de l’autre véhicule. Ici, il s’agit de Rachel, une fois de plus en retard à cause d’une panne de réveil, qui doit se dépêcher d’amener son fils à l’école. Alors qu’elle attend tranquillement à un feu rouge, le véhicule devant elle reste immobile lorsque le feu passe au vert. Pressée et gentiment agacée, Rachel klaxonne un peu fort. Un peu trop fort au goût du conducteur du pick-up qui va se mettre à suivre Rachel afin d’obtenir des excuses. Excuses qu’il n’obtiendra pas car Rachel estime qu’elle n’a rien fait de mal et qu’elle n’est fautive en rien. Sauf que l’homme est à un point de sa vie où rien ne va, où le pétage de plombs est complètement inévitable, où il se fiche complètement de la répercussion de ses actes. Rachel et son fils Kyle vont en faire les frais. Difficile de savoir si Enragé s’est fortement inspiré de Le Tueur de l’Autoroute. Il y a de fortes chances qu’il était déjà en production lorsque son homologue néerlandais est sorti sur les écrans. Pourtant, les similitudes sont parfois assez troublantes. Le principe du film déjà, bien que déjà vu, c’est quasiment le même dans les deux films. L’élément déclencheur est également similaire, à savoir que la « victime » refuse de présenter ses excuses. Certains éléments du film également, comme le passage à la station-service, ou le fait que le persécuteur se retrouve en possession du smartphone de la victime et s’en serve pour avoir des adresses. Le lieu de la scène finale est également identique, bien que les motivations qui ont poussé les personnages à s’y rendre soient différentes. Bien entendu, Enragé se démarque malgré tout de son homologue sur pas mal de points, ce qui l’empêchera sans doute de prendre un procès. Mais lorsque comme moi on a enchainé les deux films coup sur coup, difficile de ne pas voir à quel(s) point(s) ils sont proches.
Ils sont proches jusque dans leurs défauts. Tout comme dans Le Tueur de l’Autoroute, difficile de ne pas pester devant tant de réactions improbables de la part des protagonistes, et plus particulièrement des victimes. Chaque décision est plus con que la précédente, le stress et la peur n’excusant clairement pas tout. Le personnage de Rachel, interprété par une Caren Pistorius (Mortal Engines) plutôt convaincante, est tout simplement à baffer. Celui interprété par Russell Crowe (Gladiator), impressionnant par sa carrure imposante, n’a aucune profondeur. Enragé, malgré sa courte durée, est assez long à démarrer et ne développera aucune intensité. Le film est au final assez plat, à l’instar de la mise en scène de Derrick Borte dont l’absence totale d’idées et de folie la rend monotone au possible. Le public pourra se contenter du côté rentre dedans du film, avec sa violence sèche et sans concession. Mais sur ce point-là également, le film semble à côté de la plaque. Il ne va au final jamais assez loin dans sa violence graphique, à l’exception peut-être d’une scène. Même chose au niveau de la violence psychologique qui, si elle est bien là, fait l’effet d’un pétard mouillé tant le film est d’une prévisibilité à toute épreuve, empêchant le moindre suspense de réellement s’installer. L’idée de départ, que le générique du film nous présente, avec toutes ces images d’incivilités sur la route, de violence quotidienne, était louable, mais le film se prend trop au sérieux alors qu’il nous pond des scènes parfois ridicules (le plan de Fortnite pour venir à bout du psychopathe, quelle rigolade…). Malgré tout, on ne s’ennuie pas, car malgré la platitude des images, le rythme est suffisamment élevé. Mais pour quelqu’un qui comme moi adore les séries B d’action bas du front pour peu qu’elles soient efficaces, je ne peux qu’être déçu par ce Enragé qui ne tient clairement pas toutes ses promesses.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Bien rythmé ♥ Russell Crowe imposant |
⊗ Les réactions absurdes ⊗ Mise en scène plate ⊗ Des clichés à la pelle |
Enragé est un road rage opportuniste qui, bien qu’il fasse malgré tout le job en termes de divertissement si on n’est pas trop regardant, accumule les incohérences et les facilités. On ressort avec cette impression de gâchis et seul Russell Crowe arrive à maintenir le navire à peu près à flot. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Pour ce rôle, Russell Crowe a préféré porter un costume rembourré plutôt que de prendre du poids comme il l’avait fait au milieu des années 2000. Il n’était pas à l’aise à l’idée de reprendre autant de poids.
• Caren Pistorius, qui joue Rachel, n’a que quatorze ans de plus que Gabriel Bateman, qui joue son fils Kyle.
• Les ciseaux en sucre d’orge sont un clin d’œil au film Une virée en enfer (2001), dont le thème est similaire et dans lequel les protagonistes vont mettre en colère un automobiliste meurtrier qui les terrorise ensuite.
• Le personnage de Russell Crowe est crédité en tant que L’homme est Tom Cooper (c’est le nom avec lequel il se présente à Andy lors de la rencontre au restaurant). Mais il pourrait facilement s’agir d’un nom inventé.
Titre : Enragé / Unhinged
Année : 2020
Durée : 1h26
Origine : U.S.A
Genre : Bougon le Russell…
Réalisateur : Derrick Borte
Scénario : Carl Ellsworth
Acteurs : Russell Crowe, Caren Pistorius, Gabriel Bateman, Jimmu Simpson, Austin P. McKenzie, Juliene Joyner, Stephen Louis Grush, Anne Leighton, Devyn A. Tyler