[Film] Aanch, de Rajesh Kumar Singh (2003)


Diwakar et Vidya quittent la ville de Bombay, dans laquelle ils étudient, pour leurs villages respectifs. Ils y seront mariés de force. Or, leurs villages d’Amarpur et de Mandaur sont rivaux et leurs habitants se détestent sans raison. Ce mariage va raviver les vieilles querelles et déboucher sur un véritable carnage.


Avis de Postscriptom :
Aanch, deuxième film du méconnu Rajesh Singh, est une transposition étonnante du classique de Shakespeare « Roméo et Juliette » dans l’Inde rurale. Diwakar est originaire du village d’Amarpur qu’il a quitté pour entamer des études d’ingénieur. Cette situation est une bénédiction pour lui car il peut enfin s’affranchir de la pression de son village natal qu’il déteste. Il ne supporte pas la bêtise et le manque d’instruction de ses habitants qui ne peuvent régler un problème autrement que par la violence. Chaque homme est armé et le moindre faux-pas ou regard de travers peut se solder par une mort violente. Son père le contacte et l’oblige à revenir au village où, sous les menaces de sa famille, il devra être marié de force à Vidya. Cette dernière est originaire du village voisin de Mandaur où tout se règle également par la violence physique. Une histoire d’adultère où quelqu’un qui déshonore la communauté se termine fréquemment par un lynchage collectif. C’est dans ce climat tendu que les deux villages vont se réunir … pour ce mariage qui va rapidement dégénérer.

Aanch débute sur un savoureux générique présentant les hommes du village de Mandaur en train de chanter la gloire de leur village sous fond de musique traditionnelle. Cette scène joyeuse sera brutalement interrompue par le lynchage injuste de l’un de ses habitants. Ces premières minutes résument parfaitement l’ambiance proposée par Rajesh Singh : une succession de scènes romantiques et de passages très brutaux qui dénotent de la réputation mielleuse dont souffre le cinéma de Bollywood. On retrouve de nombreux gunfights, la mise à sac d’un village, le meurtre de femmes et d’enfants … personne n’est épargné par cette overdose de violence. Heureusement que les nombreux passages musicaux viennent détendre l’atmosphère. « Mera Dil » est le plus ridicule et le plus kitch d’entre eux. Effectivement, c’est l’ambiance boîte de nuit qui servira de décor pour la présentation du personnage de Diwakar interprété par le jeune premier Sinchindra Bali. D’entrée de jeu, celui-ci nous fait son show, à base de bandana et de tenue en sky, accompagné de figurants en paillettes ou torse à poil. La scène se termine par une improbable chorégraphie sur des motos à l’arrêt. « Haye Ri » est le deuxième passage musical qui se déroule pendant le mariage de Diwakar et Vidya, juste avant leur première rencontre. Il s’agit d’une danse du ventre, afin d’exciter les foules, plus vulgaire que sensuelle où la danseuse est vêtue d’un jean bien moulant et d’un soutif qui est ajusté deux tailles au-dessous. C’est limite si rien ne déborde. Heureusement que le passage musical suivant vient apporter un peu de pudeur dans cette profusion de débauche. « Sun Mori » met en scène Mahadev, le chef du village de Mandaur, interprété par Nana Patekar, et ses faux airs de Freddie Mercury, découvert en France dans le fameux Bhoot de Ram Gopal Varma. La chanson est aussi belle que les images de cette scène nocturne et intimiste.

« Dilbar Jaani » est une scène rêvée de la rencontre entre Diwakar et la très sensuelle Vidya, voile au vent. Cette scène, plutôt quelconque, est magnifiée par l’excellente chanson qui sera le thème principal du film. Enfin, Rajesh Singh garde le meilleur pour la fin avec « Sada Suhagan » qui restera, sans aucun doute, le clou du spectacle lors d’une magnifique scène de nuit exclusivement féminine dans laquelle des milliers de bougies viennent embellir le lieu. C’est beau, fluide, coloré, originalement chorégraphié et merveilleusement chanté. Cette scène mérite la vision de Aanch à elle seule. Aanch est un film de contrastes où la violence côtoie la haine, où chaque personnage peut être doux et abominablement violent. On retrouve un manichéisme prononcé entre la femme innocente et soumise et l’homme vulgaire et emporté. L’autre contraste évident concerne l’homme éduqué qui vient de la ville et l’homme rural qui a bâti ses relations par la force. Tous ces antagonismes vont se retrouver dans une ultime chasse à l’homme finale ou presque tous les villageois seront à la poursuite des deux amants … pour finir dans un carnage sanglant.

LES PLUS LES MOINS
♥ Les chansons
♥ L’ambiance générale
♥ Le casting
⊗ Un bon gros ventre mou
Ce mélange de douceur et de barbarie fait sortir Aanch du ventre mou de la production de l’époque des studios de Bombay. C’est un vrai plaisir de retrouver une telle débauche d’énergie que l’on pensait perdue dans l’aseptisation du cinéma indien.



Titre : Aanch
Année : 2003
Durée : 2h39
Origine : Inde
Genre : Action / Drame
Réalisateur : Rajesh Kumar Singh
Scénario : Kamal Pandey

Acteurs : Arun Bakshi, Suchindra Bali, Poonam Jhawer, Ayesha Jhulka, Akhilendra Mishra, Sharbani Mukherji, Nirmal Pandey, Nana Patekar, Deep Raj Rana, Paresh Rawal

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Auteur : Postscriptom

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