Gabriel, traqueur de criminels en Asie pour le compte des services secrets britanniques, se retrouve obligé pour son ultime mission de retrouver un agent disparu dans une zone démilitarisée à la frontière nord-coréenne… Sur place il va lui-même être capturé et découvrir un trafic odieux auquel il va se charger de mettre fin, avant de s’échapper de la plus grande dictature du monde…
Avis de Postscriptom :
Le premier film live de Mathieu Weschler, réalisateur du déjà mythique THE TRASHMASTER, polar hard-boiled réalisé uniquement avec le jeu GTA 4 (PC) qui a prouvé qu’on pouvait faire un long-métrage complet de cette manière singulière (ma critique ICI) et avec quel résultat puisqu’il ne s’agissait ni plus ni moins que du meilleur film de genre français de ces trente dernières années, d’ailleurs pour ceux que ça intéresse (ou qui ne me croient pas…) il est toujours visible en intégralité ICI.
Mais Mathieu n’est pas un geek reclus dans sa chambre, il a vraiment étudié le cinéma, fait des pubs, des courts-métrages, notamment les sympathiques BLACKSHADOW et TIMING (déjà avec Seydina Balde), bref il avait tout les atouts dans sa manche (connaissance totale de la grammaire cinématographique, expérience du tournage live) pour séduire un grand producteur ayant vu et apprécié THE TRASHMASTER et susceptible de miser sur lui…
On pouvait attendre longtemps (on est en France je le rappelle) mais Seydina Balde, acteur, ami mais aussi co-producteur du film, a finalement donné sa chance à Mathieu… Avec Bey Logan d’ailleurs, sympathique british qu’on connaît bien ici pour avoir grandement contribué à la reconnaissance du cinéma asiatique dans les années 90 via la collection HKLEGENDS, il a même bossé avec Donnie Yen et se trouve être à l’origine de la (re)découverte des quarante minutes inédites du JEU DE LA MORT, bref un homme à cheval entre orient et occident qui ne pouvait qu’être sensible au style de THE TRASHMASTER, mix parfait entre le cinéma de Scorsese, Michael Bay (si) et les meilleurs réalisateurs de polars hong-kongais de la grande époque (John Woo, Johnny To…).
La question était donc de savoir si Mathieu pouvait transposer son style de mise en scène exigeante et complexe à l’échelle d’un long-métrage live, tourné de plus dans des conditions difficiles sur cinq petites semaines, en Chine et à Hong-Kong, le tout pour un budget plutôt serré d’un demi-million de dollars (en gros le salaire d’une journée de tournage pour le moins connu des Expendables) !…
La réponse est oui, car même si évidemment on ne pouvait pas s’attendre à un film de l’ampleur de THE TRASHMASTER ça n’a pas empêché Mathieu de faire preuve d’une ambition certaine (un film en Corée du Nord quand même !) tout en prenant en compte les limites de son budget, une grande partie de l’action se déroulant dans un bunker coréen (après une scène d’introduction à Hong-Kong) pour finir dans un no man’s land très symbolique…
Ce confinement qui aurait pu être fatal au film devient une force dès lors que le bunker devient une sorte d’espace mental délirant (métaphore de la Corée du Nord) dont le héros ne pense qu’à s’échapper en bottant le cul de tous ceux qui se dressent sur son chemin, ce qui nous vaut quelques scènes plutôt délirantes et surréalistes comme celle de la baston sur une carte du monde géante (ou ce plan « tournant » magnifique que je vous laisse découvrir…), toutes les règles de la plus élémentaire normalité étant bafouées dans ce pays qui marche sur la tête…
On retrouve bien sûr la mise en scène de Mathieu, avec toujours ce cinémascope classe et élégant qui ne s’apprend pas dans les écoles, et l’action n’est pas en reste bien sûr, intervenant de façon régulière de manière totalement décomplexée, parfaitement chorégraphiée et exécutée par Seydina Balde (cinq fois champion du monde de karaté). Mention spéciale aussi aux acteurs, tout particulièrement le grand méchant joué par Kirt Kishita, très crédible (et hilarant) dans son rôle de tortionnaire cinéphile (à l’image de son ex-grand leader Kim Jong-Il, dont je vous recommande les livres sur le septième art) et l’héroïne (Muriel Hofmann) superbe et élégante…
Alors bien sûr tout n’est pas parfait, le rythme est parfois en dents de scie, certains personnages ne servent pas à grand-chose (l’espion que doit délivrer Gabriel), certains plans sont un peu sombres et malgré tout parfois les limites du budget et du temps de tournage se font ressentir, mais pour ceux qui savent décoder une mise en scène et passer outre ces défauts ils découvriront une petite série B atypique, modeste et maîtrisée, des qualités si peu courantes de par chez nous, bref Mathieu Weschler a transformé l’essai de son premier film et peut sereinement aller trouver des fonds pour nous livrer celui qu’on attend tous, vous l’avez deviné, une version live de THE TRASHMASTER !!!…
A noter que le film est disponible en DVD en Grande-Bretagne.
Titre : The Borderland
Année : 2014
Durée : 1h28
Origine : France / Angleterre
Genre : Action / Comédie noire / Arts Martiaux
Réalisateur : Mathieu Weschler
Acteurs : Seydina Balde, Richard Sammel, Kirt Kishita, James Gerard, Muriel Hofmann, Michael Chan, Jason Tobin, Sabine Crossen, Jared Robinson, Serge Crozon-Cazin
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