[Avis] Gozu, de Miike Takashi

Minami et Ozaki sont deux yakuzas inséparables depuis que le second a sauvé la vie du premier. Ozaki ne supporte plus le stress de son existence de criminel et présente des signes de paranoïa aggravée. Alors qu’il soupçonne un chien d’être anti-yakuza, son boss décide qu’il est temps de l’envoyer ad-patres et demande à Minami de l’emmener à Nagoya et de s’en débarasser. En route, Ozaki disparaît mystérieusement.

Avis de Rick :

Gozu, de Miike Takashi. Un autre film fou, mélange entre l’univers cher au réalisateur (les Yakuza, la folie du début et le délire de la fin) et l’univers de David Lynch. Et oui, un habile mélange de ses deux univers. En effet, le film commence sur un brin de folie, lorsque Ozaki, surnommé Aniki par Minami, commence à perdre la boule, et à voir des anti-yakuza partout, que ce soit dans une simple voiture qui roule derrière eux ou encore dans un minuscule petit chien qui le regarde par la fenêtre. Pour un spectateur non averti, ces scènes peuvent paraître d’un grotesque absolu. Peut être étais-ce ce que voulait Miike. Néanmoins, aussi folles soient ces scènes, elles baignent dans une atmosphère particulière grâce au talent du compositeur, Endô Kôji, qui à quelques exceptions prés (Ichi The killer), a composé la musique de tous ces films. La musique de Gozu est très étranges, autant à la vision du métrage que pour les oreilles. Mélange de sonorités étranges, de grincements, elle met en place l’atmosphère dés les premiers instants.

Pour le scénario, Miike est à nouveau entouré par Satô Sakichi, qui avait écrit l’adaptation de Ichi the killer. Mais comme le fan le sait, Miike a la fâcheuse habitude de modifier souvent son script de manière folle pendant le tournage, laissant libre ses idées. Enfin, revenons au film, revenons à Gozu. En chemin pour se débarrasser de Ozaki, Minami s’arrête dans un restaurant à Nagoya, lieu où il devait l’emmener, pour manger, et en sortant, Ozaki a disparu. Plus une trace. Il va alors se lancer à sa recherche et faire la connaissance des habitants étranges du village. Et c’est là que le film se lance dans l’aventure Lynchienne. Hallucinations, personnages inquiétants, tout est là. On se croirait en train de regarder Twin Peaks, où encore mieux tellement la ressemblance est frappante, Sailor et Lula. Le rythme sera assez lent, et le spectateur ira de surprises en surprises, de lieux en lieux, d’habitants en habitants, devant faire une croix sur la rationalité telle qu’on la connaît pour se plonger dans le monde à part de la ville de Nagoya. Une ville comme les autres en apparence, comme on en voit tant au Japon. Mais la ville n’est tranquille et classique qu’en apparence, puisque sous la petite ville tranquille, il y a bien pire. Ces habitants au comportement étrange vont vite s’avérer un danger pour Minami. Il devra même se méfier de ses “alliés”. Dés son arrivée, il se rend compte de l’ambiance. Les seuls clients d’un restaurant ne font que discuter du temps qu’il faisait hier, la gérante de l’auberge veut lui frotter le dos dans le bain et prépare un lait bien spécial.

Et cela va empirer au fur et à mesure. Trouver l’aide d’un ancien gang après avoir répondu correctement à une énigme, Minami sera secondé dans ses recherches par un homme ayant une maladie, une défragmentation de la peau. Charmant, mais le personnage en question s’avére particulièrement gentil envers lui. Peut être même un peu trop, puisqu’il aura beaucoup de mal à vouloir le quitter, même la nuit à l’hôtel. On ne saura jamais quelles sont ses vraies intentions, puisque cela n’intéresse pas le réalisateur, préférant suivre Minami dans sa ballade chez les fous, dans sa quête. Quête ou, en plus de retrouver son ami, il finira par se retrouver lui même, trouvant en quelque sorte sa voie. Les autres personnages, importants ou non, sont du même acabit. La gérante de l’hôtel sert du lait à ses clients qu’elle confectionne ele même, l’américaine de l’épicerie arrive à dialoguer en japonais en lisant des réponses préécrites sur un mur. Autant de personnages et de situations étranges qui donnent l’impréssion de regarder un film de Lynch se déroulant au Japon, ce qui nous emmène dans un lieu étrange et déroutant, mais familier, où pour autant la signification ne semblera pas intéresser non plus le réalisateur. Miike, contraste l’humour et l’étrangeté dérangeante, ainsi qu’une dose de sexe. Et lorsque Minami croit enfin qu’il sera récompensé de ses efforts en retrouvant Ozaki, il ne trouvera qu’une femme. Sorte de clé de l’énigme, qui donnera la réponse à toutes les questions. A condition, comme Minami, que le spectateur la croit.

Une ballade chez les fous, avec des personnages barrés, des scènes qui restent en mémoires, des moments parfois drôles, déroutants, sanglants. Miike réussit un film unique mais pas exempt de défauts. A la fois hyper simple et très abstrait, Gozu est mené à un rythme extrêmement lent qui ne plaira pas à tout le monde.

 

 

Titre : Gozu – Gokudô kyôfu dai-gekijô: Gozu – 極道恐怖大劇場 牛頭 GOZU
Année : 2003
Durée : 2h10
Origine : Japon
Genre : Étrange, étrange

Réalisateur : Miike Takashi

Acteurs : Sone Hideki, Aikawa Shô, Yoshino Kimika, Ishibashi Renji et Hino Shohei


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Auteur : Rick

Grand fan de cinéma depuis son plus jeune âge et également réalisateur à ses heures perdues, Rick aime particulièrement le cinéma qui ose des choses, sort des sentiers battus, et se refuse la facilité. Gros fan de David Lynch, John Carpenter, David Cronenberg, Tsukamoto Shinya, Sono Sion, Nicolas Winding Refn, Denis Villeneuve, Shiraishi Kôji et tant d'autres. Est toujours hanté par la fin de Twin Peaks The Return.
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