[Film] Basic Instinct, de Paul Verhoeven (1992)

Catherine Tramell, une romancière richissime vivant entourée d’anciens meurtriers, est soupçonnée du meurtre de son amant, la rock star Johnny Boz. Celui-ci a été assassiné à coups de pic à glace dans des circonstances similaires à celles décrites dans l’un des romans policiers qu’elle a écrits. Les romans de Catherine sont des polars qui mêlent sexe et crime et s’attardent sur l’instinct primaire des gens. Nick Curran, un policier chargé de l’enquête et ayant un lourd passé judiciaire, doit faire face à cette « mante religieuse ». Celle-ci n’hésite pas à utiliser ses charmes pour arriver à ses fins.


Avis de Rick :
Basic Instinct, en voilà un film très intéressant à revoir de nos jours, avec un bon gros recul, permettant ainsi de voir avec plus de précision sa place au sein du monde du cinéma, mais également au sein de la carrière de son auteur, Paul Verhoeven. Mais aussi finalement de son scénariste star. Car Basic Instinct marque également la première fois qu’un studio paye autant pour avoir les droits d’un scénario, 3 millions de dollars tout de même. Basic Instinct, débarquant sur les écrans Américain en version censurée le 20 Mars 1992 puis en France en non censuré le 7 Mai de la même année, marque les débuts d’une vague de thrillers érotiques qui va envahir les écrans durant les années 90. Ceux mettant souvent (mais pas uniquement) des femmes fatales, manipulatrices, et surtout, sexuellement libérées. Comment ne pas citer Sliver (mais on y reviendra) de Phillip Noyce en 1993, Color of Night de Richard Rush en 1994 (le film qui s’attirera le plus les foudres de la critique, mais que j’apprécie à titre personnel), Jade de William Friedkin en 1995, ou encore Harcélement de Barry Levinson en 1994, toujours avec Michael Douglas, ou The Last Seduction de John Dahl également en 1994, grande réussite du genre. Oui, sans Basic Instinct, il est certain que l’on n’aurait pas eu tous ces films, ou du moins, même pas la moitié d’entre eux. Puisque si je parlais de l’impact du film sur le genre, je mettais également en avant son scénariste, qui était déjà actif bien avant (il avait écrit par exemple Flashdance en 1983), mais qui suite au succès du film et surtout son salaire record, continuera dans cette voie, écrivant Sliver également l’année suivante, où il retrouve Sharon Stone, mais aussi Showgirls toujours pour Verhoeven et Jade pour Friedkin. Pour des salaires moindres mais toujours bien élevés, environ 2 millions à chaque fois. Mais Basic Instinct, c’est surtout le troisième film intégralement Américain pour Verhoeven, après avoir posé son style violent et radical sur la science fiction avec Robocop en 1987 et Total Recall en 1990. Il s’attaque donc, toujours avec la même fureur, au genre du thriller érotique avec Basic Instinct, qui sera un gros succès, puis avec Showgirls, qui sera un flop monumental, avant de revenir à la science fiction en 1997 avec Starship Troopers puis Hollow Man en 2000.

Un choix de carrière intéressant pour divers changement de thématiques, mais toujours cette hargne qui le caractérise si bien. Mais revoir Basic Instinct presque 30 ans après sa production, après le raz de marée d’ersatz plus ou moins réussis, et après toutes ces parodies, est-ce que ça fait que le film fonctionne toujours autant ? Lors de la fameuse scène de l’interrogatoire, comment ne pas penser à la parodie de La Cité de la Peur par exemple. Heureusement, il faut bien l’avouer, Basic Instinct a plus de choses à proposer que ce que les apparences laissent penser, et le métrage survit littéralement plutôt bien au poids des années, mais aussi au poids des copies, des parodies, ou de sa suite tardive en 2006. D’ailleurs, dés la scène d’ouverture, sulfureuse scène érotique se finissant dans un bain de sang au pic à glace, comment ne pas faire le rapprochement entre Basic Instinct et le cinéma de Brian De Palma, notamment Body Double (le côté érotique, le côté violent, la mise en scène millimétrée) mais pas que, par extension, au cinéma de Hitchcock. En plus sadique et violent bien entendu, et sexuel. Si l’on reste sur la surface, scénaristiquement, Basic Instinct n’a rien pour se différencier de la masse. On y suit un flic aux méthodes souvent radicales et qui n’hésite pas à se servir de son arme à feu, qui essaye de récupérer après avoir sombré dans l’alcool et la drogue, ayant donc un suivi psychologique, joué par Michael Douglas, qui joue donc là le cliché du flic du genre, qui enquête sur le fameux meurtre d’ouverture, et tout porte à croire que la possible coupable serait la petite amie de la victime, une écrivain qui, comme de par hasard, a décrit par précision le meurtre dans un de ces précédents romans. Sharon Stone brille dans le rôle, il n’y a pas à dire. Elle cultive le doute. Et en effleurant la surface, Basic Instinct a bien plus de choses à nous dire, à nous montrer. Et je ne parle pas de l’entre jambe de madame Stone en parlant de montrer !

