Après que son partenaire Ahiru ait été tué lors de l’arrestation du criminel Bruce, le policier Joe « Joker » Kawamura tente de se venger.
Avis de Cherycok :
Ceux qui nous suivent savent peut-être, parce que je le dis parfois en introduction de mes chroniques, que je regarde une majorité de mes films pendant ma pause de 1h30 au boulot. C’est pour ça que beaucoup de films que je chronique ne dépassent pas cette durée, ou alors de très peu (les films plus longs sont réservés pour le soir). Un jour, au détour d’un tweet, je tombe sur un extrait d’une scène d’action d’un film japonais, sur un gunfight qui m’a rappelé les films d’action HK des années 80/90 que j’aime tant. Forcément, ça m’intéresse. Quelques clics sur google plus tard, je constate que la durée du film est de 58 minutes, impeccable dis donc, voilà qui serait parfait pour une future pause méridienne. Ce film, c’est Crime Hunter (1989), parfois appelé Crime Hunter – Bullets of Rage, et ce que je ne savais pas, c’est qu’à son époque, il avait changé la face de tout un pan du cinéma japonais, relançant par la même occasion une industrie comme commençait à s’effondrer.
Dans les années 80 au Japon, la vente de places de cinéma est en baisse et les gros studios commencent à tirer la langue. La Toho et la Toei n’arrivent pas à faire venir dans les salles suffisamment de spectateurs pour rentabiliser leurs gros films. La Nikkatsu est même à cette époque placée en redressement judiciaire. C’est là que Yoshida Tatsu, producteur chez la Toei, a l’idée qui va tout changer, qui va tout relancer. Pour certains, c’est lorsqu’il s’est aperçu que la sortie de Akira en VHS ainsi que de plusieurs OAV avaient rencontré un énorme succès qu’il avait eu cette idée. Pour d’autres, il serait allé dans un vidéoclub, aurait interrogé les nombreux clients qui sortaient avec 4 ou 5 films sur pourquoi ils avaient choisi ces films et comment ils faisaient pour en voir autant en si peu de temps. Devant la réponse qui était « on les regarde en avance rapide ». Cette idée lumineuse, c’était qu’il fallait sortir des films uniquement en vidéo, qu’il fallait qu’ils soient courts et efficaces afin que les spectateurs n’aient pas envie de faire avance rapide. Il fallait que ces films mettent davantage l’accent sur une action rapide et captivante que sur l’intrigue ou le drame, et en priorité viser un public masculin. La Toei lança le label, V-Cinema, et rapidement d’autres studios ont fait de même. Ce V-Cinema (terme qui a fini par s’imposer pour tous les studios) a lancé la carrière de nombreux réalisateurs comme Takashi Miike ou Sabu qui ont vu là un moyen de s’exprimer car ce format était moins surveillé et moins censuré. Le succès de Crime Hunter à sa sortie en VHS a été immédiat et forcément, beaucoup d’autres ont suivi, et donc forcément, certains disent que ce film a une valeur historique indéniable pour le cinéma japonais.
Crime Hunter est donc très court, même pas 60 minutes génériques compris, et donc il va forcément aller à l’essentiel, être épuré au maximum. Cela ne veut pas dire que nous sommes en face de 58 minutes d’action non-stop, non, mais juste que tout le gras et toute la parlotte inutile ont été dégagés. Les personnages sont malgré tout suffisamment développés, et ces personnages, on les connait, ils représentent bien les archétypes du cinéma d’action, du cinéma d’action de plein de pays qui auraient été aspirés, assimilés et bien synthétisé 60 minutes durant. On sent bien entendu l’influence du cinéma américain, par cette musique qui aurait pu sortir d’une série B d’action 80’s, par ce look très rambo d’un des personnages lors du final. Le film se passe même dans un Little Toyko et non au Japon (la voix en anglais à la radio, les dollars plutôt que les yens sont utilisés). Mais Crime Hunter ne cache pas non plus ses inspirations des heroic bloodshed hongkongais de John Woo et des films que cela a engendré. Quelque part, on est dans du cinéma d’exploitation dans toute sa splendeur. Un scénario simple, un film qui cherche à se faire vengeance lorsqu’un malfrat qui a dérobé 5M$ à une œuvre de charité tue son partenaire, des gunfights, de la violence, une jolie nénette et une ambiance sombre. Alors oui, on sent que le budget alloué au film ne devait pas être énorme, mais au final, c’est largement suffisant compte tenu de ce que le film raconte et ce qu’il y avait à faire.
Le film a beau être court et du coup aller vite, le réalisateur arrive à poser une ambiance, une ambiance que les amateurs de polars des 80’s devraient apprécier, ne serait-ce que pour ce saxophone qui revient de temps à autre, ne serait-ce que par les apparitions excellentes de Riki Takeuchi qui en impose par sa présence, avec une mise en scène qui fait ce qu’il faut pour que ce soit le cas. Il y a quelques lignes de dialogues pour établir la personnalité de chaque personnage, mais en dehors de cela, elles ne sont là que pour annoncer la violence à laquelle on va assister à la scène d’après. Le réalisateur préfère placer des indices visuels, filmer des expressions faciales qui ne prennent quelques secondes plutôt que de longs échanges verbaux. Les scènes d’action sont éminemment sympathiques, bien que trop courtes, à l’exception du final, plus long, semblant sortir d’un polar HK avec cette grosse fusillade dans un hangar, à 3 contre plein, qui fait son petit effet. C’est violent, avec des gerbes de sang lors des impacts de balles, avec un montage rapide où un échange de coup de feu va enchainer sur un autre échange de coup de feu jusqu’à que tout ce qui il y à abattre soit abattu. Clairement, il ne faut pas chercher un quelconque message philosophique ou un sens caché derrière Crime Hunter, là n’est pas le but. C’est calibré pour ceux qui veulent un polar qui va à l’essentiel, et c’est ce que ça donne. Alors oui, l’ensemble fait parfois un peu fauché, le format 4/3 et le grain de l’image n’aidant pas forcément à rendre le film plus friqué qu’il n’est, mais au final qu’importe car Crime Hunter est très bien tel qu’il est.
LES PLUS | LES MOINS |
♥ Court et rythmé ♥ Les personnages charismatiques ♥ Des scènes d’action efficaces ♥ Des inspirations bien digérées |
⊗ Quand même assez fauché |
Pionnier du V-Cinema, Crime Hunter est un coup de maitre de la Toei qui va changer la façon des japonais de voir des films au début des années 90. Avec ses 58 minutes au compteur, Crime Hunter est un condensé de polar très efficace. |
LE SAVIEZ VOUS ?
• Pionnier du V-Cinema, Crime Hunter est un coup de maitre de la Toei qui va changer la façon des japonais de voir des films au début des années 90. Avec ses 58 minutes au compteur, Crime Hunter est un condensé de polar très efficace.
Titre : Crime Hunter / Crime Hunter – Bullets of Rage / クライムハンター 怒りの銃弾
Année : 1989
Durée : 0h58
Origine : Japon
Genre : Le début d’une ère
Réalisateur : Toshimichi Okawa
Scénario : Toshimichi Okawa
Acteurs : Seiji Matano, Minako Tanaka, Riki Takeuchi, Keishi Hunt, Masanori Sera, Ryuji Katagiri, Yoshio Harada, Susumu Terajima