[Film] 11:14, de Greg Marcks (2003)


A Middleton, plusieurs incidents apparemment sans aucun lien les uns envers les autres se recoupent tous vers un accident de voiture qui s’est produit une nuit à onze heures quatorze.


Avis de Cherycok :
Je ne comprends pas pourquoi je n’ai pas vu le film 11:14 avant alors qu’il traine dans ma filmothèque depuis de nombreuses années. Je ne comprends pas non plus comment cela se fait que 11:14 soit passé complètement inaperçu, avec une sortie ciné très confidentielle et aucune promotion pour la sortie du DVD dans son pays d’origine, les U.S.A. Chez nous, un simple DVD mais toujours pas de blu-ray à l’horizon. Toi qui lis ces quelques lignes, je suis presque sûr que tu ne connais pas l’existence de ce film indépendant jouant la carte du mindfuck sorti en 2003. A l’heure où déjà les blockbusters américains croyaient qu’il fallait être ultra friqué pour pondre un divertissement de qualité, certains films, au contraire, prouvaient qu’avec peu d’argent mais beaucoup d’envie et surtout un scénario bien écrit et un casting aux petits oignons, le résultat pouvait être très bon. Parce que 11:14 est bon. 11:14 est même très bon. Bien entendu, selon des critères qui n’engagent que moi. Mais tentez l’expérience, ça ne dure que 1h26.

Si on voulait résumer 11:14, on pourrait dire qu’il y a un conducteur ivre et un peu distrait, trois jeunes blagueurs dans une fourgonnette, une vendeuse qui a besoin d’argent, un collègue un peu stupide, un amant qui ne pense qu’au sexe, une adolescente perfide, un policier très occupé, un chien pas très obéissant, des clés de voiture perdues, des parents trop protecteurs, une boule de bowling et un pénis coupé. On pourrait également dire que nous avons cinq évènements différents qui vont s’enchainer, qui sont tous liés entre eux et qui s’expliquent les uns les autres au moment où l’horloge atteint 11h14. Tous les évènements et les motivations des personnages sont petit à petit expliqués à travers divers points de vue, chacun apportant une nouvelle pièce du puzzle. Malentendus, décisions irréfléchies, doubles jeux, malchances pures et simples vont s’enchainer durant 1h30 et les différents fils de la narration vont s’entrecroiser dans les rues pas si tranquilles de Middletown. Un détail au demeurant insignifiant dans la première histoire va prendre toute son importance dans les suivantes en jouant avec la relation de cause à effet. Chaque chose sera expliquée, rien ne sera laissé au hasard. Un type de narration déjà vu dans des films tels que Rashômon de Akira Kurosawa, popularisé par Quentin Tarantino et autres Guy Ritchie, et qui ici va briller par sa précision, par son souci du détail, et par un humour noir ravageur. Le film nous présente des évènements tous plus macabres les uns que les autres mais il va jouer sur le potentiel comique de tels récits plutôt que sur leur gravité et comment le temps et le destin peuvent créer des liens directs ou indirects entre des vies humaines qui ne se connaissent pas forcément. Dit comme ça, tout peut sembler un peu complexe. Mais dans les faits, tout est d’une simplicité qui frise l’insolence car malgré son inexpérience (il s’agit d’un premier film), Greg Marcks a tout calculé au poil de cul, de sa mise en scène à son scénario en passant par sa bande son et même son générique d’intro.

Le rythme du film ne faiblit à aucun moment et jamais le scénario ne part à la dérive, se permettant même des rebondissements bienvenus. 11:14 est un film très intelligent dans sa conception, aux personnages très réalistes qui font des choses réalistes mais qui vont être frappés par le destin / karma. Sans énorme tête d’affiche à l’époque, à l’exception de Patrick Swayze, le film dispose malgré tout d’un casting décent et de stars en devenir (Hilary Swank, Ben Foster, …). Tous livrent des performances qui font mouche et même lorsque les dialogues sont un peu faiblards, ils arrivent à les faire fonctionner et rendre l’ensemble crédible. Les transitions entre les cinq mini-récits, qui se croisent tous à une heure précise, sont fluides et naturelles, le spectateur n’est jamais désorienté pas plus qu’il ne lâche son écran malgré une résolution annoncée dès le début. Le réalisateur est assez malin pour nous donner la satisfaction de sortir du film en ayant réussi à raccrocher les différents wagons car rien n’est laissé au hasard. Le moindre détail à son importance ou l’aura plus tard, et on s’amuse à imaginer pourquoi le réalisateur va, le temps d’un plan furtif, filmer une boule de bowling abandonnée au milieu d’un cimetière, donner quelques secondes à un fruit trop mur jeté sur un parebrise, nous montrer un cadavre à la tête étonnamment plate. Et puis comment ne pas rire de cet enchainement de péripéties virant souvent à l’absurde tant l’humour noir qui est injecté dans la bobine est ravageur. Bref, je ne sais pas si, sur le moment, j’étais de bonne composition ou si le film est vraiment très bon, mais une chose est sûre, c’est que j’ai littéralement adoré.

LES PLUS LES MOINS
♥ La mise en scène millimétrée
♥ L’humour noir
♥ Le casting qui y croit
♥ Très bien rythmé
⊗ Certains dialogues

Dialogues drôles, personnages bien campés, scénario millimétré et malin, le tout accompagné d’une très bonne bande son, 11:14 est une belle réussite. Bien qu’il s’apparente parfois plus à un exercice de style, le divertissement proposé est de haute tenue et permet de passer un excellent moment.

LE SAVIEZ VOUS ?
• Le personnage de Buzzy était à l’origine écrit pour un homme. Lorsque Hilary Swank a lu le scénario, c’est le personnage qui lui a le plus  » parlé « , et elle a demandé au scénariste et réalisateur Greg Marcks de réécrire le rôle en tant que femme pour qu’elle puisse le jouer, ce qu’il a accepté.

• C’est à 11minutes et 14 secondes de film que le sang est découvert sur le coffre de la voiture par le policier et que l’enchainement de péripéties va réellement commencer.

• Lorsque Jack s’enfuit et se cache du policier, il court derrière un tas de bois. Jack panique lorsqu’il touche un morceau de bois et que celui-ci roule vers la maison. Ceci est dû au fait que le chien de Frank a pissé sur ce bois dans une scène supprimée.



Titre : 11:14 / Onze heures quatorze
Année : 2003
Durée : 1h26
Origine : U.S.A
Genre : Karma is a whore
Réalisateur : Greg Marcks
Scénario : Greg Marcks

Acteurs : Henry Thomas, Colin Hanks, Ben Foster, Patrick Swayze, Blake Heron, Hilary Swank, Barbara Hershey, Clark Gregg, Shawn Hatosy, Rachael Leight Cook

 Onze heures quatorze (2003) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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