Il y a quelque chose d’intéressant dans le développement de ses deux personnages. Le reste est plus anecdotique, à l’exception de la psy jouée par Jeanne Tripplehorne. Tous les autres personnages ne sont là que pour faire évoluer l’intrigue, point barre. Mais dans ce duo, voir trio, il y a clairement quelque chose. Catherine (Sharon Stone) a un tel rapport de force sur la situation, sur ce qui l’entoure, et donc, sur Nick (Michael Douglas) qu’elle est un personnage passionnant, manipulateur et forcément, fort. Elle maitrise la situation, elle mène la danse, elle gère les événements mais aussi ses envies, sait ce qu’elle veut et comment y parvenir, alors que Nick n’apparaît le plus souvent que comme une marionnette, cédant le plus souvent à ses pulsions, ne se contrôlant pas. Catherine est parfois douce, parfois froide, elle ne s’extasie pas pour un rien, manipule quelque peu Nick, à la fois pour le sexe, pour obtenir des renseignements pour son prochain roman, et peut-être, allez savoir, pour camoufler son propre crime ? Le climat est tendu, même sexuellement tendu souvent. Et ça, on le doit aussi bien aux acteurs qu’à la maitrise de Verhoeven avec sa caméra, et de l’équipe avec laquelle il s’est entourée. À savoir déjà Jerry Goldsmith à la musique, qui signe une vraie OST de polar noir à l’ancienne qui fait plaisir à entendre, mais également à la photographie avec les tons bleutés signés Jan de Bont avant qu’il ne devienne réalisateur deux années plus tard avec Speed, et qui collaborait donc de nouveau avec Verhoeven quelques années après La Chair et le Sang en 1985. Un travail techniquement très solide, et qui rappelle par moment encore une fois le Body Double de De Palma, comme lorsque Nick espionne depuis l’extérieur la résidence de Catherine de nuit, tel un voyeur. Non, c’est avec surprise (et joie) que Basic Instinct supporte le poids des années, mais également le poids de son héritage cinématographique. Sans doute pas la meilleure œuvre de Verhoeven, mais un film intéressant encore aujourd’hui. Avec sans doute quelques facilités dans son déroulement, et des personnages secondaires peu utiles, mais qui fait clairement le boulot et reste dans les meilleurs films de cette vague de thrillers érotiques.

LES PLUS LES MOINS
♥ Michael Douglas et Sharon Stone
♥ Une belle maitrise technique
♥ Deux personnages très intéressants
♥ Efficace
♥ Reste intéressant encore aujourd’hui
⊗ Beaucoup de personnages secondaires génériques
⊗ Quelques éléments d’intrigue un peu plus faciles
note75
Sous son image de sulfureux thriller (ce qu’il est en soit), Basic Instinct propose une étude de personnages plutôt intéressante et bien vue, le tout sous l’œil de Verhoeven qui soigne le tout et d’un excellent casting. On passera du coup outre certains petits défauts pour profiter de l’œuvre.



Titre : Basic Instinct

Année : 1992
Durée :
2h10
Origine :
U.S.A.
Genre :
Policier
Réalisation : 
Paul Verhoeven
Scénario : 
Joe Eszterhas
Avec :
Michael douglas, Sharon Stone, George Dzundza, Jeanne Tripplehorn, Dennis Arndt, Dorothy Malone et Leilani Sarelle

 Basic Instinct (1992) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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