[Film] Door, de Takahashi Banmei (1988)

Une jeune femme mariée dont le mari est souvent absent commence à s’inquiéter. Après de nombreux coups de fil pour lui vendre un peu tout, voilà que l’on frappe maintenant à sa porte. Effrayée, elle parvient à faire partir l’homme. Mais celui-ci, vexé, ne compte pas en rester là…


Avis de Rick :
Door, comme sa première suite, et en réalité comme sa seconde suite signée Kurosawa Kiyoshi, il a longtemps été assez rare. Moins que le second opus, qui lui était tout simplement invisible pendant des années, mais tout de même. Il aura fallu un courageux éditeur pour voir les deux films débarquer, enfin, restaurés, en HD, dans pas mal de pays, et que les cinéphiles curieux puissent enfin découvrir les deux premiers métrages. Door III de Kurosawa, il est un poil moins rare, mais vu la qualité des copies disponibles, une sortie ne serait pas de refus non plus. Mais patience, puisque les deux premiers Door sortent en tout cas chez Carlotta en Mai. Car la trilogie Door, c’est passionnant. Trois films qui ne se suivent pas, ne se ressemblent pas, parfois ne jouent pas dans le même genre même, mais trois films qui ont ce petit quelque chose de fascinant. Une réelle maitrise dans la mise en scène, déjà, ce qui n’est pas rien. Des idées, un peu partout. Une tension qui fonctionne, le plus souvent, et le tout avec un propos certes simple, mais réaliste et qui ne s’étire jamais. Après tout, 1h35 au compteur pour ce premier film signé Takahashi Banmei. Et après la découverte du métrage dans les meilleures conditions possibles, le verdict tombe. Door, ou Doa, ce n’est pas parfait, quelques scènes sont parfois un poil maladroites, certains acteurs ne sont pas les meilleurs de leur génération loin de là, mais on se dit, au bout du compte, que c’est surtout hyper efficace, et en soit, pas si éloigné que ça d’un De Palma. D’ailleurs, pourrait-on, au final, tout simplement voir Door comme un De Palma au Japon ? Nous sommes après tout dans un polar, où la paranoïa n’est jamais loin, qui par moment pourrait presque avoir des allures de huis clos, et où la mise en scène prend parfois (souvent) le pas sur le scénario, très mince.

Enfin, très mince, dans les faits, puisqu’avec son histoire de mère de famille souvent seule chez elle ou avec son jeune fils, on peut déceler ci et là pas mal de petits éléments sur la société Japonaise, sur le voisinage, et ce jusqu’à ce qui terrorise chaque personne venant s’installer au Japon : les poubelles et les jours de sorties des poubelles (si si, je vous assure). Lors de cet événement arrivant très tôt dans le récit où la protagoniste se retrouve avec ses poubelles qui reviennent devant son appartement, pourrait-on y voir là une critique du voisinage bien occupé à surveiller que leurs voisins font ce qu’il faut faire, quitte à leur pourrir la vie ? Au final, ce n’est pas bien important, puisque Door, même sans chercher de sens caché ou de signification, est avant tout un petit film policier, sans doute tourné pour une bouchée de pain (très peu d’acteurs, très peu de lieux), mais hyper efficace et avec un réalisateur chevronné aux commandes. Et au scénario également, puisque celui-ci est signé à deux, par le réalisateur déjà, mais également par un certain Oikawa Ataru, réalisateur et scénariste certes extrêmement inégal, mais qui aura lancé la saga Tomie (il a signé le premier, mais également le cinquième film, Beginning, ainsi que le pire de toute la franchise, Revenge), d’autres petits films d’horreur allant de l’intéressant au très moyen, et adapté de manière bancale mais plaisante l’énorme Higurashi No Naku Koro Ni pour le grand écran avec deux films. Et l’on sent très rapidement qu’au scénario, le tout a dû se construire pour faire monter la tension rapidement après la première partie mettant tout en place pour laisser place à la mise en scène, tant celle-ci est réussie.

Car oui, au départ, ça commence doucement. Quelques coups de fils, des messages obscènes écrits sur la porte, une présence qui nous suit dans la rue, mais une fois que Door commence réellement, là ça ne s’arrête plus jusqu’à son final, qui en plus d’avoir quelques bons coups pour surprendre le spectateur, se permet alors beaucoup de choses visuellement. On pense par exemple à cette poursuite dans l’appartement filmé depuis le plafond, suivant les personnages de pièce en pièce en un seul plan séquence, séquence la plus connue du métrage d’ailleurs, et qui nous fait dire que la taille de l’appartement, qui pourrait paraître tout de même bien grand au départ, se justifie juste pour cette scène clairement maitrisée. La seconde partie du métrage accumule ce genre d’idées de mise en scène qui font plaisir et qui captivent. Même lorsqu’il y a quelques ratés, comme cette scène qui pourrait faire penser à Shining, mais qui paraît un poil trop cheap, et moins crédible que le reste. Mais ces maladresses, qui peuvent probablement être mises sur le dos d’un tournage éclair et à l’économie, elles rendraient presque le film encore plus attachant qu’il ne l’est à la base. Dommage que souvent, la musique s’emballe un peu trop sur ces mêmes moments. Mais même si ratés il y a, Door reste malgré tout un petit film plein de tension, extrêmement prenant, plein de bonnes intentions, et plein de bonnes idées. D’où, sans doute, le succès du film et la naissance des suites, qui n’en sont certes pas vraiment et s’aventurent vers de nouveaux horizons.

LES PLUS LES MOINS
♥ Énormément d’idées de mise en scène
♥ La tension est là
♥ Un bon petit thriller, tout simplement
♥ Quelques belles trouvailles
♥ Aucun temps mort
⊗ Quelques scènes moins convaincantes
⊗ La musique too much sur la fin
note35
Door est un bien bel exercice de style, un thriller simple mais prenant, où la tension fonctionne, et où la mise en scène prend le pas sur le scénario. Très réussi malgré ses faux pas par moment.


Titre : Door – Doa – ドア
Année : 1988
Durée :
1h35
Origine :
Japon
Genre :
Thriller
Réalisation :
Takahashi Banmei
Scénario :
Takahashi Banmei et Oikawa Ataru
Avec :
Takahashi Keiko, Tsutsumi Daijirô, Shimomoto Shirô, Yonezu Takuto, Ishida Masao, Noguchi Hiroshi et Shimada Yoshihiro
Door (1988) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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