Une vieille dame est assassinée à Oxford. Son corps est découvert par deux hommes qui se rencontrent à ce moment-là pour la première fois : Arthur Seldom, un grand professeur de mathématique et de logique et Martin, un étudiant qui vient d’arriver dans l’université et qui rêve d’étudier avec Seldom. Rapidement d’autres meurtres ont lieu, tous annoncés par des symboles bien singuliers. Martin et le professeur s’associent pour retrouver les pièces du puzzle. Rien ne sera comme il paraît…
Avis de Iris :
Pour ce film Alex de la Iglesia a quitté les décors et quotidiens habituels de son Espagne natale, traditionnel lieu de ses réalisations pour se plonger dans le sud-est de l’Angleterre au cœur de la plus ancienne université du monde anglo-saxon. Mais il ne quitte pas que l’Espagne, il fait également une infidélité à son genre de prédilection pour une incursion dans le polar en délaissant également l’humour noir et cynique qui fait le sel de ses habituelles productions. Le pari est-il relevé ? Eh bien en réalité, oui et non…
Plongeant son intrigue de tueur en série dans le milieu universitaire, le point de vue est assez sympathique et les raisonnements qui se basent essentiellement sur les mathématiques nous donnent quelque chose de nouveau et qui se tient. Alex de la Iglesia prend le soin de patiner son œuvre de références qui pourraient paraitre imbuvables mais qui sont tout à fait abordables sans tomber dans l’ésotérisme dégoulinant à l’inverse d’un certain Da Vinci Code. Il entre dans l’univers du polar avec aisance, en nous servant toutes les ficelles du genre et comme dans tout film impliquant psychopathe et nombre de suspects réduit, on retrouve la somme des « tout le monde est suspect », des alibis alambiqués, des airs louches. L’enquête sera éminemment servie par le duo d’acteurs Elijah Woods (Frodon dans le seigneur des Anneaux, Sin City) /John Hurt (Monsieur Ollivander dans Harry Potter, Only lovers left alive) qui fonctionne à merveille, l’étudiant et son mentor, l’élève brillant et son maître à penser, l’Américain énergique et l’anglais tout en flegme et réflexion. L’autre duo marquant est le duo Elijah Woods/ Leonor Watling (Parle avec elle, la mauvaise éducation) qui s’avoue être savoureux et surtout apporter un point de vue axant la réflexion en dehors des considérations universitaires puisque Lorna, bien qu’ayant fait des études brillantes, est une infirmière. Et c’est donc ce trio qui va nous mener littéralement par le bout du nez de réflexion en réflexion, de raisonnement en raisonnement. Et quoi qu’on en dise, on rentre parfaitement dans cette équipe étrange. Le milieu oxfordien est très bien retranscrit et les guéguerres intestines propres au milieu de la recherche dans les facultés transparaissent également. A noter la présence inquiétante de Burn Gorman (Imperium, Crimson Peak) dans un second rôle qui aurait pu avoir plus d’importance mais qui finalement se révèlera anecdotique ainsi que celle de Dominique Pinon que l’on retrouve avec plaisir et qui bien que ne prononçant qu’une seule phrase de tout le métrage aura un rôle important à jouer. Les images sont soignées et la photographie de toute beauté, De la Iglesia s’est en effet assuré les services de son équipe habituelle avec en directeur de la photographie Kiko de la Rica qui œuvre sur la majorité de ses films.
Oui mais alors me direz-vous, ou vous ne me le direz pas mais je répondrai quand même, qu’est-ce qui cloche dans tout ça ? Eh bien l’écueil même de tout film du genre : l’intrigue et l’ambiance.
D’une part, lorsque l’on base un métrage sur une intrigue que l’on veut un tant soit peu surprenante, il est d’une importance capitale de ne pas trop en dire ou trop en faire pour garder un minimum de surprise. Or ici, on sent dès le départ que quelque chose va venir nous chambouler, on s’y attend, on piste les signes qui nous mettront sur le chemin. Et lorsque dans la dernière partie, l’heure du dénouement point son nez, c’est presque une déception de découvrir la résolution des énigmes. Mais laissons toutefois au réalisateur le bénéfice du doute : et si son souhait était finalement de nous orienter vers des raisonnements alambiqués pour nous assommer finalement d’une conclusion simplissime ? Auquel cas ce serait bien joué…
D’autre part, et c’est une constante chez Alex de la Iglesia, le métrage subit une certaine perte de vitesse et d’intérêt en seconde partie. C’est habituellement contrebalancé par un humour omniprésent mais qui est cruellement absent de ce The Oxford crimes. Aussi l’on va avoir tendance à se ramollir en cours de route. Et cela pose un problème réel car il faut bien reconnaitre que le rythme est crucial dans les intrigues à tiroir tant pour porter l’intrigue finale que pour maintenir l’attention du spectateur. Cela donne donc une impression de longueur à un film dont la durée est pourtant courte (1h43 générique compris). C’est fort dommage tant les jeux de piste des thrillers avec un fonctionnement bien huilé peuvent être absorbants.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Le casting ♥ Les références au genre ♥ La English touch ♥ La photographie |
⊗ Une intrigue décevante ⊗ Un rythme qui s’essouffle |
The Oxford crimes est un polar plaisant mais qui, et il s’en est fallu de peu, malheureusement passe à côté d’être une œuvre marquante. Quand De la Iglesia veut jouer dans la cour du grand Hitchcock cela donne une œuvre sans l’intérêt attendu du point de vue de l’intrigue mais fidèle au talent de réalisation, de la dramaturgie, du casting et de mise en scène toujours impeccables de son réalisateur. |
Titre : Crimes à Oxford / The Oxford Murders
Année : 2009
Durée : 1h43
Origine : Angleterre / Espagne / France
Genre : : Par le pouvoir du théorème ancestral
Réalisateur : Alex de la Iglesia
Scénario : Alex de la Iglesia, Jorge Guerricaechevarría
Acteurs : Elijah Woods, John Hurt, Julie Cox, Leonor Watling, Burn Gorman, Anna Massey, Dominique Pinon, Jim Carter, Alan David, Tim Wallers, James Weber Brown