[Film] Baba Yaga: Terror of the Dark Forest, de Svyatoslav Podgaevsky (2020)

Une famille emménage dans un quartier en banlieue d’une grande ville. Egor, le fils, ne supporte pas vraiment sa belle mère, Yuliya, ni Tatyana, la baby-sitter embauchée pour prendre soin de sa petite sœur, encore bébé. Mais avec quelques autres enfants du quartier, notamment la jeune Dasha, il va se rendre compte que cette ville cache un lourd secret caché à la vue de tous dans la forêt. Une sorcière vivant entre deux mondes se nourrit des enfants, effaçant leur existence de la vie de tous.


Avis de Rick :
Vous ne voulez pas qu’Halloween se termine ? Bon alors on va continuer un peu, et après l’Italie, partons vers la Russie. Ce n’est pas la première fois que je vous parle d’un film du réalisateur Russe nommé Svyatoslav Podgaevskiy. Non pas car son nom est difficile à écrire, oui, il l’est pour nous autre Européens. Mais car même si ses films ne sont dans le fond que de simples séries B, elles sont faites avec suffisamment de sérieux et une technique affutée pour plaire à l’amateur, à condition bien entendu de fermer les yeux sur des scénarios souvent simplistes et avec pas mal de facilités. Mais en général, oui, la qualité technique des films, leurs générosités et le rythme soutenu font passer un bon moment. Il y avait eu The Bride en 2017 par exemple, sympathique bien qu’aux influences beaucoup trop voyantes, ou Mermaid en 2018, qui pour une raison inconnue a eu droit à une sortie en France en DVD et Blu-Ray. Car oui, le cinéma Russe attire les éditeurs depuis quelques temps, et moi je ne m’en plaint pas, comme l’atteste les avis réguliers de bobines venant de Russie en ces murs numériques. Aujourd’hui, nous allons donc nous attarder sur le dernier métrage en date du réalisateur, le nommé Baba Yaga : Terror of the Dark Forest, que l’on appellera tout simplement Baba Yaga pour aller à l’essentiel. Un film contenant les défauts et les qualités habituelles du réalisateur, mais qui fait clairement preuve d’une ambition et d’une maitrise technique encore plus grande qu’auparavant, et en fait donc, à ce niveau strictement technique, le meilleur film de son auteur. Voir peut-être son meilleur film tout court en réalité. Baba Yaga, c’est une légende, celle d’une sorcière, prisonnière entre les deux mondes, celui des vivants et des morts, et qui capture et donc se nourrît d’enfants, allant jusqu’à faire oublier leur existence même aux pauvres humains de leur entourage. Voilà, après la légende de la Mermaid dans le film du même nom, le réalisateur s’attaque à une autre légende.

Et il n’a pas fait les choses à moitié il faut avouer, car dés le début, on comprend que les ambitions du métrage sont avant tout visuelle, et que Svyatoslav Podgaevskiy met le paquet à ce niveau là. Disons le d’emblée, visuellement, c’est magnifique. Que ce soit dans les plans en ville avec cette géométrie si particulière des bâtiments dans le quartier où se déroule l’intrigue, ou dans cette forêt dense où personne n’aimerait se perdre, ou même dans les appartements de nos personnages principaux avec des éclairages souvent surréalistes, c’est un pur bonheur pour les yeux. Maitrisé de bout en bout, jouant sur les ambiances, sur les couleurs, sur la profondeur de champ, la mise au point et tous les procédés habituels du genre, le réalisateur fournit une copie ultra propre et stylisée. Peut-être trop stylisée par moment il est vrai, mais ça fonctionne. La Russie nous prouve une nouvelle fois qu’au niveau technique, ils n’ont pas du tout à rougir face à la concurrence Américaine. Même si dans la pratique, certains artifices semblent parfois, comme souvent, un peu trop inspirés de ces influences là. Cruel dilemme. Et au niveau scénario ? Et bien avec sa légende bien sympathique, ses personnages qui ne sont certes que des adolescents mais qui évitent malgré tout les pires stéréotypes et ne sont pas tête à claque, on peut déjà dire que le film fait de gros efforts. Certes peut-être pas suffisant pour éviter les défauts habituels des bobines du réalisateur, comme de nombreuses facilités de scénario, ou quelques réactions un peu tirées par les cheveux, mais le rythme de croisière ne nous laisse pas franchement le temps de nous pencher dessus trop longtemps, tant l’on est déjà plongé dans une nouvelle idée visuelle qui peut marquer la rétine. C’est ce qui semble intéresser le réalisateur de toute manière. Et c’est ce qui fait la force de ces métrages, le sérieux avec lequel il s’attaque à chaque nouveau métrage, en tentant toujours de nouvelles choses.

Ici, les décors sont bien plus larges qu’auparavant, avec de gigantesques forêts, de jour comme de nuit, normale ou habitées par la brume, mais aussi des quartiers résidentiels, parfois également plongés dans la brume, avec quelques plans élégants filmés au drone. Pour ce qui est de l’horreur pure, le réalisateur a recourt une nouvelle fois à quelques procédés déjà vus ailleurs, mais les maitrise assez pour que la pilule passe sans soucis. Oui, on connaît le coup de la caméra qui nous montre un élément invisible et inquiétant à l’œil nu. Ou de cette force invisible que les personnages tentent de localiser par le son. Mais ça fonctionne, encore une fois, par la maitrise visuelle du sujet, et son rythme endiablé. Et puis il y a quelques idées franchement sympathiques dans le lot, comme cette sorcière qui n’apparaît que s’il y a de la lumière, ou bien ces gigantesques fils rouges à suivre jusqu’à son antre. Comme souvent par contre, on pourra quelque peu pester sur le final, qui tente d’en faire trop, de multiplier les apparitions, les monstres, les petits retournements de situations, alors que tous ne fonctionnent clairement pas. L’ajout d’un nouveau personnage mi-parcours, pour expliquer un peu l’intrigue, ajouter de la profondeur et des enjeux, c’est classique, et pas forcément une mauvaise idée, mais quand sa sous intrigue commence à prendre de l’importance sur la fin, avec en plus un design assez kitch, ça met un petit coup au métrage. Tout comme, comme souvent, la relative facilité du coup final, élément récurent du cinéma du réalisateur, mais également de pas mal de séries B au final. Mais si vous voulez juste une petite série B, très correctement filmée, faite avec sérieux, qui n’ennuie pas, Baba Yaga sera un film pour vous.

LES PLUS LES MOINS
♥ Visuellement travaillé
♥ Assez ambitieux
♥ Une légende intéressante
♥ Rythmé de bout en bout
⊗ Encore des soucis et facilités de scénario
⊗ Peu surprenant dans sa narration
⊗ Quelques idées vues ailleurs
note2
Certes, Baba Yaga n’est finalement qu’une petite série B, assez ambitieuse et très réussie visuellement, mais avec un scénario toujours léger et prévisible. Mais le réalisateur soigne ses métrages de plus en plus, et ça fait plaisir à voir.


Titre : Baba Yaga: Terror of the Dark Forest – Яга. Кошмар тёмного леса
Année : 2020
Durée :
1h37
Origine :
Russie
Genre :
Fantastique
Réalisation :
Svyatoslav Podgaevsky
Scénario :
Natalya Dubovaya, Svyatoslav Podgaevsky et Ivan Kapitonov
Avec :
Oleg Chugunov, Glafira Golubeva, Artyom Zhigulin, Svetlana Ustinova, Maryana Spivak et Aleksey Rozin
Baba Yaga: Terror of the Dark Forest (2020) on IMDb


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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