Nagma, fille d’un avocat paraplégique, tombe amoureuse du ténébreux Edison qui vient tout juste de lui sauver la vie après avoir botté le cul à la racaille tamoule. La vie d’Edison est des plus banales dans un film indien puisqu’elle est rythmée par ses entrainements de karaté et par son métier de conducteur de rouleau compresseur … Cependant, le poil de torse dans la chorba est que le ministre véreux du quartier veut épouser Nagma. Et pour arriver à ses fins, il embauche l’idiot du village. Tout un programme !
Avis de Laurent :
Après de long mois d’inactivité sur HKmania, il a fallu me faire violence pour retrouver la flamme et l’inspiration. La méthodologie à adopter face à ce sérieux manque de motivation est de trouver le film idéal pour se remettre à l’écriture. J’explore alors les piles de films en attente de visionnage … rien d’excitant … Bref c’est mal parti. Je muscle alors mes recherches jusqu’à tomber dans le fond du carton dédié aux films sensés ne jamais en sortir … ces films appartenant à la caste des « invisionnables » sont originaires, en règle générale, du sud de l’Inde ou de Turquie. C’est alors que je mets la main sur un truc à la jaquette hideuse intitulé Ek Aur Dharmatma. On y voit une mosaïque d’images tirées du film avec des flics à moustache, des séquences de karaté et des grosses Tata tout-terrain datant des années 80. Le plus mauvais présage est qu’il m’est impossible de me remémorer où j’ai pu dénicher cette sombre et obscure galette. Probablement dans les bacs à soldes du quartier de la Chapelle. J’essaie de glaner quelques informations sur le net … mais force est de constater que le film est peu référencé avec, pour seules informations, l’année de sortie et une partie du cast.
Ek Aur Dharmatma est donc un film probablement tamoul (ma version est doublée en hindi pour compliquer les choses) datant de 1991. À part le cinéma de Rajinikanth et de K. S. Ravikumar je ne connais pratiquement rien de ce qui a été produit dans la région durant ces années là. Ek Aur Dharmatma est comme attendu un film fourre- tout mêlant action, romance et comédie grasse avec son lot d’improbabilités de mise en scène et ses séquences « what the fuck ??! ». Le réalisateur Sathyaraj se met lui-même en scène en incarnant … les 3 personnages principaux ! Il fallait oser mais des maquilleurs de haut niveau assurent la supercherie : l’un des personnages sera chauve et paraplégique, le second sera barbu et enfin le troisième aura une belle moustache. Yeah !!! Ek Aur Dharmatma raconte donc l’idylle amoureuse entre la belle Nagma (et ses 75 kilo de Nutella dans les cuisses) et le bodybuildé Edison (à la fois karateka à la pilosité impressionnante et conducteur de rouleau compresseur sur les chantiers). Seulement Edison n’est pas assez classe (et caste) pour le père de Nagma … C’est alors qu’un ministre véreux tente de se serrer la belle Nagma en s’aidant de l’idiot du village au physique hybride entre Hitler et Boy George. Je ne sais pas si vous suivez toujours mais si c’est le bordel dans votre tête c’est un peu normal … En effet, Ek Aur Dharmatma est du genre savoureusement mal ficelé dans sa narration. Mais bon, un scénario solide est tout sauf ce que l’on est venu chercher dans ce film.
Parlons peu mais bien. En ce qui concerne la romance, Ek Aur Dharmatma étonne de par sa subversion et sa vulgarité assumées. Sathyaraj joue habilement avec ce qui est habituellement toléré en termes d’érotisme dans le cinéma indien. S’enchaînent alors des séquences musicales aux tenues fétichistes douteuses en polyvinyle arborant de magnifiques motifs dalmatiens, des scènes à la limite du baiser ainsi que de nombreuses séquences en maillot de bain ou en wet sari. Après, il faut aimer le standing local des années 90 au niveau de la bogossitude du cast … mais ceci est un autre débat.
Au niveau de la comédie, c’est lourd et indigeste. L’essentiel tournant autour du cabotinage de l’idiot du village. Bref passons, là n’est pas l’intérêt principal de Ek Aur Dharmatma.
Enfin … c’est le moment de présenter ce que l’on est venu chercher dans Ek Aur Dharmatma : des séquences d’action indescriptibles ! Tout ce qui touche de près ou de loin à de la castagne dans Ek Aur Dharmatma n’est que de la pure jubilation sous acide. Sathyaraj ose tout avec un savoir faire proche de ce que faisaient les cinéastes turcs une décennie auparavant : des sides-kicks d’une légèreté pachydermique, des bons bruitages au synté bontempi, de la destruction de mobilier, des mannequins en mousse désarticulés et un montage sans queue ni tête pour le plus grand plaisir des cinéphiles aventureux. Edison nous gratifie même d’un grand écart facial faisant passer la parodie de Valmont des Inconnus pour du Godard. La baston est donc omniprésente tout le long du métrage avec une fabuleuse séquence d’ouverture et un final dantesque. Le reste est globalement soporifique et anecdotique.
Au final, Ek Aur Dharmatma, à défaut d’être un bon film, a au moins le mérite de m’avoir aidé à me replonger dans la présentation de films qui n’intéresseront personne. De la thérapie tamoule en somme. Kitsch, incompréhensible mais fun, Sathyaraj réunit tous les ingrédients qui rendent le cinéma tamoul attachant avec ses acteurs au physique calibré autrement de ce qui se fait ailleurs. Bancal mais rafraichissant ! De quoi me donner envie de rejeter un œil dans mon carton de films prévus initialement pour la déchetterie.
Titre : Ek Aur Dharmatma
Année : 1991
Durée : 2h01
Origine : Inde du Sud
Genre : Actioner turkish like
Réalisateur : Sathyaraj
Acteurs : Nagma, Sathyaraj, Radhika, Silk Smitha