[Semaine « Exotique »] Jour 2 – La Légende de Viy (2014)

Londres, 1713. Le cartographe anglais Jonathan Green part en repérage des endroits inexplorés de la Transylvanie. Au-delà des montagnes des Carpates, il découvre un village isolé du reste du monde, dont les habitants terrorisés se cachent des démons et autres créatures qui en ont pris possession. Seul le téméraire cartographe semble alors pouvoir percer les mystères qui entourent ces créatures impitoyables qu’il lui revient d’exterminer…


Avis de Cherycok :
Ah la Russie… Un pays que beaucoup connaissent uniquement via les innombrables vidéos WTF de mecs bourrés, de chansons étranges et de compil dashcam qui inondent Youtube, Dailymotion et consort ; un pays dont beaucoup redoutent le cinéma qui, il est vrai, a la réputation d’être un peu très beaucoup particulier. Pourtant, depuis quelques années, les réalisateurs locaux s’efforcent d’expatrier leurs productions un peu partout dans le monde en les américanisant ou les stylisant à outrance, avec une réussite plus ou moins probante. On l’a vu récemment avec le mauvais 22 Minutes mais souvenez-vous, Night Watch (2004), Day Watch (2006), Wolfhound (2007), Battlestar Rebellion (2009) ou plus récemment Stalingrad (2013), tous ces films venaient du pays de la vodka (oh le vilain cliché !). Dernière grosse production en date et non des moindres, Viy (2014), rebaptisée chez nous La Légende de Viy (Forbidden Empire chez les ricains), est un film qui a fait péter le box-office local à tel point qu’il aura été le plus gros succès commercial de 2014. Gros budget, effets spéciaux à outrance, casting international, ce remake d’un film de 1967 du même nom, lui-même adapté d’une nouvelle du même nom datant de 1835 et écrite par Nikolai Gogol (vous suivez toujours ?), est ce qu’on appelle un divertissement popcorn dans toute sa splendeur, avec toutes les qualités et défauts inhérents au genre.

Les nombreuses critiques, souvent très négatives, glanées ci et là sur le net me laissent dans l’incompréhension la plus totale. Pourquoi tant d’acharnement sur ce film qui ressemble à s’y méprendre aux blockbusters hollywoodiens alors que ces derniers sont encensés, parfois de manière parfaitement injustifiée, par ces mêmes personnes ? Parce que la règle dit « Si c’est américain, c’est bien ! » ? Bah oui mais non en fait…
Après cette magnifique citation du génialissime philosophe Bruce Campbell (dans Evil Dead III, 1993), reprenons le fil de notre chronique. Oui, La Légende de Viy est un film clairement taillé pour l’international. Pourtant, chez nous et dans de nombreux autres pays, il ne sera qu’un Direct to Video parmi tant d’autres. Pourtant, une sortie dans les salles obscures aurait pu être envisagée sans aucun problème car visuellement, avec sa 3D native et avec ses très nombreux effets spéciaux, La Légende de Viy n’a pas à rougir de la comparaison avec certaines productions américaines. Car oui, La Légende de Viy est beau, La Légende de Viy est très beau même. Outre les paysages et les décors très baroques, un coté steampunk bienvenu même si pas assez poussé, le film ne lésine à aucun moment sur les effets spéciaux en images de synthèse, et ce jusque dans le générique qui fera le bonheur des possesseurs de matos 3D. D’autant plus que le bestiaire qui nous est proposé est des plus créatifs et à l’origine de la plupart des meilleures scènes du film visuellement parlant. La scène du repas nous propose des monstres tout bonnement hallucinants, que n’aurait pas renié un certain Guillermo Del toro, semblant sortis d’un esprit malade ou d’une soirée cuite / fumette magique qui serait partie sur un bad-trip. Multiples petits diablotins volants, racines vivantes à haut degré de prolifération, créatures étranges aux milles yeux ou tout simplement mix d’animaux improbables et surtout impossibles à décrire par écrit, l’imagination des scénaristes russes aura été plus que débordante et surtout bien plus originale que chez leurs meilleurs ennemis ricains.

