Une prostituée italienne rendue aveugle par un tueur en série lors d’une attaque, recueille un jeune chinois, dont la vie a également été détruite par les actions du maniaque. Il va devenir son allié dans une lutte terrifiante pour se débarrasser définitivement du tueur en série…
Avis de Rick :
Si en 2022, pour beaucoup, la mode est au multiverse, je remarque une autre tendence, qui elle me fait bien plus plaisir dans les faits. Car après David Cronenberg et ses Crimes du Futur, c’est au tour de Dario Argento de revenir au cinéma, après une pause de 10 ans, en revenant lui aussi à ses préoccupations premières après l’écart que fut Dracula 3D, et en ressortant du placard un script qu’il avait lui-même écrit avec Franco Ferrini en 2002, exactement comme Cronenberg. Bon, la différence, c’est que passé les années 2000, la carrière de Cronenberg tenait toujours la route, alors que celle d’Argento a fait un saut vertigineux dans le néant de la médiocrité, pour rester gentil, avec des films à la frontière entre le navet et le nanar, des films comme Mother of Tears, Giallo ou donc Dracula 3D. Un retour inespéré, inattendu, que l’on ne s’explique pas vraiment, surtout que donc, Argento revient au giallo, et qu’il est dedans depuis son premier film en 1971, autant dire qu’il a fait le tour du genre. Surtout aussi que contrairement aux thématiques de Cronenberg, le giallo, c’est un genre hyper codifié, que j’apprécie certes, mais qu’il me semble difficile de pouvoir renouveler en 2022. Bref, le métrage faisait peur, Argento allait-il revenir en forme après un détour chez Gaspar Noé comme acteur, ou allait-il continuer sa descente aux enfers avec un film inutile de plus ? Alors, ni l’un ni l’autre. Occhiali Neri de son petit nom, ou Dark Glasses à l’international, ce qui sera sans doute son film également pour son exploitation Française future (et probablement en DTV comme depuis un bout de temps), ressemble à du Argento, la maîtrise en moins, et a le plus souvent des allures de thriller un peu fauché, mais étrange et parsemé de moments qui relèvent clairement le niveau.
En gros, le genre de métrage clairement difficile à totalement détester lorsque l’on est fan d’Argento, mais qu’en ayant un minimum de bonne foi, difficile à totalement défendre tant Argento nous aura donné par le passé Les Frissons de l’Angoisse, Ténèbres et tant d’autres. Aucune surprise donc, nous sommes là face à un giallo, avec on tueur sadique portant des gants en cuir (sans doute encore joué par Argento pour les gros plans), et une héroïne devenue aveugle après un accident de voiture provoqué par le dit tueur, prostituée de profession, et qui tente de s’adapter à sa nouvelle vie pendant que comme souvent, la police galère à mener une enquête compétente. Je dois l’avouer, le duo de flics d’ailleurs, il me fait rire. Ils regardent une vidéo de sécurité, floue, et là « hmmm, le tueur a pu voler le véhicule et changer la plaque, c’est un indice ». Deux meurtres plus tard, en interrogeant notre héroïne certifiant que le van étant blanc « hmmm il a pu le repeindre, c’est un indice ». Bon, je me moque, et après tout, Argento, un peu comme Fulci également à l’époque, n’a jamais été pointilleux quand aux dialogues, ou même finalement, en étant un brin réaliste, les personnages secondaires. Ce ne sont que des artifices pour faire avancer l’intrigue. Le surjeu dans les films de genre Italien, on connait depuis le temps, pareil pour les éléments cités, et si c’est dommage de voir que la formule n’évolue toujours pas en 2022, l’amateur accepte ces points. Ce qui est plus dommage en réalité, c’est la qualité de la mise en scène, pas mauvaise, mais ayant un aspect un peu fauché, pas toujours aidé par la photographie, qui sort du lot pour une poignée de plans, mais aborde un ton beaucoup plus naturel et terne la plupart du temps. Ah, et puis il y a Asia Argento. Va-t-elle briser la malédiction qui fait qu’elle joue toujours mal dans les films de son père (à l’exception du Syndrôme de Stendhal, mais Le Fantôme de l’Opéra, Trauma, Mother of Tears et Dracula 3D ne viendront pas me contredire) ? Et bien étonnement, enfin débarrassée du rôle de premier plan et en étant donc uniquement secondaire dans l’intrigue, elle s’en sort beaucoup mieux. Débarrassée du poids d’un rôle à temps plein devant son père ? Allez savoir !
Bref, du bon et du moins bons. Là où Argento se fait clairement plaisir, c’est dans les mises à mort, souvent très sanglantes voir gore par moment, et qu’il n’hésite pas à faire durer pour rendre l’acte encore plus sadique. Autre point très positif et assez surprenant, dés les premières minutes où la musique retentit, on sent que l’on va avoir ici un superbe score musical (déjà un bon point car les derniers Argento à ce niveau…), et alors qu’on s’attend à voir un Claudio Simonetti à la barre tant les sonorités nous ramènent des années en arrière, et bien non, c’est un certain Arnaud Rebotini qui s’occupe de mettre en boite la musique. Félicitations à lui en tout cas, son travail, je peux clairement le conseiller. Quand au film, à vous de voir, selon vos attentes, suivant votre affinité avec Argento, suivant votre tolérance. Car même si c’est un grand pas en avant, techniquement, on est assez proche d’un Card Player, en bien plus violent, mais Card Player quand même, et le film n’est déjà pas bien apprécié du public (je l’aime pour ce qu’il est, un petit Argento). On y retrouve cet aspect un peu plus téléfilm, ainsi qu’un tueur aux motivations un peu légères (et ici, tueur révélé trop tôt). Jamais exceptionnel, mais jamais ennuyeux, un peu cheap mais fait avec sérieux, pas toujours convaincant ou crédible mais à d’autres moments plus convaincants. Bancal mais intéressant en soit, un film qui finalement montre qu’en s’appliquant un peu, Argento peut encore au moins fournir un travail potable et digeste.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Des meurtres souvent graphiques ♥ La musique ♥ Quelques scènes sortant du lot |
⊗ Des acteurs pas tous au top ⊗ Un côté cheap visuellement ⊗ Des scènes bien plus maladroites |
Dario Argento revient après 10 ans d’absence, en retournant au giallo. Clairement meilleur que ces derniers métrages, mais toujours un côté assez cheap en général, rattrapé par les meurtres, la musique, et finalement, le simple fait que ce soit plaisant à regarder. |
Titre : Dark Glasses – Occhiali Neri
Année : 2022
Durée : 1h25
Origine : Italie
Genre : Thriller
Réalisation : Dario Argento
Scénario : Dario Argento et Franco Ferrini
Avec : Ilenia Pastorelli, Asia Argento, Andrea Gherpelli, Mario Pirrello, Maria Rosaria Russo, Gennaro Iaccarino, Andrea Zhang, Ivan Alovisio et Fabrizio Eleuteri
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