En Chine au XIIe siècle, les 108 Rois-démons mettent le pays sous leur coupe. Alors que l’empire est à feu et à sang, le jeune prince Duan veut ramener la paix et surtout se débarrasser de ces envahisseurs a priori invincibles. Avec le moine Zhang-le-Parfait et la petite mendiante Pei Pei, il est bien démuni. Il fait alors appel à des renégats : l’agile Vipère jaune qui terrasse ses adversaires avec son ruban jaune, Tête de Leopard qui doit son surnom à ses tatouages sur son visage. Il y a également Face blanche qui manie les armes avec brio et le mastodonte Tourbillon-noir…
Avis de Cherycok :
Le cinéma d’animation français n’est pas le plus prolifique au niveau mondial. Il faut dire que de toutes façons, hormis Astérix, les sorties du genre se font dans le discret le plus absolu, se cantonnant en général à quelques salles de petits cinémas n’ayant pas eu les moyens de se payer à leur date de sortie les derniers blockbusters en date. Et c’est fort dommage car, même s’ils ne sont pas à chaque fois à la pointe de la technologie si on les compare à des Pixar ou des Dreamworks, ils n’en sont pas moins très intéressants voire carrément originaux. C’est le cas de ce 108 Rois-Démons, qui compense son histoire simple et ses personnages classiques par un visuel des plus originaux et enchanteurs.
Mis en boite par Pascal Morelli, qui s’était déjà essayé à l’animation en 2002 avec Corto Maltese : La Cour Secrète des Arcances, 108 Rois-Démons est une adaptation libre du roman chinois Au Bord de l’Eau, un des quatre grands romans classiques de la littérature chinois, gros pavé de pas moins de 2000 pages,… Autant dire que retranscrire cette histoire en 1h45 n’était pas chose aisée. C’est vrai que du coup, les nombreux personnages ne sont pas ou peu développés. A part le prince Duan, héros de l’histoire, et peut-être Tête-de-Léopard, ils paraissent un peu creux, ce qui nous empêche de nous attacher à eux à mesure que le film avance. On pourra noter également un problème de rythme, un comble pour une histoire de 2000 pages adaptée en 1h45. Clairement, 108 Rois-Démons aurait mérité 15 minutes de moins. Certaines scènes tirent en longueur, préférant laisser une grande place à la comédie.
Heureusement, dans l’ensemble, l’humour est plutôt réussi, et même si certains gags tombent clairement à plat, les querelles entre les différents personnages donnent le sourire immédiatement, surtout lorsqu’elles impliquent le charismatique mastodonte Tourbillon Noir, d’une finesse et d’une poésie sans pareille.
Parlons du point sur lequel 108 Rois-Démons est réellement innovant. Il possède un visuel réellement enchanteur et surtout novateur, sorte de film d’animation « en relief ». Entendez par là que les personnages sont de vrais acteurs sur lesquels ont été collées des têtes en images de synthèse. En résulte une impression assez saisissante de réalisme étant donné que les mouvements des vêtements ou les attaques à l’arme blanche sont effectuées par de vrais acteurs. Pour les décors, c’est la même chose, avec un mélange assez improbable de peintures à l’aquarelle, d’images de synthèse et d’objets semblant réels. Du jamais vu (du moins en ce qui me concerne) qui étonne au départ, déstabilise même, à tel point qu’on est parfois plus concentré sur la technique que sur ce qu’il se passe à l’écran, mais qui au final donne un résultat assez bluffant malgré une intégration pas toujours parfaite. Quelque part une œuvre hybride, proposant des patchworks de toute beauté.
En contrepartie, malgré leur aspect esthétique réussi, parfois très jeux vidéo, les scènes de combat sont assez moyennes chorégraphiquement parlant. Utiliser de vrais acteurs limite forcement la folie des enchainements martiaux et on est loin de la majorité des wu xia pian du cinéma chinois auxquels le film est en quelque sorte un hommage.
108 Rois-Démons est indéniablement une réussite visuelle. Son coté parfois un peu simpliste et sa limitation « A partir de 6 ans » en font un bon divertissement pour toute la famille, mais ceux qui cherchent un peu plus de profondeur dans l’histoire et les personnages risquent de rester sur leur faim.
Note :
Titre : 108 Rois-Démons
Année : 2015
Durée : 1h45
Origine : France / Belgique / Luxembourg / Chine
Genre : Il était une fois en Chine
Réalisateur : Pascal Morelli
Voix : Lucien Jean-Baptiste, Bertrand Nadler, Jean-Yves Chatelais, Franck Capillery, Daniela Labbé-Cabrera, Lucille Boudonnat, Philippe Catoire, Hélène Bizot, Hanako Danjo, Xavier Aubert