Pourtant, La Légende de Viy est un peu trop sage, du moins à mon goût. Sans doute que le film s’est voulu assez grand public, histoire de ratisser large le pognon engrangé. Mais mis à part une ou deux scénettes comico-gores, on en attendait peut-être un peu plus venant d’un pays se voulant parfois un peu extrême dans sa façon d’être, non pas dans les effets sanguinolents, ils ne sont pas indispensables, mais plus du côté des idées farfelues, du second degré et du fun qu’auraient pu procurer certaines scènes qui du coup tombent parfois un peu à plat. A trop vouloir copier le cinéma américain, on finit par en prendre également les défauts.
Mais malgré un montage parfois chaotique, peut-être dû à la version internationale coupée de 20 minutes, on se laisse aisément porter par cette histoire de soi-disant monstre qui terrorise un village reculé, un peu à la façon d’un Pacte des Loups (Christopher Gans, 2001) mais en moins chiant, provocation gratuite s’il en est mais que ceux qui ont comme moi souffert pendant 2h20 à l’époque comprendront. Même si la direction artistique du film ainsi que sa photo pourront diviser, la mise en scène reste très soignée et les scènes d’action toujours très lisibles avec une caméra qui sait rester stable. Oleg Stepchenko l’a bien compris, l’abus de shaky cam est dangereux pour les neurones des spectateurs, un peu comme la vodka.
Le casting est impeccable, alignant tout un tas de tronches pas possibles aux moustaches, barbes et coiffures assez indescriptibles mais qui collent parfaitement à l’univers étrange auquel essaie de nous faire adhérer le réalisateur. Au milieu de tout ce petit monde, deux têtes connues du grand public, le charismatique Charles Dance (le papa Lanister de Game of Thrones, Last Action Hero), ainsi que Jason Flemyng, acteur anglais habitué aux seconds rôles, vu dans Arnaques Crimes et Botaniques, Snatch ou plus récemment dans L’Etrange Histoire de Benjamin Burton, endossant ici le premier rôle dans une superproduction, russe certes, mais superproduction quand même.

Malgré deux ou trois longueurs et un humour pas toujours très heureux, La Légende de Viy ne mérite certainement pas l’abatage en bonne et due forme qu’il subit sur la toile. Divertissement popcorn pur et dur au visuel réussi, il se regarde sans aucun problème et permet de passer un chouette petit moment avec en prime le plaisir des yeux.
A noter qu’une suite est prévue, qu’elle se déroulerait en Chine et que, si on en croit ce qu’il se dit, la Jackie Chan Stunt Team serait de la partie. Certains sites russes précisent même que Jackie Chan himself ferait partie du casting. Vraie info ou spéculations, l’avenir nous le dira.

Note :



Titre : La Légende de Viy / Viy / Forbidden Empire
Année : 2014
Durée : 1h51 / 2h10
Origine : Russie / Ukraine / République Tchèque
Genre : Blockbuster hollyw… euh… russe
Réalisateur : Oleg Stepchenko

Avec : Jason Flemyng, Andrey Smolyakov, Aleksey Chadov, Agnia Ditkovskite, Yuriy Tsurilo, Charles Dance, Olga Zaytseva, Aleksandr Yakovlev, Igor Jijikine, Valeriy Zolotukhin, Nina Ruslanova

 Viy (2014) on IMDb


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Auteur : Cherycok

Webmaster et homme à tout faire de DarkSideReviews. Fan de cinéma de manière générale, n'ayant que peu d'atomes crochus avec tous ces blockbusters ricains qui inondent les écrans, préférant se pencher sur le ciné US indé et le cinéma mondial. Aime parfois se détendre devant un bon gros nanar WTF ou un film de zombie parce que souvent, ça repose le cerveau.
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