[Film] Crazy Thunder Road, de Sogo Ishii (1980)


Aux alentours de la ville nommée Illusion, près d’une autoroute traversant le Japon, deux bandes de motards s’affrontent. Après la défaite de son gang, le chef des anarchistes, qui a perdu une main au passage, coupe tous les ponts. Mais lorsque ses anciens amis deviennent membres d’un parti d’ultra extrême-droite qui cherche à rétablir ordre et autorité au Japon, il se rebelle et prend les armes.


Avis de Ryô Saeba :
Sogo Ishii commence sa carrière cinématographique très jeune puisqu’à 19 ans il tourne un court métrage de 15 minutes racontant l’histoire d’un jeune lycéen qui tue son professeur avant de se faire traquer par la police à travers tout le lycée. Deux années plus tard, la Nikkatsu trouve le sujet intéressant et engage Sogo Ishii pour tourner le remake de son film sous forme d’un long métrage. Mais la Nikkatsu lui assigne un assistant réalisateur qui est beaucoup plus expérimenté et qui prend en charge la réalisation du métrage en sa quasi intégralité. Sogo Ishii très remonté et en colère décide d’utiliser cette frustration pour réaliser ses 2 films suivant de manière indépendante : Crazy Thunder Road et Burst City. Le film est donc le premier véritable long métrage de Sogo Ishii. A l’époque, Sogo est très énervé contre la société et complètement sous influence de la culture punk mais il a beaucoup de mal à réaliser des films construits au niveau narratif, Crazy Thunder Road ne fait pas exception.

Grand manifeste du film de bosozoku (gangs de motards) et de la culture punk, Crazy Thunder Road tout comme Burst City souffre donc d’une narration très explosée partant dans tous les sens mais toujours avec cette énergie et ce chaos qui sont présent dans les films du début de carrière de Sogo Ishii. D’ailleurs, même dans des films comme Angel Dust ou encore Electric Dragon, la narration n’a rien de traditionnelle à la différence qu’elle est cependant maîtrisée. On assiste donc à un film assez inégal dont le chemin n’est pas défini avec cependant une seconde partie de métrage plus punchi et un final grandiose.

On retrouve un peu tout et n’importe quoi avec cependant une constante durant tout le film et même durant toute la carrière de Ishii, de Panique au lycée jusqu’à Dead End Run : une musique superbe indissociable du métrage qui apporte énormément à chacun de ses films. C’est cependant déjà un peu moins chaotique que Burst City et une histoire essaie de se mettre en place avec l’arrivée d’un extrémiste fasciste recrutant des motards un peu perdus pour rétablir l’ordre et l’autorité au Japon. Car Ishii, même s’il dit n’avoir pas voulu faire un film de politique critique ; indéniablement ces groupes étaient bel et bien présent au Japon à cette époque et si on se rappelle bien étaient également déjà présent dans son film précédent Panique au lycée avec un camion et des uniformes similaires. A côté de cette trame, il y a également des personnages secondaires comme Ken le motard qui décide de raccrocher pour sa copine par exemple mais ils sont trop peu ou trop mal exploités pour qu’ils soient réellement intéressant. D’ailleurs, bizarrement, dans toutes les scènes où Ken et sa copine apparaissent, la musique change soudainement, proche de la balade et Ishii va jusqu’à les filmer sur un lit, les rayons du soleil traversant la fenêtre, pendant qu’ils jouent à un jeu de société semblable au petits cheveux. Un grand moment de mièvrerie intense et décalé par rapport au reste du métrage, peut être qu’un des amis du réalisateur a quitté un groupe à cause de sa copine et que Ishii s’est vengé en insérant ce personnage dans ce film. Les acteurs ont tous des  » gueules  » de tueurs et des looks très typés années 80 avec les gros blousons en cuirs et la banane sur la tête, ce qui n’est pas étonnant vu que si les acteurs principaux viennent du théâtre, tous les seconds rôles sont de vrais bikers et ça se voit.

Mais ce qui reste le plus intéressant est sans doute la 2ème partie et surtout le final du métrage complètement no future où un enfant s’injecte son fix, deale armes et drogues et va même jusqu’à tuer, ce qui sauve le  » héros  » du film au passage, et ce 10 ans avant Robocop 2. Et puis il y a ce combat géant où le héros armé jusqu’aux dents massacre tout sur son passage à grand coup de bazooka fait maison, grenades et autre mitrailleuse énorme semblable à celle de Terminator 2. C’est donc dans un énorme chaos que se déroule cette bataille explosive annonciatrice de son film suivant Burst City. La fin est bien représentative de l’état d’esprit de Sogo Ishii à l’époque : le héros enfourche une moto cassée et lorsque l’enfant lui annonce qu’elle n’a pas de freins il répond :  » là où je vais je n’en aurais pas besoin  » avant de foncer à toute allure sur la route tête baissée. Pas étonnant donc de la part d’un Sogo Ishii qui a déclaré que pendant sa jeunesse, il vivait à fond en pensant mourir avant 30 ans, esprit bien représentatif de la culture punk et de l’attitude no future explique-t-il.

LES PLUS LES MOINS
♥ Une belle énergie
♥ Le final
♥ La musique
⊗ Narration explosée
Beaucoup disent que ce film a influencé toute une génération de réalisateurs et ce n’est pas impossible, quand on y pense, qu’un réalisateur comme Takashi Miike n’ait pas repris certaines idées comme le coup de l’enfant pour Fudoh ou encore le fameux coup du bazooka pour son Dead or alive.


CRAZY THUNDER ROAD est sorti chez Spectrum Films en combo Blu-ray avec le film Electric Dragon 80.000V au prix de 30€. Il est disponible à l’achat ici : Spectrumfilms.fr

En plus des films, on y trouve : Masters approuvés par Sogo Ishii, Nouvelle interview de Sogo Ishii, Commentaire audio de Tom Mes, Essai Vidéo de Jasper Sharp sur le Jishu Eiga, Sogo Ishii par Yves Montmayeur, Conférence de presse, Interview du producteur Takenori Sento, Séquences commentées, Dossier de presse original de 1980 et Bande-annonces



Titre : Crazy Thunder Road / 狂い咲きサンダーロード
Année : 1980
Durée : 1h38
Origine : Japon
Genre : Film de Bosozoku
Réalisateur : Sogo Ishii
Scénario : Sogo Ishii, Mitsuhiko Akita, Masumi Hirayanagi

Acteurs : Tatsuo Yamada, Masamitsu Ohike, Kohi Nanjo, Nenji Kobayashi, Yosuke Nakajima, Kazuhiro Sano, Daisuke Iijima, Yoichi Iijima

 Kuruizaki sanda rodo (1980) on IMDb


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Auteur : Ryo Saeba

C’est véritablement Shaolin Soccer qui déclencha un élan de passion à partir duquel il se lança dans la vision de films sous titrés anglais. Et là ce fut le bonheur, il avait devant lui tout un pan du cinéma à découvrir, des genres propres au cinéma de Hong Kong comme le kung fu old school, les girls with guns ou encore le Wu Xia Pian...
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