[Film] Comme Un Lundi, de Ryo Takebayashi (2022)


Votre boss vous harcèle ? Vos collègues vous épuisent ? Vous ne voulez plus retourner au bureau ? Vous n’imaginez pas ce que traversent Yoshikawa et ses collègues ! Car, en plus des galères, ils sont piégés dans une boucle temporelle… qui recommence chaque lundi ! Entre deux rendez-vous client, réussiront-ils à trouver la sortie ?


Avis de Cherycok :
Si je vous demande de citer un film de boucle temporelle, vous allez sans doute me citer Un Jour Sans Fin (1993) de Harold Ramis et c’est normal, c’est clairement le plus connu de tous. Mais au Japon, la thématique de la boucle temporelle est ancrée dans l’imaginaire collectif depuis bien plus longtemps, sans doute depuis 1965 et le manga à succès de Yasutaka Tsuitsui, The Girl Who Leapt Through Time qui a d’ailleurs connu plusieurs adaptations en animé et/ou film live. Ryo Takebayashi et Saeri Natsuo, deux employés de bureau dans une entreprise de production de contenus, semblent avoir baigné dans ce genre de fantastique et se mettent en tête de réaliser un court métrage sur le sujet en s’appuyant sur ce qu’ils vivent au quotidien, leur posture de salaryman aux conditions de travail peu stimulantes, aux tâches répétitives à effectuer, au quotidien aliénant, sous pression, et surtout épuisant. Finalement, malgré des moyens très limités, ils décident d’en faire un long métrage, qui sera leur premier film, Ryo Takebayashi s’occupant de la mise en scène, et ainsi naquis Mondays: See You ‘This’ Week!, rebaptisé chez nous Comme Un Lundi pour sa sortie en salles. Il en résulte une bobine s’amusant avec le thème de la boucle temporelle façon comédie de bureau à la The Office, et le résultat est des plus réjouissants.

Comme Un Lundi est donc un film à très petit budget qui va tout miser sur son concept et qui, malgré son lieu unique et ses personnages en nombre limité, arrive à ne jamais être redondant. A mi-film, il sait rebondir tout en continuant à aller dans la même direction, tout en essayant de ne pas être trop prévisible afin de maintenir le spectateur en haleine tout du long. Tout commence avec deux des employés de bureau qui se rendent compte de cette boucle temporelle et qui vont essayer de le prouver à une de leur collègue. Puis il faudra petit à petit le prouver à tous, en montant dans la hiérarchie jusqu’au patron de la petite entreprise, car ils sont persuadés que c’est lui, ou plutôt un bracelet de diamants verts, censé amener cette malédiction. Le procédé aurait pu amener une certaine répétition mais il n’en est rien car la mise en scène est très maline, passant d’un protagoniste à un autre afin de nous en apprendre un peu plus sur chacun d’eux. Bien que l’accent soit mis sur un des personnages en particulier, ils sont malgré tout tous importants et ont tous leur carte à jouer. Car le scénario s’appuie clairement sur cette brochette de personnages qui sont forcés de se familiariser les uns avec les autres, qui sont obligés d’apprendre à se faire confiance s’ils ont envie de se sortir de cette spirale temporelle. Il y a une réelle énergie et un dynamisme qui sont amenés par ces personnages. Si le film arrive à maintenir son flux de comédie, c’est parce que les performances des acteurs sont très bonnes et surtout que leur timing comique est impeccable. Nous ne sommes pas ici dans de la franche rigolade mais dans un humour tantôt fin, tantôt cynique, avec des personnages qui amènent chacun leur lot d’excentricités et de bizarreries, certes parfois un peu clichés mais formant un tout très homogène. Point de fou-rires donc, mais un petit rictus qui ne nous quitte jamais 1h23 durant car chacun de ses personnages amène du chaos à ce mystère qui entoure ce bureau. D’autant plus que Comme Un Lundi nous plonge immédiatement dans le bain puisque le principe de boucle arrive en moins de 5 minutes.

Le réalisateur arrive à parfaitement maitriser cet espace clos grâce à une réalisation dynamique, remplie de procédés visuels très en accord avec la thématique du film, à base de gros plans sur ce calendrier électronique, mais aussi de scènes qui se répètent pour bien montrer la redondance de cette boucle infinie sans que jamais cela ne devienne envahissant. Tout est ici très malin et il est impossible de s’ennuyer. Le découpage est efficace aussi bien pour la narration que pour les moments comiques, avec une bande son tout aussi excentrique que les personnages et qui vient clairement accentuer l’aspect parfois décalé des situations. Mais derrière cette comédie légère se cache clairement une critique sociétale, une critique du monde du travail un peu fou qu’ont les japonais. On y voit tous les travers du système hiérarchique, mais aussi de l’intensité demandée qui est non seulement très appréciée, mais également attendue, au point que cela ne semble inquiéter personne que certains dorment carrément au bureau. Des employés qui se tuent à la tâche, quitte à faire des petites siestes à même leur bureau. Certes, des employés qui bossent énormément au point de ne plus compter leurs heures, il en existe un peu partout à travers le monde, mais c’est tellement répandu au Japon qu’un mot existe dans la langue japonaise pour décrire ce phénomène (« Karoshi »). Alors bien entendu, nous sommes ici dans une comédie et tout cela est fait sur le ton de l’humour afin de servir la thématique de la boucle temporelle, et jamais le propos ne devient lourdingue ou trop appuyé. Comme Un Lundi se montre maladroit par moment, notamment dans la façon qu’il a justement de dépeindre le monde du travail au Japon, où dans le message qu’il tente de véhiculer, à savoir que puisque nous sommes en collectivité, peut-être que nous devrions commencer à nous aider les uns les autres plutôt que de chacun penser à soi et détruire les quelques liens sociaux qu’il nous reste. Mais il possède surtout un côté touchant et réconfortant, avec un souffle de fraicheur typique de ces petites comédies japonaises qui fait qu’au sortir du générique de fin, on se rend compte qu’on a passé un vrai bon moment.

LES PLUS LES MOINS
♥ Les personnages attachants
♥ La mise en scène énergique
♥ Le concept bien exploité
♥ L’humour léger
⊗ Le message final un peu maladroit

Vous cherchez une petite comédie légère, charmante et attachante ? Vous avez envie de vous rafraichir les idées après une journée de dur labeur acharné ? Alors Comme Un Lundi est peut-être le film qu’il vous faut car il fait du bien par où il passe.

LE SAVIEZ VOUS ?
•Le réalisateur a déclaré qu’avec ce film, il « invite les spectateurs à s’arrêter, à prendre le temps de réfléchir à leur quotidien et à chercher ce qui a de la valeur hors de leur univers professionnel, mais aussi dans leur métier. […] Cette œuvre est comme un cri du cœur. »

• Pour le passage de la sensation de rêve à la prise de conscience à chaque début de semaine qui recommence, le réalisateur avouer s’être inspiré de la fin d’Inception (2010) lorsque les passagers d’un avion se réveillent d’un profond sommeil.



Titre : Comme Un Lundi / Mondays: See You ‘This’ Week!
Année : 2022
Durée : 1h23
Origine : Japon
Genre : Une semaine sans fin
Réalisateur : Ryo Takebayashi
Scénario : Ryo Takebayashi, Saeri Natsuo

Acteurs : Ryô Ikeda, Wan Marui, Yûgo Mikawa, Koki Osamura, Momoi Shimada, Harumi Shuhama, Makita Sports, Haruki Takano, Kotaro Yagi

Mondays: See You 'This' Week! (2022) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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